Prévention des agissements inappropriés : les managers en première ligne
Au sein des entreprises, le service des ressources humaines n'est pas la seule partie prenante en matière de prévention des comportements inappropriés. Les managers ont également un rôle essentiel à jouer. Or ils ne sont pas toujours préparés pour assumer une telle responsabilité.
Propos sexistes, blagues racistes ou homophobes, harcèlement moral discriminatoire ou sexuel... Le continuum des violences internes à l'entreprise peut revêtir de nombreuses formes. Leur point commun est leur appartenance aux risques psychosociaux contre lesquels l'employeur a l'obligation de prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des collaborateurs. Mais sous ce terme générique qu'est "employeur", on oublie trop souvent qu'il concerne également les managers.
Une responsabilité légale encore trop souvent méconnue
Face aux agissements inappropriés, les managers peuvent être facteurs de protection mais également de risque. Figure de prévention, ils doivent faire preuve d'exemplarité dans leurs propres attitudes et comportements, donnant ainsi le ton à l'environnement de travail et aux relations inter-individuelles au sein de leur équipes.
Leur rôle est également crucial dans la détection des violences au travail : au contact direct du terrain, les managers doivent faire preuve de vigilance pour repérer les signaux faibles d'une souffrance au travail chez l'un des membres de l'équipe par exemple, pour recadrer sans délai d'éventuels écarts de comportement ou encore remonter les situations problématiques aux personnes à même de les traiter (direction des ressources humaines, référent harcèlement sexuel et agissements sexistes ou tout autre dispositif d'écoute et de signalement mis en place par l'entreprise).
Mais les managers peuvent parallèlement être facteurs de risque, quand leurs propres attitudes et comportements, ou leur passivité face à des agissements inappropriés, laissent planer un climat d'impunité en la matière. Sans compter bien sûr qu'aux yeux de la loi, l'ascendance hiérarchique est une circonstance aggravante en cas de harcèlement (moral et/ou sexuel), exposant l'auteur à des sanctions plus lourdes.
Enfin, en tant que représentant de la direction de l'entreprise, les managers peuvent voir leur responsabilité directement engagée. La jurisprudence a déjà montré la voie de sanctions disciplinaires à l'encontre de managers n'ayant pas agi/réagi face à des comportements inappropriés qui leur étaient pourtant connus.
Un vrai besoin d'accompagnement
Depuis la loi du 1er janvier 2019 qui impose à tout Comité Social et Économique de désigner parmi ses membres un référent harcèlement sexuel et agissements sexistes (et à toute entreprise d'au moins 250 salariés à désigner de son côté une référent employeur), les entreprises forment aussi en internepour la la prévention des violences sexistes et sexuelles. Et c'est une vraie avancée ! Au même titre que la mise en place de procédures formalisées, de dispositifs d'écoute et de signalement ou encore la réalisation d'enquêtes internes ou externalisées.
Mais la ligne managériale, pourtant responsable aux yeux de la loi et en première ligne des violences au travail, reste encore trop souvent la grande oubliée de ces vastes programmes de prévention.
Les managers méconnaissent encore souvent le cadre légal, éprouvent logiquement des difficultés à se repérer dans la palette protéiforme des agissements inappropriés, ne savent pas toujours quelle est la juste posture à adopter face aux écarts de comportements, éprouvent des craintes d'en faire trop ou pas assez au risque de voir leur légitimité managériale remise en question par leurs équipes.
Pour être en mesure de repérer, prévenir et (ré)agir face aux violences au travail, ces managers ont besoin d'apprendre mais aussi, et surtout, d'échanger, d'interagir, de s'entraîner à travers des mises en situation au plus près de leur réalité terrain.
Discerner soi-même et poser les limites à l'équipe entre ce qui est acceptable dans la sphère professionnelle et ce qui ne l'est pas,
détecter les signaux faibles afin de pouvoir réagir suffisamment tôt, recadrer, maîtriser l'écoute empathique pour accueillir la parole... Autant de clés pratiques dont il faut doter les managers si l'on veut en faire des remparts efficaces aux écarts de comportement
Une politique efficace de prévention des agissements inappropriés s'appuie sur au moins trois piliers :
· Un portage politique fort et volontariste au plus haut niveau
· La mise en place des procédures claires et communiquées (dispositif d'écoute et de signalement, cartographie des parties prenantes à contacter...)
· Mais aussi : la sensibilisation des managers, qui sont les plus à même de relayer sur le terrain cet engagement de l'entreprise.
Pour en savoir plus
Leslie Chaffot a démarré sa carrière dans le marketing stratégique avant d'évoluer vers les Ressources Humaines. En tant que Senior Manager et coach professionnelle certifiée chez Equilibres, elle accompagne les organisations dans la conception et la mise en oeuvre de leur politique d'inclusion, de lutte contre les stéréotypes, les discriminations et les violences sexistes et sexuelles.
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