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Guerre commerciale de Trump : où en sont les entreprises françaises ?

Les incertitudes liées aux hausses des droits de douane américains et la situation de trésorerie sous pression dans certains secteurs restent des défis majeurs pour les dirigeants français actuellement. Croissance, tendances, inquiétudes, où en sont les entreprises françaises ?

Publié par Christina DIEGO le | Mis à jour le
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Guerre commerciale de Trump : où en sont les entreprises françaises ?

La guerre commerciale initiée par Donald Trump risque d'avoir un impact significatif sur l'économie française. Selon les dernières prévisions de l'Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE), la croissance du PIB pourrait être limitée à 0,5 % en 2025, contre une estimation précédente de 0,8 % formulée en octobre. Cette dégradation du contexte économique pourrait entraîner la suppression de 110 000 emplois au cours de l'année, et une remontée du taux de chômage à 7,9 % de la population active d'ici la fin de l'année. L'Observatoire estime que l'augmentation de 10 % des droits de douane sur une période de deux ans aurait un impact direct de 0,13 point de PIB, réparti en 0,05 point pour 2025 - compte tenu de la mise en oeuvre en cours d'année - et 0,08 point pour 2026.

Par ailleurs, les barrières douanières instaurées par les États-Unis n'expliquent pas à elles seules la baisse de la croissance anticipée par l'Observatoire. Comme l'explique Mathieu Plane, directeur adjoint du département Analyse et Prévision de OFCE : « La révision à la baisse de la croissance s'explique principalement par un niveau d'incertitude élevé, tant sur le plan national qu'international, marqué par le retour des tensions géopolitiques depuis l'élection de Trump. » Si les droits de douane américains augmentent plus fortement, la croissance sera plus basse, analyse l'expert.

De son côté, la Banque de France a publié son enquête mensuelle de conjoncture, ce mardi 8 avril, réalisée auprès de 8 500 entreprises ou établissements entre le 27 mars et le 3 avril 2025, juste avant les annonces du président Trump. Elle révèle des tendances contrastées dans les différents secteurs économiques.

Aéronautique et automobile, moteurs de croissance

En mars, l'activité a progressé dans l'industrie et les services marchands, tandis que le secteur du bâtiment a peu évolué. Cette tendance est particulièrement notable dans l'industrie, où l'activité a progressé pour le troisième mois consécutif, dépassant la moyenne de long terme. Les secteurs de l'aéronautique et de l'automobile ont été les principaux moteurs de cette croissance.

Dans le bâtiment, l'activité a progressé très légèrement, principalement dans le gros oeuvre, tandis que le second oeuvre a montré des signes de ralentissement. Les chefs d'entreprise du gros oeuvre ont noté un léger frémissement de la demande pour les maisons individuelles, en lien avec la baisse des taux d'intérêt et la reconduite du dispositif prêt à taux zéro (PTZ).

En avril, un ralentissement attendu

Pour avril, les anticipations des entreprises indiquent une hausse de l'activité dans l'industrie, mais à un rythme plus ralenti qu'en mars. Cette tendance est principalement due aux incertitudes liées aux hausses des droits de douane américains. Les secteurs de l'aéronautique et de l'automobile devraient continuer à progresser, tandis que les produits informatiques-électroniques-optiques et les produits en caoutchouc ou plastique pourraient reculer.

Une trésorerie sous pression

Le solde d'opinion sur la situation de trésorerie dans l'industrie est légèrement négatif, principalement en raison de l'allongement des délais de paiement et des difficultés à répercuter les hausses des prix des matières premières. Les stocks de produits finis sont jugés en très légère baisse par rapport à février, avec des réductions notables dans les secteurs de l'aéronautique, des machines et équipements, et de l'agroalimentaire. Dans les services marchands, le solde d'opinion sur la situation de trésorerie se tasse un peu mais reste légèrement positif. La situation est jugée satisfaisante dans l'édition et la location automobile, mais dégradée dans la publicité, l'hébergement-restauration, et la réparation automobile.

L'incertitude repart à la hausse

L'indicateur d'incertitude, construit à partir des commentaires des entreprises interrogées, remonte très légèrement ce mois-ci dans les trois secteurs. Les chefs d'entreprise mettent en avant le manque de visibilité induit par le contexte national et international, notamment les hausses des droits de douane américains.

Malgré les perturbations économiques mondiales engendrées par la hausse des droits de douane décidée par Donald Trump, le gouvernement reste déterminé à tenir le cap. Lors d'un échange ce lundi avec l'Association des journalistes économiques et financiers (Ajef), Amélie de Montchalin, ministre chargée des Comptes publics, a réaffirmé l'objectif inscrit dans la loi de finances de ramener le déficit public à 5,4 % du PIB en 2025.

« Il faut attendre de voir, dans les semaines qui viennent, comment la négociation qui s'engage avec les Etats-Unis d'Amérique peut aboutir à un accord, avec un désarmement des mesures qui ont été engagées, a déclaré le ministre de l'Economie Eric Lombard sur RMC et BFMTV vendredi 4 avril dernier. On peut encore avoir une année de croissance, certes modérée mais positive. »

[Dernière minute, à l'issue du Conseil des ministres, ce mercredi 9 avril, la porte-parole du gouvernement, Sophie Primas a fait savoir que « 28 000 entreprises" françaises sont "touchées par les droits de douane" américains. "Nous sommes dans une position d'inventaire. Nous ne sommes pas capables de dire quel sera l'impact sur la croissance et sur les entreprises » , a-t-elle précisé.]

Riposte de l'Europe à 25 %

Les États membres de l'Union européenne s'apprêtent à voter ce mercredi 9 avril l'instauration de droits de douane à hauteur de 25 % sur un volume de 22 milliards d'euros de produits importés des États-Unis, en réponse aux taxes imposées par Washington sur l'acier et l'aluminium. Cette mesure de rétorsion vise un éventail diversifié de marchandises américaines : volailles, jus d'orange, riz, tabac, soja, aluminium, acier, bateaux de plaisance, motos, diamants, cosmétiques, vêtements, etc.

Au cours des derniers mois, l'Union européenne a été frappée à trois reprises par des droits de douane de l'administration du président américain : 25% sur l'acier et l'aluminium, mi-mars ; 25% sur les automobiles, début avril ; 20% sur tous les autres produits européens, le 9 avril

[MISE A JOUR JEUDI 10 AVRIL]

Après un mercredi 9 avril où la surenchère a été de mise d'heure en heure entre les annonces des présidents américain et chinois, Donald Trump a finalement annoncé vers 21h heure locale en France, une augmentation immédiate des droits de douane sur les importations en provenance de Chine à 125 %, justifiant cette décision par « le manque de respect » de Pékin envers les règles des marchés mondiaux.

Dans le même message, Trump précise que, face à l'appel de plus de 75 pays sollicitant des discussions, et en l'absence de toute mesure de représailles à l'encontre des États-Unis, il a décidé d'instaurer une trêve de 90 jours, accompagnée de droits de douane réduits à 10 % pendant cette période, aux autres pays.

Autrement dit, les tarifs douaniers décidés la semaine dernière - et appliqués de manière uniforme à la quasi-totalité des partenaires commerciaux - restent en vigueur. En revanche, les nouveaux droits différenciés, introduits ce mercredi matin et calculés selon le poids du déficit bilatéral des États-Unis avec chaque pays, sont suspendus temporairement pour trois mois. Pour le moment. Va-t-il tenir cette annonce ou revenir dessus et décréter encore autre chose ?

Reste à savoir si cette guerre commerciale instaurer par Trump, qui ressemble plus d'ailleurs à l'incarnation même de la loi du Talion « oeil pour oeil, dent pour dent », profitera à l'économie américaine et verra se matérialiser le fameux mantra America First promis par D. Trump à son électorat lors de sa campagne présidentielle...

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