Pourquoi le PLF 2021 va contenter les entreprises
Pour rendre les sociétés plus compétitives, le projet de loi de finances pour 2021 prévoit une diminution de l'IS et une baisse des taxes sur le chiffre d'affaires et la valeur ajoutée des entreprises. Bercy souhaite par ailleurs gonfler les aides pour les structures durement touchées par la crise.
En dépit de la crise sanitaire, le gouvernement poursuit sa stratégie de baisse de la pression fiscale en faveur des entreprises. Le projet de loi de finances pour 2021 présenté en Conseil des ministres lundi 28 septembre 2020 ne modifie pas la trajectoire de diminution du taux d'IS, déjà engagée par la précédente loi de finances. Les entreprises devraient donc voir leur taux d'impôt sur les sociétés converger vers 25 % en 2022, avec une étape intermédiaire en 2021 de 28 à 26,5% pour les entreprises réalisant moins de 250 millions euros de chiffre d'affaires, et 27,5% pour les plus grandes sociétés.
Des compensations liées au Covid-19
Afin de tenir compte de l'évolution de la crise, un quatrième projet de loi de Finances rectificatif pour 2020 a été présenté mercredi 4 novembre en conseil des ministres.
Il est tout d'abord question d'abonder le fonds de solidarité dont les critères d'éligibilité ont été élargis. Toutes les entreprises de moins de 50 salariés fermées administrativement pourront recevoir une indemnisation allant jusqu'à 10 000 euros peu importe leur secteur d'activité ou leur situation géographique. Les entreprises de moins de 50 collaborateurs des secteurs du tourisme, de l'événementiel, de la culture, du sport et des secteurs liés qui restent ouvertes mais qui subissent une perte de chiffre d'affaires d'au moins 50%, bénéficieront également de cette indemnisation mensuelle allant jusqu'à 10 000 €. Le fonds de solidarité est ainsi augmenté de 10,9 milliards d'euros, en plus des 8,5 milliards déjà programmés.
Toutes les structures fermées administrativement vont bénéficier de nouvelles exonérations de cotisations sociales, tout comme les entreprises des secteurs de la culture, du sport, du tourisme et de l'événementiel qui auraient perdu 50% de leur chiffre d'affaires, soit un coût supplémentaire de 3 milliards d'euros, conduisant à un total d'exonérations de 8,2 Md€, compensées par l'Etat. L'activité partielle est par ailleurs prolongée jusqu'à la fin de l'année, avec une nouvelle enveloppe de 3,2 milliards d'euros partagée entre l'Etat et l'Unedic.
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En plus de la baisse de l'IS, deux nouveautés pourraient prendre effet sur le budget 2021. " Le PLF prévoit une diminution de la contribution économique territoriale (CET), qui va surtout profiter aux entreprises industrielles. Cette taxe comprend la CVAE assis sur la valeur ajoutée, dont le taux serait divisé par deux et qui passerait de 1,5% à 0,75% pour les sociétés qui font plus de 50 millions d'euros de chiffre d'affaires, et la CFE assis sur l'immobilier. Il est annoncé une réforme pour moderniser cet impôt sans toutefois préciser le montant de la baisse, dont certains évoquent 50% ", confie Philippe Hupé, expert-comptable et commissaire aux comptes au sein du réseau Walter France.
Améliorer la trésorerie des entreprises
Pour aider les dirigeants à reconstituer leur trésorerie, le gouvernement souhaite également rétablir deux dispositifs.
Le premier : l'étalement de la plus-value de cession d'un immeuble dans le cadre d'une opération de cession-bail. " Une entreprise propriétaire d'un immeuble déjà amorti qui a une plus-value latente va pouvoir retrouver des liquidités à court terme en cédant son immeuble à une société de crédit-bail. Par exemple, si l'immeuble à l'actif a une valeur nette comptable de 500 000 euros, qu'il a une valeur vénale d'un million d'euros, le dirigeant récupère ainsi immédiatement un million d'euros en trésorerie. En contrepartie, il devra payer un impôt sur la plus-value de 500 000 euros qui sera étalé sur quinze ans ", commente Philippe Hupé.
Le second : la réévaluation libre. Cet outil permet de réévaluer l'ensemble des actifs en valeur vénale, notamment les immobilisations corporelles et financières, et ainsi d'améliorer la structure financière d'une entreprise. Dans ce cas, l'écart entre la valeur actuelle et la valeur nette comptable n'affecte pas le résultat. Il est indiqué directement dans les capitaux propres. Exemple : un immeuble est inscrit au bilan pour une valeur nette comptable de 100 000 euros. L'immeuble s'étant apprécié dans le temps, celui-ci vaut désormais 200 000 euros. En réalisant une réévaluation de ses actifs, la société portera à son bilan la nouvelle valeur de l'immeuble, ce qui lui permettra d'assainir celui-ci, et de présenter plus de capitaux propres. " Cela pourrait créer un effet de levier auprès des banques. La fiscalité de ce dispositif devrait être également étalée ", renchérit l'expert-comptable.
Stimuler l'embauche des jeunes
Le gouvernement a par ailleurs fait le choix d'intégrer le plan de relance de 100 milliards d'euros dans le PLF. Sont donc inclues dans ce projet de loi de finances les aides en faveur des jeunes. Il est ainsi prévu de soutenir financièrement l'embauche de salariés en alternance via une aide à l'apprentissage et une aide au contrat de professionnalisation, pour la première année, de 5 000 euros pour les mineurs et de 8 000 euros pour les majeurs, pour tout contrat conclu entre le 1er juillet 2020 et le 28 février 2021.
Pour stimuler l'embauche des jeunes de moins de 26 ans, catégorie la plus touchée par la crise sanitaire, un autre dispositif a été créé. L'aide, allant jusqu'à 4 000 euros sur la première année de contrat, est attribuée aux entreprises quels que soient leur taille et leur secteur qui embauchent un jeune collaborateur, en CDI ou CDD de 3 mois et plus pour un salaire jusqu'à 2 fois le SMIC. Elle est octroyée pour les contrats conclus entre le 1er août 2020 et le 31 janvier 2021.
Un budget vert
La transition écologique et la mobilité sont également au coeur de ce budget 2021. Un abaissement du seuil de déclenchement du malus automobile serait à l'étude.
" Depuis des années, le malus va plus vite que le bonus pour les énergies vertes. De nombreuses entreprises seraient prêtes à investir dans des flottes moins polluantes mais l'offre reste insuffisante ", commente Philippe Hupé.
Le projet de loi de finances comprend enfin un grand plan écologique de rénovation des bâtiments, le financement de la stratégie hydrogène, et la décarbonisation de l'industrie. Pour encourager le développement de la part des énergies renouvelables dans la consommation énergétique des entreprises industrielles, l'État souhaite accompagner les investissements de substitution d'une solution chaleur bas-carbone à une solution fossile. À titre d'exemple, un projet de conversion d'une ancienne chaudière au charbon en une installation neuve à partir de biomasse pourra être soutenu à ce titre.
Les discussions sur le projet de loi vont se dérouler à l'Assemblée nationale du 12 au 19 octobre 2020, pour une adoption définitive au plus tard le 18 décembre.
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