Labels : véritables opportunités ? (Partie 2)
Dans le domaine environnemental, les labels pourraient venir pallier certaines insuffisances dans l'application des textes contraignants. Ces solutions sont donc adaptées pour les entreprises proactives. En outre, les exigences de ces labels pourraient préfigurer le futur du droit de l'environnement
En matière environnementale, les deux sujets prégnants sont le changement climatique et la biodiversité comme l'attestent le nombre de réglementations ayant vu le jour depuis quelques années, tels que la Loi Biodiversité, l'Accord de Paris, la Loi Energie-Climat, la Loi Économie circulaire.
Pourtant, en dépit de ce contexte marqué par la multiplication des obligations législatives, l'attractivité de dispositifs non contraignants mais valorisant certaines actions, que nous appellerons " labels ", ne se dément pas : ainsi, la norme ISO 26000 " Responsabilité sociétale " fait l'objet d'un regain d'intérêt depuis la crise sanitaire et l'Etat lui-même s'investit dans la mise en oeuvre du label dit " Bas-Carbone " depuis 2018.
Comment expliquer ce phénomène ? Faut-il considérer les labels comme de simples outils de " greenwashing " au profit des personnes qui s'y soumettent ou, au contraire, les percevoir comme des initiatives bienvenues pour assurer la conduite d'actions complémentaires pour lutter contre le changement climatique et protéger la biodiversité ?
Une approche volontariste... démontrant l'insuffisance de la règlementation environnementale existante
Le besoin qui s'est fait sentir de créer des référentiels non contraignants tels que la norme ISO 26 000 ou le Label Bas-Carbone témoignent, à notre sens, de certaines insuffisances dont souffre actuellement la législation en matière de " RSE " (Responsabilité sociétale des entreprises) et de compensation, notamment son champ d'application trop restreint ou incertain.
Les insuffisances en matière de RSE
Le champ d'application de la " RSE" reste en effet à ce jour limité même s'il n'est plus réservé aux seules sociétés cotées. S'agissant ainsi de l'obligation d'établissement d'une Déclaration de Performance Extra-Financière issue de la Directive 2014/95/UE , celle-ci s'applique de façon restrictive au regard des seuils imposés (définis à l'article R 225-104 du Code de commerce) . En outre, le législateur français a restreint son champ d'application en le limitant aux sociétés anonymes à l'occasion de la transposition de la Directive 2014/95/UE dans le droit français. Les SARL et les SAS sont ainsi exclues du dispositif alors même que, d'après l'INSEE, rien que pour les SAS, celles-ci représentaient 61 % des créations de sociétés en 2017. .
Quant à l'obligation générale faite à toutes les sociétés de prendre en considération " les enjeux sociaux et environnementaux ", inscrite à l'article 1833 du Code civil depuis la Loi Pacte (Loi n° 2019-486 du 22 mai 2019 relative à la croissance et la transformation des entreprises), on ne peut que s'interroger sur sa portée concrète à ce jour.
Toutefois, parce que les démarches environnementales, sont des éléments devenus incontournables dans les critères de choix de référencement, les sociétés hors du champ du dispositif doivent spontanément produire une telle déclaration.
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Les insuffisances en matière de compensation
Quant aux dispositions permettant la compensation des émissions de gaz à effet de serre (GES), les mécanismes obligatoires découlent du Système d'échange de quotas d'émission de l'UE (SEQE), initié à l'échelle de l'Union européenne, lequel est exclusivement opposable aux plus importants émetteurs de ces gaz. Les initiatives prises par des acteurs en dehors de ce cadre ne sont pas valorisables par ce biais.
Ainsi, de nombreuses entités souhaitant entrer dans une démarche volontaire de mise en oeuvre de la "RSE" et/ou de compensation et ne trouvant pas de réglementations soutenant leurs démarches, peuvent désormais se tourner vers des référentiels, tels que ceux présentés ci-dessus.
Les labels : des solutions pour les entreprises dans des démarches proactives
Ce constat nous laisse donc penser que, face au défi d'une mondialisation responsable et à une crise environnementale majeure, à défaut d'accords internationaux contraignants, les entreprises peuvent et doivent devenir des acteurs majeurs du changement au travers d'engagements volontaires individuels, si décriés qu'ils aient pu l'être, en revisitant, leur chaîne de production et d'approvisionnement à l'aune de la protection de l'environnement. La pression des consommateurs semble également porteuse dans la réflexion du législateur. Dans ce contexte, les labels constituent un outil adéquat pour encadrer et crédibiliser les démarches proactives des entreprises qui veulent contribuer par leurs actions à une démarche économiquement responsable pour faire face aux sujets prégnants que sont le changement climatique et la protection de la biodiversité.
Ainsi, plus que de simples opportunités, ces référentiels non contraignants nous semblent préfigurer le futur de la législation sur ces thématiques. Ils permettent en outre de précieuses expérimentations qu'il convient d'encourager.
Pour en savoir plus
Violaine du Pontavice est avocat depuis plus de 20 ans. Elle est responsable national du département droit de l'environnement et des sujets corruption et devoir de vigilance au sein d'EY Société d'Avocats. Elle intervient en conseil avec une équipe pluridisciplinaire auprès des entreprises pour les accompagner sur la mise en oeuvre des obligations en application des règlementations sur l'environnement, la corruption et le devoir de vigilance.
Clémence Levasseur est avocate chez EY Société d'Avocats depuis 2019. Elle intervient sur les problématiques de droit de l'environnement pour le compte de personnes publiques et privées. Elle a également acquis de l'expérience sur les questions de compensation carbone (Label " Bas-Carbone " et marchés et de quotas carbone).
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