RSE : Éric Lombard annonce la suspension de la directive CS3D
Lors de ses voeux au monde économique le 23 janvier 2025, Éric Lombard, ministre de l'Économie et des Finances, a confirmé son intention de reporter l'application de la directive européenne sur le devoir de vigilance CS3D et de simplifier la CSRD, une nouvelle annonce qui questionne sur l'avenir de la RSE en France, et au niveau européen.
Un report jugé « prioritaire » pour la CS3D
Après la « simplification » de la CSRD annoncé par Stéphane Séjourné il y a une semaine et les réactions en chaîne qui s'en sont suivies, c'est au tour du ministre de 'Economie et des Finances Éric Lombard d'ajouter une pierre au travail de « démantèlement » des directives européennes qui devaient contraindre les entreprise à plus de transparence en matière de durabilité et engagement social à partir de 2025.
Éric Lombard a déclaré devant un parterre d'acteurs économiques : « Il est essentiel de simplifier la CSRD pour les PME et ETI et de reporter l'application de la CS3D tant qu'elle n'est pas adaptée. »
Lire aussi : CSRD : réactions sur « la suppression » du reporting extra-financier évoquée par Stéphane Séjourné
Ce report concerne la directive 2024/1760 sur le devoir de vigilance, adoptée en juin 2024, qui impose aux entreprises de plus de 1 000 salariés (et générant plus de 450 millions d'euros de chiffre d'affaires) de s'assurer que leurs activités, de la production à la distribution, respectent les normes environnementales et les droits humains.
Ce texte devait initialement être transposé en droit français d'ici au 26 juillet 2025, mais le ministre a indiqué qu'il souhaitait repousser cette échéance pour éviter d'accroître la pression sur les entreprises.
« Les ministres européens sont unanimes pour suspendre la CS3D tant qu'elle n'est pas simplifiée », a-t-il ajouté.
CSRD : une simplification pour les PME et ETI
La directive CSRD, qui prévoit une montée en puissance des obligations de reporting extra-financier de 2025 à 2029, pourrait également être freinée. Éric Lombard a souligné :
« Ces exigences freinent la croissance des entreprises et risquent de provoquer des délocalisations. »
La simplification de la CSRD viserait à alléger les obligations pour les petites et moyennes entreprises, permettant ainsi de réduire leur charge administrative dans un contexte économique incertain.
Un budget en faveur de la croissance verte
Bien que critique des contraintes imposées par les textes européens, Éric Lombard a affirmé son engagement pour une transition écologique raisonnée. Parmi les mesures annoncées :
- Un budget de 1,6 milliard d'euros dédié à la décarbonation de l'industrie dans le projet de loi de finances 2026.
- Le maintien du leasing pour les véhicules électriques, du bonus écologique, et une augmentation de la taxe sur les billets d'avion.
Le ministre prône une politique de croissance verte, conciliant compétitivité économique et durabilité.
Un débat qui divise
Les annonces du ministre s'inscrivent dans une série de déclarations polémiques. Michel Barnier, ancien Premier ministre, avait proposé « un moratoire sur la CSRD », de son côté Stéphane Séjourné, commissaire européen, avait évoqué la suppression du reporting extra-financier, avant de nuancer ses propos lundi 20 janvier.
Les critiques pointent le risque d'un recul de la France sur les engagements climatiques et sociaux, alors que la directive CS3D est perçue comme un levier pour responsabiliser les entreprises.
Cependant, Éric Lombard a insisté : « La transition écologique est une nécessité, mais elle doit être compatible avec la compétitivité et l'emploi. »
Le ministre prévoit de soumettre à l'Assemblée nationale un projet de loi de simplification de la vie économique, poursuivant les travaux initiés par Bruno Le Maire. L'objectif est de réduire les obstacles réglementaires tout en intégrant des mesures pour stimuler une économie durable.
Volte-face en matière de RSE ?
Les annonces d'Éric Lombard marquent un tournant dans la politique française sur la RSE. Entre le report de la CS3D, la simplification de la CSRD et un budget orienté vers la décarbonation, le gouvernement semble privilégier une approche pragmatique face aux défis écologiques et économiques. Toutefois, ces décisions risquent d'alimenter les débats sur la balance entre compétitivité économique et ambition climatique.
La date du 26 février, qui prévoit l'examen de la législation « omnibus » sur la CSRD à l'initiative la présidente de Commission européenne Ursula von der Leyen, est non seulement très attendue par le monde la RSE, mais devrait être plus décisive que jamais.
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