2010 - 2020 : quels changements pour la formation professionnelle ?
Entre nouveaux usages, modes de consommation et réformes en tout genre, la filière de formation professionnelle a subi de nombreux changements en 10 ans. Quels sont ceux qui ont le plus marqué la décennie ? Ces modifications ont-elles eu un impact sur le nombre de personnes formées ?
Les dix dernières années de formation professionnelle ont vu se développer une multitude d'outils, de méthodes et de technologies au service de l'apprentissage. Au-delà de l'intérêt porté aux contenus, les entreprises du secteur se sont intéressées durant cette décennie aux contenants de l'apprentissage.
De la salle de formation augmentée au smartphone
Que ce soit en présentiel ou en distanciel, les formats d'apprentissage ont beaucoup évolué. Les modes participatifs en salle ont fait émerger de nouveaux outils du type Klaxoon avec ses post-it digitaux qui donnent la parole au plus timide des auditoires. Ou encore l'émergence des formats interactifs du type hackathon, workshop, escape game. Le secteur de la formation professionnelle a rapidement compris que si le contenu était important, c'était bien le contenant qui le valorisait et permettait à l'apprenant de bien assimiler la connaissance.
En matière d'usages, ces dernières années ont connu le boom de l'utilisation du téléphone portable à travers toutes les applications qui au fur et à mesure se sont misent à gérer tous les pans de notre vie. La formation professionnelle n'a pas été épargnée ! Entre ces nouvelles habitudes et notre capacité de concentration qui a fortement diminuée au cours des années, les modèles de mobile learning sous format court et interactif ont pris de l'ampleur.
Massive et personnalisée : ce que l'on retiendra de cette décennie
L'expérience utilisateur est entrée au coeur de nombreux services que nous utilisons quotidiennement et qui ont un impact direct sur la formation professionnelle, avec l'arrivée de nouveaux acteurs maîtrisant les concepts du digital. C'est pourquoi il faut notamment retenir de ces 10 dernières années :
Une formation massive :
L'arrivée des Mooc dans les années 2000 a mis du temps à atteindre notre continent. En France, ce n'est réellement qu'à partir de 2010 que nous avons vu émerger les premières plateformes 100% Mooc en libre-service avec notamment Openclassroom ou encore Fun. Le Mooc a su conquérir le monde de la formation par son format autonome, complet et communautaire. Pour autant, les limites se sont très rapidement révélées ! L'apprentissage en ligne de manière autonome souffre d'un taux de rétention de l'apprenant très faible : en 2013 on parlait de près de 80% de taux d'abandon. L'expérience utilisateur au coeur de ces processus était à revoir pour permettre à l'apprenant d'aller au bout de son parcours.
Une formation personnalisée :
La personnalisation, que la formation se fasse en présentiel ou en ligne, devient un enjeu majeur. Les récentes recherches en sciences cognitives nous le montrent bien : personne n'apprend de la même manière. En présentiel, cela se matérialise par des formats plus interactifs et participatifs, ce qui permet au formateur de mieux s'adapter à chacun. En ligne, c'est à travers le développement d'algorithmes ou encore de questionnaires de positionnement que la personnalisation se joue : selon nos réponses, nos comportements, notre point de départ, les parcours proposées ne seront pas le même que ceux de notre voisin.
La personnalisation aurait pu être l'un des moyens pour répondre au taux de décrochage engendré par les Mooc par exemple. Malgré les nombreuses innovations dans le domaine, la filière peine encore 10 ans après à attirer et retenir les apprenants avec seulement 35% de Français qui se forment réellement contre 93% qui disent vouloir se former. C'est à se demander si ces innovations sont plus le reflet d'une gadgétisation de l'appareil de formation plutôt que de réelles avancées pédagogiques.
D'un coût pour les entreprises à un investissement et une responsabilisation individuelle
La France est souvent perçue comme le pays des réformes et le secteur de la formation n'en est pas exempté. Au cours des 10 dernières années, nous avons connu 4 grandes réformes autour de la formation. Chacune nous amenant à repenser la place, le financement et les canaux de distribution de la formation. La dernière en date change complètement le paradigme de la formation redonnant du pouvoir aux collaborateurs des entreprises grâce à un CPF clé en main et une offre de service à portée de clic.
La formation professionnelle s'est toujours transformée au grès des changements externes auxquels elle faisait face ; qu'ils soient technologiques, d'usages ou encore étatiques. La question que l'on se pose alors est : en quoi la récente réforme changera nos modes de consommation de la formation. Ce qui est sûr, c'est que les entreprises et les organismes de formation ont encore beaucoup de chemin à faire quant à la compréhension des mécanismes d'apprentissage et la mise en place de parcours réellement impactants pour l'apprenant.
Pour conclure
Enfin, si nous devions retenir un changement essentiel de cette dernière décennie, c'est bien le passage du tout digital vers le format blended (mix pédagogique qui allie présentiel et digital). Beaucoup d'acteurs sont dorénavant convaincus que la formation présentielle ne s'oppose pas à celle en digitale, elle en est l'élément complémentaire.
Il reste encore beaucoup à réinventer dans ce secteur, comme par exemple la place du formateur qui fait débat et pour qui la transformation des pratiques devient un enjeu crucial dans les prochaines années.
Pour en savoir plus
Sarah Nafaa, experte Edtech et Soft Skills chez Groupe Bizness.
Après avoir créé son entreprise au service de la formation et avoir étudié les mécaniques liées aux comportements d'apprentissage, elle oeuvre à la création et au développement des entités Onvaseformer et Teachers du Groupe Bizness.
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