Loi handicap et accessibilité : comment s'y préparer ?
La loi du 11 février 2005 impose une obligation d'accessibilité pour les personnes handicapées à compter du 1er janvier 2015. Cette obligation concerne les ERP (Établissement recevant du public), qui sont constitués par tout bâtiment, local, ou enceinte accueillant des clients ou utilisateurs autres que les employés dudit bâtiment. L'obligation d'accessibilité aux personnes à mobilité réduite touche donc un grand nombre de bâtiments, dont les bureaux et les usines, dès lors qu'ils sont susceptibles d'accueillir du public (à noter, toutefois, que les stocks n'entrent a priori pas dans le champ d'application de la loi). Le texte prévoit néanmoins des dérogations. Celles-ci peuvent être accordées en raison notamment d'impossibilités techniques ou bien encore de contraintes liées à la conservation du patrimoine architectural.
Ad'Ap : la préfecture doit se prononcer sous quatre mois
La loi s'applique non seulement aux bâtiments existants, mais également lors de toute rénovation. De même, tout bâtiment neuf et construction nouvelle doivent respecter l'obligation d'accessibilité. À un an de l'échéance, de nombreux bâtiments publics ou privés ne sont pas encore conformes à la législation.
Face à ce constat, le gouvernement a redéfini les modalités de mise en oeuvre de cette loi en créant les Agendas d'accessibilité programmée (Ad'AP), permettant aux acteurs publics et privés de s'engager sur un calendrier précis et resserré de travaux de mise en conformité. À cet effet, une ordonnance doit être adoptée par le gouvernement d'ici à l'été.
Pour les ERP relevant d'une entité privée, c'est l'exploitant et/ou le propriétaire du bâtiment qui signe et dépose l'Ad'AP pour la part des travaux qui relève de sa responsabilité. Il est présenté un descriptif du bâtiment et le phasage des travaux de financement. Sont également intégrées les demandes de dérogation si nécessaire. L'Ad'AP est transmis à la mairie et au préfet. Le dossier reçu par le préfet donne lieu à une décision dans un délai de quatre mois.
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Si l'engagement est pris avant la fin 2014, le risque de sanction pénale prévue pour défaut d'accessibilité sera suspendu. Selon la catégorie de l'ERP, cet agenda pourra prévoir un délai supplémentaire allant de trois à neuf ans. Ces Ad'AP sont toutefois une exception et la date butoir initialement prévue, le 1er janvier 2015, n'est pas repoussée.
Diagnostic d'accessibilité et audit technique
Par conséquent, les entreprises qui ne feront pas la démarche d'un Ad'AP avant fin 2014 resteront soumises aux sanctions prévues par la loi du 11 février 2005. Le texte prévoit tout d'abord des mesures de contrôles pour les constructions en cours et des vérifications. Puis, ce droit de visite et de communication des documents techniques peut être exercé après l'achèvement des travaux, pendant trois ans. Par ailleurs, une amende de 45 000 euros pour les personnes physiques et de 225 000 euros pour les personnes morales est prévue à l'encontre d'un public large : utilisateur des sols, bénéficiaire des travaux, architecte ou toute personne responsable de l'exécution, dans la mesure où ils méconnaîtraient les dispositions relatives à l'accessibilité des personnes handicapées.
À noter
Deux dates sont importantes à retenir :
-Si l'ERP est en conformité avec la norme d'accessibilité : une attestation de conformité accompagnée des justificatifs doit être déposée au plus tard le 1er mars 2015
-Si l'ERP n'est pas en conformité avec la norme d'accessibilité : un dossier d'AdAP contenant le dossier de travaux et/ou la demande de dérogation doit être déposé avant le 27.09.2015 (au lieu du 31.12.2014 initialement).
Plus de détails vous seront communiqués dans un prochain article
Pour les travaux non réalisés, il est prévu une sanction financière s'élevant à un montant représentant 5 à 20 % des travaux non réalisés, modulés suivant l'analyse des raisons objectives du retard. Le montant de cette sanction sera plafonné. Compte tenu du contexte économique et budgétaire, les Ad'AP sont les bienvenues car elles permettent des objectifs de mise en conformité plus réalistes. Étant donné la complexité de la réglementation applicable et des travaux à réaliser, il est fortement conseillé d'étudier dès à présent la faisabilité de cette mise aux normes. Un diagnostic d'accessibilité, un audit technique et juridique, des conseils auprès d'architectes ou tout autre professionnel se révèlent alors nécessaires.
Lors de la négociation ou renégociation des baux commerciaux, il est donc important d'aborder expressément la question de la prise en charge de cette obligation. Il est en effet possible de répercuter ces travaux au locataire. Par ailleurs, une clause trop vague et/ou mal rédigée pourrait conduire ledit locataire à avoir à sa charge tout ou partie de cette mise aux normes. Dans le cadre des baux en cours, locataire et bailleur peuvent également se rapprocher et trouver une solution négociée quant à cette prise en charge.
L'expert :
Kim Linard est avocate associée en charge du département immobilier au cabinet GGV. Présent à Francfort, Hambourg et Paris, le cabinet GGV accompagne les entreprises franco-allemandes en matière juridique et fiscale des deux côtés du Rhin. À Paris, l'équipe compte une vingtaine d'avocats français et allemands intervenant, en conseil comme en contentieux, dans les domaines du corporate-M&A, de la fiscalité, de l'immobilier, du droit social, de la distribution et de la concurrence.
Pour aller plus loin
Le rôle de l'architecte
La mise en conformité d'une construction existante nécessite de diagnostiquer son accessibilité, de la concevoir pour obtenir les autorisations et de réaliser les travaux afin d'obtenir une attestation de respects des règles d'accessibilité et de sécurité. Le recours à un architecte permet d'assurer l'ensemble des démarches administratives, de conception, de réalisations des travaux et de leur contrôle, sans multiplier le nombre d'intervenants sur le dossier. L'architecte garantit aussi la cohérence du projet, de son économie et de sa durée au regard des impératifs de son client.
Le maître d'oeuvre est tenu au devoir de conseil. Il est donc la personne qui, après avoir posé son diagnostic, peut accompagner le Daf sur les démarches administratives, la nature des travaux à effectuer en fonction des types d'ERP et des caractéristiques du bâti, et sur le budget de son client. Intervenir sur du bâti existant est complexe, mais des dérogations sont possibles, notamment concernant des contraintes liées à la présence d'éléments participant à la solidité du bâtiment, des contraintes d'impossibilité technique, de celles liées à la protection du patrimoine architectural, urbain et paysager, ou encore des conséquences excessives sur l'activité de l'établissement lors des travaux de mise aux normes.
En outre, la mise en conformité nécessite, parfois, l'obtention d'un permis de construire pour lequel le recours à un architecte est obligatoire pour une personne morale, quelle que soit la surface de plancher de la construction.
Par Alexandre Zeiger, architecte DPLG+
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