[Tribune] Report de la facturation électronique : un répit aussi attendu qu'indispensable
Les raisons du report de la réforme sur l'obligation de la facture électronique semblent provenir d'un constat : entreprises et administration avaient encore un long chemin à parcourir pour tenir les délais, alors même que la France se positionne en leader européen du schéma en Y. Explications.
L'annonce récente du report de la mise en application de la loi Finance qui rend la facturation électronique progressivement obligatoire pour les entreprises françaises, n'a pas vraiment étonné les observateurs économiques. Initialement prévue pour entrer en vigueur à partir du 1er juillet 2024, cette obligation a été repoussée à une date ultérieure - pour l'instant non précisée - par le ministère de l'Économie et des Finances.
Un manque de préparation palpable
Au moment de prendre la décision de reporter l'entrée en vigueur de la facturation électronique obligatoire, ce chiffre a dû trotter dans la tête des décideurs politiques : seules 7,5% des TPE/PME françaises (1) s'estimaient prêtes pour la facturation électronique. Un chiffre inquiétant qui illustre le manque de préparation de l'économie française face à cette mutation majeure.
Mais si les entreprises ont probablement sous-estimé l'ampleur des transformations à mettre en oeuvre, elles ne sont pas les seules à avoir mal anticipé la mise en application. Parallèlement au report de l'application de la loi, l'État a décalé la mise à disposition de son portail public au mois de décembre 2023. Cela diffère d'autant les tests d'interopérabilité avec les plateformes privées de dématérialisation et donc leur immatriculation.
Or, les chambres de commerce françaises sont plusieurs à estimer qu'il faut aux entreprises 12 à 18 mois pour se mettre en conformité avec cette réforme. Le calendrier initial n'aurait laissé que 6 mois aux entreprises pour s'adapter, ce qui n'était clairement pas réaliste !
La France : un positionnement de leader en Europe
La mise en application de l'obligation de facturation électronique a donc pris un peu de retard en France. Qu'en est-il chez ses voisins ? L'Italie a déjà franchi le cap depuis 2019 et les pays scandinaves sont particulièrement avancés en matière de développement de la facturation électronique. L'Allemagne et la Belgique votent actuellement les décrets officiels. D'autres pays, comme l'Espagne, sont en train de construire leur projet de loi.
La France se distingue de ses voisins en proposant, en plus du portail public de facturation, une alternative par le biais des plateformes de dématérialisation partenaires. Ce schéma - dit « en Y » - semble plus sécuritaire et plus approprié aux problématiques de nombreuses grandes entreprises. En l'instaurant en amont de la date butoir fixée à 2028 par l'Union Européenne (selon la récente initiative VIDA (2)) pour l'uniformisation de la facturation électronique au niveau européen, la France s'impose comme porte-drapeau d'une solution efficace et pérenne. Un délai supplémentaire de mise en place lui permettra de développer ce schéma en Y dans de meilleures conditions.
Un répit de courte durée
Si ce report va permettre aux décideurs et porteurs de projet dans les entreprises de travailler plus sereinement, il ne doit en aucun cas être synonyme d'un ralentissement des efforts. Le nouveau calendrier sera communiqué prochainement et l'échéance européenne de 2028 représente une limite ultime pour l'adoption de la facturation électronique par les entreprises françaises.
Les défis sont nombreux et le travail à effectuer de longue haleine. Le passage à la facturation électronique ne peut se faire sans une mise en conformité globale au sein des entreprises (base clients, codes articles...). Les plateformes de dématérialisation candidates à l'immatriculation peuvent être des soutiens de poids pour accompagner les entreprises dans cette étape cruciale. N'oublions pas que plus tôt les entreprises s'empareront du sujet, mieux elles seront armées pour passer en douceur ce cap majeur et tirer profit de tous les avantages offerts par la facturation électronique.
(1) Enquête menée par Markess by Exægis entre avril et mai 2023 via un questionnaire en ligne auprès de 200 décideurs français (directeurs financiers, directeurs de projets, directeurs métiers, etc.)
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