La soutenabilité, planche de salut des start-up
Le contexte économique et géopolitique actuel n'a pas manqué de fragiliser la French Tech, notamment à travers une baisse significative des valorisations et des levées de fonds ces derniers mois. Pour traverser ces épreuves, les start-up doivent renforcer leur pérennité tant sur le plan économique et environnemental qu'au niveau de leur relation avec leurs actionnaires.
En début d'année, les voyants étaient au vert pour l'écosystème des start-up. Les levées de fonds avaient considérablement augmenté, avec près de 5 milliards d'euros pour le premier trimestre, laissant présager une période faste pour la French Tech. Le nombre de licornes, lui aussi, avait progressé. Mais rapidement, l'avenir s'est assombri. En quelques mois, l'augmentation significative des taux d'intérêt, la guerre en Ukraine et une inflation importante sont venues jouer les trouble-fête.
Dans un tel contexte, comment les start-up peuvent-elle faire la différence ? Quelles sont les bonnes pratiques à suivre pour s'inscrire sur le long terme ?
Des levées de fonds raisonnées
Le fait qu'une entreprise ait pu générer des levées de fonds importantes donne aux fondateurs des gages quant au potentiel du projet qu'ils portent. Ils doivent cependant avoir à l'esprit que cela n'est pas l'unique critère de succès et que la croissance n'a plus le même poids dans la décision d'investissement qu'il y a encore quelques mois.
Longtemps, les investisseurs se sont concentrés sur la capacité de croissance d'une start-up. L'heure est à présent à la recherche de l'atteinte de la rentabilité. Concrètement, les investisseurs seront davantage sensibles à l'aptitude d'une start-up à exécuter le plan d'affaires en consommant moins de cash et à atteindre la rentabilité plus rapidement. Cela va sans doute mener à des valorisations et des levées de fonds plus raisonnées mais aussi, il faut l'espérer plus fréquentes. On peut d'ailleurs constater la réussite de certaines sociétés de croissance par la fréquence de leur levée de fonds.
Néanmoins, les levées de fonds conséquentes ne sont pas forcément annonciatrices de la pérennité et de la croissance de l'entreprise sur le long terme. C'est pourquoi elles doivent nécessairement s'accompagner d'une stratégie financière pertinente et de la définition d'objectifs précis et réalistes.
Un engagement fort côté RSE
Après avoir été uniquement envisagée sous un angle financier, la soutenabilité des start-up s'est progressivement étendue à la question environnementale et sociétale.
Alors que la règlementation renforce les obligations relatives à la publication des données extra-financières des entreprises (extension du reporting extra-financier à un nombre plus important d'entreprises), les start-up doivent se positionner comme des acteurs incontournables de la RSE. La disruption ne doit plus être seulement technologique, elle doit également être respectueuse des enjeux environnementaux et sociétaux, d'autant que les investisseurs y sont de plus en plus sensibles pour leur décision d'investissement (au travers de supports dédiés ou de critères qui se précisent avec le temps).
Face à de telles exigences, les fondateurs doivent impérativement accorder une place de choix à la question de la durabilité dans leurs choix stratégiques, la définition de leur modèle d'affaires et de leur modèle industriel ainsi que dans le développement de leurs relations avec les parties prenantes internes comme externes. En un mot, le souci de l'environnement et du bien-être de leur salariés doit aller de pair avec leur développement économique.
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Tisser une relation de confiance avec les investisseurs
La pérennité d'une start-up est, encore plus que par le passé, étroitement liée à l'efficience de sa structure actionnariale. Celle-ci peut en effet poser les bases d'une gouvernance solide qui permettra à l'entreprise de faire face aux aléas mais également, si ses perspectives de développement le permettent, de relever le défi de l'internationalisation.
La structure actionnariale doit être en quête permanente d'un équilibre entre les intérêts de l'entreprise, de ses fondateurs et ceux de ses investisseurs, équilibre qui se construit à partir d'une relation de confiance entre les intéressés. Pour ce faire, la start-up doit, avec le concours des actionnaires, mettre en place un reporting comprenant des indicateurs de performance adaptés au secteur d'activité de l'entreprise et au besoin de démonstration des progrès réalisés et de la valeur créée. Une fois que la confiance est durablement établie, les investisseurs peuvent nourrir les dirigeants de leurs expériences passées et des investissements qu'ils ont pu réaliser au sein d'autres structures et participer à des tours de financement ultérieurs.
Certes, les investisseurs sont plus frileux qu'il y a quelques mois. Mais gardons en mémoire que la French Tech a, dès ses débuts, su composer avec des moyens financiers parfois limités. Ce qui n'a pas freiné son développement, loin s'en faut. Le génie français de la Tech a sans aucun doute encore de beaux jours devant lui.
Pour en savoir plus
Jean-Pierre Valensi, qui est associé KPMG France et responsable Capital Market Advisory. Il accompagne de nombreux émetteurs dans la gestion de leurs enjeux de communication et d'informations financières, de production d'informations réglementées et de relations avec les investisseurs et les autorités de marché. Il anime des programmes de formation et de coaching des dirigeants, des directions financières et des membres de la gouvernance.
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