L'employeur peut consulter les SMS échangés par un de ses salariés avec son téléphone professionnel
Le caractère professionnel des échanges initiés avec les outils mis par l'employeur à la disposition du salarié a été récemment réaffirmé, concernant les téléphones portables. Seule exception: en cas de mention "personnel", peu fréquent dans les sms...
Dans son arrêt rendu le 10 février 2015 (Cass. Com., 10 févr. 2015 n°13-14.779), la chambre commerciale de la Cour de cassation a réaffirmé la présomption du caractère professionnel des échanges initiés avec les outils mis par l'employeur à la disposition du salarié, plus précisément elle réaffirme ce principe dans une espèce où l'outil mis par l'employeur à la disposition du salarié était un SMS (Short Message Service) échangé à partir du téléphone portable professionnel, propriété de l'employeur.
L'employeur peut donc librement consulter les SMS échangés par un de ses salariés avec son téléphone professionnel sauf s'ils ont été identifiés comme personnels.
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Cette décision n'est que le prolongement des précédentes décisions de la Cour de Cassation* mais mérite d'être saluée compte tenu du fait qu'il est en principe peu courant de faire mention du terme " personnel " dans un SMS. En pratique cette décision de la Cour de Cassation revient donc à faire du SMS et par voie de conséquence du téléphone portable un outil que l'employeur pourra très facilement contrôler. En effet, il est d'usage et donc beaucoup plus fréquent de préciser l'objet d'un mail en indiquant notamment " personnel " que pour des SMS.
Et si le règlement intérieur interdit l'utilisation à des fins personnelles
Au-delà de cette décision et de ses conséquences pratiques, il convient de ne pas négliger l'impact du règlement intérieur, s'il existe, dans le traitement et la gestion du contrôle des outils mis par l'employeur à la disposition du salarié. Peu importe que le règlement intérieur, interdise l'utilisation à des fins personnelles du téléphone portable : cette interdiction n'autorisera pas l'employeur à contrôler librement le contenu des SMS dès lors qu'ils seront identifiés comme personnel.
En revanche, et indépendamment de la teneur des SMS échangés, l'employeur pourra sanctionner le salarié s'il découvre que des numéros non professionnels ont été appelés notamment lors du contrôle de la facture détaillée du téléphone de fonction, puisque la jurisprudence reconnaît le droit pour l'employeur d'établir l'abus, par le salarié, du téléphone de l'entreprise à des fins personnelles en produisant les relevés détaillés. A cet égard, il a été jugé que le fait pour un employeur de demander des précisions sur l'utilisation d'une de ses lignes de téléphone n'est pas considéré comme un mode de preuve illicite portant atteinte à la vie privée.
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Par conséquent, et quand le règlement intérieur l'interdit, l'utilisation à des fins personnelles de son téléphone de fonction par le salarié peut justifier son licenciement peu importe que le contenu des échanges ne soient pas portés à la connaissance de l'employeur.
En conclusion, il convient de retenir que le téléphone portable de fonction, même s'il demeure un objet familier du quotidien dont les fonctions peuvent inciter à une utilisation à des fins personnelles demeure un outil professionnel, propriété de l'entreprise qu'il convient de réserver à un usage professionnel. Ce conseil vaut aussi pour les employeurs et le personnel d'encadrement qui doivent conserver à l'esprit que le salarié peut également utiliser les SMS envoyés par l'employeur pour démontrer une pression excessive caractérisant une atteinte à la vie privée ou encore des faits de harcèlement.
* Nota bene : La Cour avait déjà eu l'occasion de se prononcer au sujet de mails échangés à partir de l'ordinateur professionnel mis par l'employeur à la disposition du salarié en retenant qu'ils pouvaient être librement consultés par l'employeur sauf s'ils portaient la mention " personnel ". Dans cette dernière hypothèse ils ne pouvaient être consultés qu'en présence du salarié et ne pouvaient pas être utilisés si leur teneur concernait la vie privée du salarié. Cette limite posée par la haute juridiction trouve son fondement dans le respect de la vie privée (Cass. Soc. 2 oct. 2001 n°99-42.942) et des libertés individuelles. Dans le même sens, la Cour de cassation avait eu l'occasion de transposer ce principe aux fichiers informatiques ainsi qu'aux clefs USB. En savoir plus
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