Fusion Acquisition / La période post-closing : quels enjeux dans un contexte économique tendu ?
Une bonne anticipation des sujets et une gestion post-closing en mode projet sont les maîtres mots d'une intégration réussie, surtout en période de crise. Quels sont ces sujets particuliers ? Comment les gérer efficacement ?
La période de 100 jours qui s'ouvre après le closing d'une opération de M&A est un moment clé, qui permet une bonne intégration de la cible tout en maximisant sa valeur, mais dont l'importance reste souvent sous-estimée. En effet, une fois passée l'excitation autour du " closing ", le succès d'une acquisition dépend pour l'essentiel de la réussite de ce processus d'intégration. Pour cela, il faut avoir anticipé les sujets au moment de la négociation de la documentation contractuelle et les gérer ensuite étroitement pendant les semaines qui suivent afin d'éviter ou de limiter au maximum les sources de coût et mettre en oeuvre les synergies attendues ou espérées, surtout dans un contexte économique difficile.
Anticiper les sujets d'intégration au moment de la négociation de la transaction
La garantie de passif est un sujet habituel de la période post-closing. Source de coûts potentiels pour les cédants comme pour les acquéreurs, elle devient une véritable source d'inquiétude en période de crise ou de difficultés financières. Chacune des parties pourra alors utilement considérer, au moment de la négociation de l'opération, le recours à une assurance garantie de passif qui permet, moyennant le paiement d'une prime, une sortie définitive sans coût additionnel pour les uns et une certitude de solvabilité en cas de mise en jeu de la garantie pour les autres.
Les dépenses et les délais liés au transfert ou à la mise en cohérence des systèmes d'information (ERP) doivent également être anticipés au stade pré-closing pour ne pas être paralysants pour l'activité et générateurs de surcoûts postérieurement à l'acquisition.
Bien entendu, il est aussi devenu indispensable dans le contexte actuel de bien appréhender les impacts potentiels sur le business plan des mesures de soutien octroyées par l'Etat ou les partenaires de l'entreprise (PGE, chômage partiel, délais de paiement...). Que ces impacts soient positifs ou négatifs dans le temps, visibles immédiatement ou pas, il convient de les mesurer et de vérifier la transférabilité des mesures ou leur maintien en cas de changement de contrôle, les contraintes et obligations qui sont leurs corollaires, ainsi que les conséquences de leur dénouement à terme.
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Enfin, lorsque ces dispositifs sont insuffisants, il est primordial de préparer les éventuelles réorganisations ou restructurations qui s'avèreraient nécessaires, quitte, dans la mesure du possible, à débuter leur mise en oeuvre dans le cadre de la réalisation de la transaction (sous réserve des contraintes que de telles opérations peuvent ajouter au processus de consultation des instances représentatives du personnel dans le cadre de la cession) ou à les mettre à la charge du cédant.
Mettre en place un processus effectif de suivi des différentes problématiques
Dès le lendemain de la réalisation de l'acquisition, les équipes en charge de l'intégration doivent mettre un oeuvre un processus de gestion des différentes problématiques pour éviter les pertes de valeur, a fortiori en période de crise. On peut penser en premier lieu à l'accomplissement des formalités (enregistrement des actes, paiement des divers droits et taxes) pour ne pas s'exposer à des pénalités de retard, ainsi que le déploiement des délégations de pouvoirs et de signature (pouvoirs bancaires notamment) permettant une prise de contrôle opérationnelle immédiate.
Mais dans le contexte économique troublé que nous connaissons, les préoccupations doivent surtout porter sur le suivi des opérations de restructuration qui ont été ou doivent être mises en oeuvre. Rationaliser la structure juridique d'un groupe en période de croissance est un exercice qui demande de la méthode et le respect d'un calendrier précis. Lorsqu'un tel projet s'accompagne de mesure de réduction des coûts, de compétitivité voire de dispositifs de réduction de postes en période de crise, il devient un casse-tête juridique et opérationnel et doit être négocié pas à pas avec toutes les parties prenantes. Il est impératif que ces mesures fassent l'objet d'un monitoring régulier et que les coûts soient anticipés au plus tôt. Attention cependant à ne pas modifier le périmètre de la ou des société(s) acquise(s) ou les méthodes comptables sans avoir vérifié l'impact en termes financiers (éventuels ajustements ou compléments de prix) ou en matière de garantie de passif.
Il est également fortement recommandé de mener sans tarder un audit comptable et financier complet, pour identifier les éventuels écarts avec ce qui a été divulgué au moment des audits préalables à l'acquisition, dans la perspective d'une éventuelle mise en jeu de la garantie de passif. Il est en effet souvent beaucoup plus simple de mettre à jour ces écarts dans les comptes immédiatement que d'attendre que des circonstances ou évènements permettant de faire une réclamation en garantie se produisent, ou encore d'attendre la clôture de l'exercice en cours. En effet, pour obtenir une indemnisation, il faut être capable d'identifier le fait générateur de responsabilité des cédants, de remonter l'information et de la documenter (ce qui peut s'avérer complexe au sein d'un groupe), pour ensuite naviguer dans les méandres des procédures et délais de notification et des limitations de responsabilité mises en place par les conseils des cédants... ou de l'assureur qui a consenti à assumer la charge de la garantie.
Enfin, de bonnes pratiques consistent à reprendre les conclusions des audits préalables pour engager sans tarder les actions qui ont été recommandées, au risque de générer ultérieurement de nouveaux postes de coûts préjudiciables à l'atteinte des objectifs financiers qui ont été budgétés, ou d'assurer un suivi strict des contrats de transition pour permettre une intégration des services concernés au plus vite et en réduite ainsi l'impact financier.
Pour en savoir plus
Rémy Blain, Managing Partner et avocat associé en fusions-acquisitions, associé, Bryan Cave Leighton Paisner
Mathieu Taupin, avocat counsel en fusions-acquisitions, Counsel, Bryan Cave Leighton Paisner
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