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CAC 40, SBF120 et parité professionnelle : où en sont les femmes ?

Depuis 2023, la loi Rixain impose aux entreprises 30 % de femmes dans les Comex d'ici 2026 et 40 % d'ici 2029. Pour atteindre ces chiffres, comment les politiques d'égalité professionnelle changent la donne ? Où en sont les grands groupes du CAC 40 et du SBF 120 ? Détails.

Publié par Christina DIEGO le - mis à jour à
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Hommes et femmes entrepreneur(e)s : quelles différences ?
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Hommes et femmes entrepreneur(e)s : quelles différences ?

L'édition 2025 de l'Observatoire SKEMA de la féminisation des entreprises met en évidence les effets concrets de la loi Rixain, qui impose 30 % de femmes dans les Comex d'ici 2026 et 40 % d'ici 2029. Grâce à cette dynamique, la féminisation des comités exécutifs des entreprises du CAC 40 a progressé, passant de 9,5 % en 2014 à 27,98 % au 1er janvier 2024. Certaines entreprises, comme Engie, Kering et Schneider Electric, dépassent déjà le seuil des 40 %. De plus, l'écart entre la proportion de femmes cadres et leur présence dans les Comex s'est réduit à 9,97 points contre 21,82 points en 2008, traduisant une meilleure accessibilité aux postes de direction.

Mixité positive du middle-management

L'étude souligne que la mixité, en particulier dans le middle-management, joue un rôle clé dans la performance RSE des entreprises. Les organisations avec un encadrement féminisé affichent des risques sociétaux réduits de 41,66 % et des risques environnementaux en baisse de 79,65 %. Sur le plan financier, ces entreprises bénéficient d'une rentabilité opérationnelle supérieure de 107,46 % par rapport aux moins féminisées. En moyenne, les entreprises avec une forte féminisation affichent une rentabilité opérationnelle de 22,80 %, contre 10,99 % pour celles avec peu de femmes cadres. Elles sont également perçues comme moins risquées sur les marchés financiers, avec un bêta moyen de 0,88.

Inégalités au plus haut lieu de l'entreprise

Cependant, des inégalités subsistent : seules 6,25 % des 80 postes de PDG, président ou directeur général sont occupés par des femmes dans le CAC 40, et une entreprise, EssilorLuxottica, ne compte encore aucune femme dans son Comex. Or, la mixité représente un atout stratégique majeur pour la résilience et la compétitivité des entreprises, améliorant la créativité, la prise de décision et l'innovation, souligne Michel Ferrary, fondateur de l'étude. « La mixité n'est plus seulement une question d'égalité : elle est un véritable moteur de création de valeur économique et sociétale. »

En effet, le plafond de verre persiste pour les postes les plus stratégiques. Seules quatre femmes dirigent actuellement une entreprise du CAC 40 détaille le dernier baromètre IFA-Ethics & Boards :

-Catherine MacGregor chez Engie,

-Christel Heydemann chez Orange,

-Estelle Brachlianoff chez Veolia

Hinda Gharbi chez Bureau Veritas.

Et seulement trois femmes CEO dans le SBF 120 :

-Valérie Baudson chez Amundi,

-Sophie Boissard chez Clariane

-Sophie Zurquiyah chez Viridien

Index égalité, loi Rixain : quelles obligations ?

Certains indicateurs ont été mis en place pour bouleverser ces dispartités. A partir du 1er mars 2025, les entreprises d'au moins 50 salariés devront publier leur index égalité professionnelle femmes-hommes pour la sixième année consécutive. Cet indicateur, noté sur 100 points, repose sur quatre à cinq critères, en fonction de la taille de l'entreprise. Toutefois, un récent rapport de la Cour des Comptes met en lumière ses limites, notamment une portée restreinte, un manque de prise en compte des inégalités structurelles et des sanctions peu dissuasives.

En complément, depuis 2023, les entreprises de 1 000 salariés et plus doivent déclarer sur la plateforme « Représentation équilibrée » les écarts entre les femmes et les hommes parmi leurs cadres dirigeants et membres des instances dirigeantes. Cette mesure s'inscrit dans le cadre de la loi Rixain, qui fixe l'objectif d'atteindre 40 % de femmes cadres dirigeantes d'ici 2029. Ces obligations ont pour ambition d'accélérer l'égalité salariale et de favoriser une meilleure représentation des femmes à des postes de direction.

Des évolutions qui tardent à changer la donne

Même si l'index de l'égalité professionnelle a le mérite d'exister, il reste insuffisant pour analyser en profondeur les inégalités de rémunération dans les entreprises. « Certes, les notes s'améliorent chaque année, mais les écarts réels persistent. L'index repose sur une analyse globale, sans prendre en compte les composantes précises des rémunérations. Par exemple, on mesure combien d'hommes et de femmes ont bénéficié d'une augmentation individuelle, mais pas les pourcentages réels d'augmentation », nous explique Muriel Besnard, Consultante juridique chez ADP, cabinet de gestion du capital humain (HCM). En effet, il pourrait y avoir une égalité apparente en nombre de personnes augmentées, tout en maintenant des écarts significatifs si les hausses accordées étaient moindres pour les femmes. Le seuil de pertinence statistique de 5 % appliqué aux écarts de rémunération peut d'ailleurs masquer des inégalités lorsqu'il est calculé sur des catégories socioprofessionnelles trop larges, rendant l'analyse moins précise. « Avec le recul, il est clair qu'il faut aller plus loin pour que l'index soit un véritable outil d'amélioration. Certaines entreprises se contentent de respecter l'obligation légale, tandis que d'autres utilisent cet indicateur comme un levier stratégique pour revoir leurs politiques salariales et de promotion », analyse-t-elle. Pour elle, dès qu'une entreprise veut aller plus loin, elle doit creuser davantage, affiner ses analyses et identifier précisément où se situent les déséquilibres. « L'index seul ne suffit pas : un travail plus détaillé sur les indicateurs et les pratiques internes est nécessaire pour construire une véritable égalité salariale. »

Des parcours encore genrés

L'entreprise ne reflète-t-elle pas ce qui se passe dans la société, notamment en ce qui concerne les stéréotypes genrés ? Bien que les mentalités évoluent, les choix d'orientation et les parcours professionnels resteraient encore trop influencés par des biais ancrés dès l'enfance. « Le plafond de verre ne tient pas seulement aux barrières externes, mais aussi aux freins inconscients que certaines femmes s'imposent, souvent en raison de normes et d'expériences vécues. Le partage des responsabilités familiales évolue également, avec une implication croissante des hommes, mais ces transformations restent inégales selon les cultures et les secteurs d'activité. Ce sont des évolutions longues, qui nécessitent un changement global des mentalités », indique Muriel Besnard.

Importance des rôles modèles

Pour palier ce phénomène, il existe au sein des entreprises des solutions qui peuvent faire bouger les lignes. « Au sein de l'entreprise, le rôle des modèles inspirants et du tutorat est essentiel pour accompagner les femmes vers des postes de direction. Lorsqu'un homme décroche une promotion, il considère souvent que le travail est accompli, alors qu'une femme peut ressentir une pression supplémentaire pour prouver sa légitimité. Ce ressenti peut freiner certaines d'entre elles, d'où l'importance d'un accompagnement après la prise de poste ». Pour Muriel Besnard, la direction a un rôle clé a joué : « Il ne suffit pas d'afficher de belles intentions, il faut mettre en place des actions adaptées à la réalité de chaque secteur. C'est en impulsant des politiques cohérentes et en créant un environnement bienveillant que l'on pourra réellement faire évoluer les choses. »

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