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Alain Iozzino (Daf For Good) : « Les Daf partagent leur expertise et ont un impact concret sur l'avenir d'une jeune entreprise »

Alain Iozzino est le nouveau président du progarmme Daf For Good de la DFCG depuis janvier 2025. Il prend la relève d'Arnaud Meyer-Poujol, fondateur du programme en 2016, alors président de DFCG Avenir. Alain Iozzino nous explique dans cet entretien les contours et enjeux de ce programme pro bono innovant qui permet à des duos de Daf de relever un défi intellectuel et humain.

Publié par Christina DIEGO le | Mis à jour le
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Alain Iozzino (Daf For Good) : « Les Daf partagent leur expertise et ont un impact concret sur l'avenir d'une jeune entreprise »

Pouvez-vous vous présenter et comment vous avez pris la tête du programme ?

Alain Iozzino : Issu du milieu bancaire, j'ai débuté ma carrière au Crédit du Nord, à Marseille durant sept ans. Puis, par un concours de circonstances, je me suis installé à Béziers. C'est là que j'ai saisi une opportunité : un expert-comptable m'a mis en relation avec l'un de ses clients qui cherchait à structurer son groupe familial. À 29 ans, j'ai été nommé directeur financier, un poste que j'ai abordé avec enthousiasme, mais aussi avec la conscience qu'il me manquait encore des compétences. C'est à ce moment-là que j'ai découvert la DFCG à Montpellier, où j'étais l'un des plus jeunes membres de la région. Très vite, j'ai intégré le bureau de la DFCG Languedoc-Roussillon, où j'ai pris en charge les partenariats et l'accueil des nouveaux membres pendant plusieurs années.

Il y a deux ans, de retour à Paris en tant que directeur financier, j'ai participé à un dîner organisé par Jean-Christophe Benzot, directeur général de Groupama. Après quelques échanges, nous avons réalisé que nous nous étions connus il y a une quinzaine d'années, lorsque j'étais impliqué dans DFCG Avenir, programme qu'il avait lancé. Cette retrouvaille a marqué un tournant, puisqu'il m'a proposé de découvrir « Daf For Good », un programme auquel il participait activement. Depuis maintenant deux ans, je mets toute mon énergie et ma passion au service de ce programme, convaincu de son impact et de sa pertinence pour la profession financière

En quoi consiste le programme « Daf For Good » ?

A.I. : Lorsque Arnaud Meyer a lancé ce programme, l'idée était claire : proposer un espace où les Daf pouvaient se rencontrer, échanger et aborder des thématiques professionnelles, tout en construisant des liens forts et durables. J'ai rapidement adopté cette vision, et aujourd'hui encore, j'en parle comme un lieu où « créer des amitiés professionnelles ». L'objectif n'était pas simplement de multiplier les rencontres, mais de bâtir une communauté de directeurs financiers capable de partager ses expériences et d'accompagner des projets innovants.

Ce programme repose sur un concept simple et unique : aider des start-up qui n'ont pas encore la structuration financière nécessaire pour recruter un Daf à temps plein. Parfois, elles ne sont tout simplement pas prêtes à faire ce pas. Plutôt que de les laisser avancer seules, nous leur mettons à disposition deux directeurs financiers, dont un Daf résident. Ce duo de Daf va les mentorer, les accompagner sur des problématiques variées comme le business model, les levées de fonds, la structuration financière et comptable, etc. Ces experts aident les start-up à prendre conscience des priorités, comme le fait qu'un plan financier solide est indispensable avant d'aller voir une banque ou un investisseur, au-delà des seuls efforts en marketing.

Quel est l'impact à date ?

A.I. : À ce jour, plus de 150 start-up ont bénéficié de cet accompagnement, et nous avons noué des partenariats stratégiques avec des incubateurs, des fonds d'investissement et d'autres acteurs du financement. Chaque start-up reçoit 8 heures de mentorat par mois, sur une période de 12 mois, soit une valeur que nous avons estimée à 40 000 euros en prestations de conseil si elles devaient rémunérer ces services sur une année. Pourtant, ce programme reste entièrement gratuit et encadré par une charte signée par nos Daf pour garantir un cadre éthique et éviter tout risque de conflit d'intérêts.

Comment sont sélectionnés les Daf ?

A.I. : Ce sont très souvent des Daf de grands groupes du CAC 40 comme Publicis, Clarins, etc. Ils ont un coût au conseil que certaines boîtes ne pourraient pas se payer. C'est tout l'intérêt pour les start-up d'avoir des financiers de haut vol pour les aider et les coacher. Pour les Daf, l'intérêt est de sortir de leur zone de confort.

Il y a un appel à candidature au sein de la DFCG, un questionnaire leur est soumis et après c'est essentiellement du matching. Nous demandons aux directeurs financiers les points sur lesquels ils sont pertinents, leur domaine d'activité, s'ils sont plus spécialisés en finance, en compta, en levée de fonds, en structuration de business model ou d'équipe. On demande aux start-up leurs besoins. Une fois qu'on a les besoins des start-up et les expertises des Daf, on va faire « matcher » les profils pour que chacun puisse répondre aux attentes. L'accompagnement dure une année.

Pour la saison 2025, on a neuf start-up et 18 Daf. En général, on vise entre 9 et 12 start-up à l'année, on ne peut pas faire beaucoup de volume, ce n'est pas l'objectif.

Et les start-up ?

A.I. : Pour sélectionner les start-up, nous nous appuyons sur des partenariats avec des incubateurs, comme Finance Innovation cette année. Auparavant, on a eu Raise Sherpas. Nous avons aussi des recommandations dans nos propres réseaux. Sans nos partenaires le programme serait quand même compliqué à faire, ce sont eux qui le financent.

Cette année, nous avons cinq partenaires sur des niveaux différents, par exemple, BMW nous a accueillis pour la soirée de lancement dans ses locaux.

Quels sont les principaux défis financiers auxquels font face les entrepreneurs accompagnés ?

A.I. : Ce sont très souvent des questions en lien avec le business model : est-ce qu'il génère du cash ou pas ? Est-ce que ma structuration est trop lourde ? C'est également lié à un besoin de remise à plat, ou pour des levées de fonds qui n'ont peut-être pas été anticipées en termes de scalabilité, de transformation, de recrutement, etc. Quand le chiffre d'affaires augmente, il y a une organisation financière et comptable qui doit se mettre en place. C'est un moment clé où de nombreux Daf arrivent avec leur expertise pour les challenger avec bienveillance.

Quels bénéfices retirent les Daf engagés dans ce programme ?

A.I. : Je dirais que beaucoup de Daf « redoublent » d'une année sur l'autre. C'est très challengeant comme mission et ils peuvent vivre de belles histoires. Certains Daf ont même racheté la start-up qu'ils accompagnaient. Le Daf de Publicis, qui est intervenu dans notre programme, a accompagné la start-up Bizon que l'agence de pub a fini par racheter, et depuis, elle est devenue l'un des leaders du référencement sur Amazon.

Nous avons eu aussi des Daf qui ont investi aux côtés d'autres fonds dans des entreprises accompagnées. D'autres vont continuer l'histoire en les référençant pour être des fournisseurs, certains vont devenir clients. C'est un réseau qui est extrêmement important et c'est justement ces valeurs qui engagent des Daf de très bon niveau.

Quelle est votre feuille de route concernant cette nouvelle saison 2025 ?

A.I. : Ma ligne de route va s'aligner sur nos valeurs. Continuer à créer des amitiés professionnelles entre les Daf au sein de la DFCG, pour les nouveaux Daf qui arrivent, jeunes ou moins jeunes, pour ceux qui se posent des questions, pour ceux qui ont besoin de réseau, qui veulent donner un peu de sens et de temps à différents projets, mais aussi trouver de nouveaux partenaires, dynamiser un petit peu plus le programme.

Il y a une ambition de faire évoluer le programme en région, dans quel objectif ?

A.I. : Pour le moment, le programme existe dans quatre voire cinq régions. Mon objectif est de continuer le déploiement. Comme j'ai fait partie de la DFCG en Languedoc-Roussillon, j'ai toujours mes collègues qui sont directeurs financiers dans la région. Nous allons donc mettre en place le process via un kit de démarrage et de bonnes pratiques pour qu'en région, ils puissent lancer le programme et se l'approprier.

Lors de la soirée de clôture du programme en décembre 2024, nous étions plus de 150, entre partenaires, entreprises et start-up. Nous avions fait venir des start-up et des Daf d'autres régions pour avoir des témoignages sur le programme. L'objectif est d'en faire un programme référent à la DFCG.

En conclusion, 3 raisons pour un Daf de rejoindre le programme ?

A.I. : Les valeurs du programme sont la bienveillance, l'engagement, et le partage. C'est un challenge pour un Daf quand vous êtes dans votre zone de confort, avec des équipes, des outils, et que vous devez repartir pratiquement de zéro en accompagnant une nouvelle structure. La démarche intellectuelle est totalement différente quand vous êtes dans une start-up où, souvent, vous n'avez pas beaucoup de moyens.

L'engagement demandé aux directeurs financiers a été pensé pour être réaliste et accessible : 8 heures par mois, organisées selon leurs disponibilités. Chacun fixe ses rendez-vous directement avec la start-up qu'il accompagne, tandis que nous veillons au bon déroulement du programme. L'objectif final est clair : lorsqu'une start-up approche un fonds d'investissement ou une banque, elle peut valoriser son passage par le programme de Daf for Good, bénéficiant ainsi d'une certification attestant qu'elle a été accompagnée par deux Daf expérimentés qui ont analysé et structuré son business model. Cet engagement est aussi une aventure humaine où chaque directeur financier peut donner de son temps, partager son expertise et avoir un impact concret sur l'avenir d'une jeune entreprise. Nous avons toujours privilégié la qualité de l'accompagnement plutôt que la quantité de start-up intégrées au programme.

Au-delà du programme Daf for Good, la DFCG propose aussi d'autres initiatives comme Data for Good, ainsi qu'un ensemble d'événements et de groupes de travail où chacun peut trouver sa place et échanger avec ses pairs. Car, au coeur de tout cela, la mission de la DFCG reste la même : créer du lien, fédérer un réseau, une communauté et favoriser les rencontres professionnelles enrichissantes.

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