La raison d'être, un outil de pilotage pour le Daf ?
Avec les perturbations sociales et économiques générées par la crise, le réflexe des entreprises et des Daf, a été de se concentrer sur le court terme. C'est bien normal, mais 2021 peut être l'occasion d'une remise à plat. Or, écrire sa raison est une bonne clé d'entrée pour repenser l'organisation.
Les crises mettent au jour les fragilités des entreprises, éprouvent les business models mais constituent aussi un moment précieux pour redéfinir sa stratégie. Et qu'est-ce que la raison d'être si ce n'est définir pourquoi l'entreprise existe et quelle est sa mission ? "La première question qu'on doit se poser lorsque l'on veut travailler la raison d'être est : qu'est-ce qui serait différent si mon entreprises n'existait pas ? Qu'est-ce qui la distingue des autres ? " , explique Caroline Nunney, qui après 25 ans au sein de directions financières d'entreprises telles que Danone, The Body Shop ou La vie claire, accompagne désormais les dirigeants pour faire de leur raison d'être un levier de performance. La réponse à ce pourquoi, va permettre de fixer un cap pour l'organisation, de décliner la mission, de la traduire en actions et en orientations stratégiques. "C'est un triptyque : après avoir défini le pourquoi, le quoi définit la mission, le comment fait ressortir les valeurs clés pour l'entreprise et la vision lui donne une direction", souligne-t-elle.
Pour que cette raison d'être puisse vivre dans l'organisation, il faut qu'elle soit partagée par tous. L'intelligence collective est donc l'un des piliers de la raison d'être. "Mais faire de l'intelligence collective le moteur de l'entreprise n'exclut pas d'avoir un cadre", précise Caroline Nunney. Il va donc falloir définir des règles de fonctionnement qui allient collaboratif et cadre. "Quand tout le monde décide de tout, ceci peut créer de la confusion, ralentir la prise de décision et freiner la performance, estime-elle. Il faut trouver le bon réglage entre un fonctionnement participatif et un périmètre d'action clair pour chacun".
Retrouver du sens
Depuis les années 70 notre système s'est financiarisé au point de donner une place prépondérante à l'actionnaire par rapport aux autres parties prenantes. "Travailler la raison d'être remet l'organisation dans une logique d'équilibre systémique entre toutes les parties prenantes et de performance à long terme. Nous avons poussé le curseur très loin sur le reporting et les prévisionnels à répétition au détriment de la création de valeur, ce qui a parfois amené à une perte de sens au sein de la direction financière," estime Caroline Nunney. C'est pourquoi le Daf doit être au coeur de cette transformation de gouvernance. "Avec le DRH ils sont les 2 copilotes du dirigeant. Le Daf a cette capacité à donner de la perspective, à porter une vision à long terme, à renforcer l'écosystème de l'entreprise, à optimiser exécution et performance et diffuser les bonnes pratiques." De par sa position, le Daf est le mieux placé pour faire prendre conscience au dirigeant comme aux actionnaires que la raison d'être et la recherche de profit ne sont pas incompatibles.
Il est certain que dans le contexte actuel, il y a beaucoup d'entreprises en difficulté pour lesquelles définir sa raison d'être n'est pas une priorité. "Et pourtant il y a une vraie cohérence entre performance économique et raison d'être ! Car à travers des leviers de cohésion et de différenciation on va au contraire augmenter la création de valeur," insiste Caroline Nunney qui rappelle que la communauté des entreprises à mission fédère des entreprises de toutes tailles et de secteurs variés, et facilite le partage d'expériences en la matière.
Au-delà des aspects financiers, les enjeux environnementaux et sociaux prennent une place de plus en plus importante dans la stratégie des entreprises. Pour répondre à l'émergence de ces nouvelles problématiques, de nombreuses initiatives se développent parmi lesquelles on peut citer "Les acteurs de la finance responsable" AFR. Créée par Olivia Blanchard et 3 autres fondatrices, cette association vise à rassembler une communauté d'acteurs financier pour d'une part, faire connaître la finance responsable et d'autre part, proposer des actions concrètes et pragmatiques qui peuvent être déployés au quotidien sur ces questions. "Nous voulons répondre à une question simple : comment fait-on ? ", explique-t-elle et d'ajouter : "le changement est vital et ne pourra se faire qu'avec le soutien de la finance."
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