Covid-19 : N'oubliez pas la valeur en douane avant d'ajuster vos prix de transfert
Pour la plupart, les prix de transfert devront faire l'objet d'un ajustement significatif pour la clôture des comptes 2020. Ces ajustement doivent être anticipés afin d'éviter que des droits de douane soient indûment payés car assis sur une valeur différente de celle des prix de transfert.
Les difficultés rencontrées par les entreprises du fait de la crise du coronavirus auront un impact majeur sur l'activité et les marges de la plupart des groupes internationaux. Or, les prix de transfert doivent correspondre aux prix auxquels seraient convenus deux entreprises indépendantes l'une de l'autre. Les prix de transfert pour 2020 devront nécessairement être le reflet de cette nouvelle donne. En d'autres mots, les prix intragroupes devront faire l'objet, si nécessaire, d'un ajustement avant la clôture pour refléter la nouvelle réalité du marché.
Lorsque ce prix de transfert est utilisé à des fins douanières pour l'évaluation de marchandises, il n'est plus possible de prendre en considération ces ajustement une fois le dédouanement effectué.
L'entreprise importatrice pourra ainsi être contrainte d'acquitter des montants de droits de douane trop élevés si le prix d'importation devait être revu à la baisse du fait d'un ajustement des prix de transfert afin d'atteindre la marge cible visée en fin d'année.
A cet égard, on se réfèrera à l'arrêt Hamamatsu, dans lequel la CJUE a considéré que le remboursement de droits consécutif à un ajustement à la baisse d'un prix de transfert en fin d'année ne pouvait être accepté et que, dès lors, la valeur transactionnelle ne pouvait être modifiée *.
Cette décision parait cohérente dans la mesure où l'importateur ne semble pas avoir anticipé l'impact de cet ajustement sur le dédouanement étant rappelée que la valeur transactionnelle déclarée ne peut être modifiée à postériori.
Le Code des Douanes de l'Union permet cependant de pallier à semblable situation.
En effet, avec l'autorisation de valeur provisoire, il est possible de différer la détermination de la valeur en douane définitive lorsque des éléments sont inconnus au moment du dédouanement
Tel est précisément le cas en matière de révision ou d'ajustement des prix de transfert.
En pratique, les modalités de dédouanement s'effectuent en deux temps :
- Le dépôt d'une déclaration simplifiée mentionnant une valeur provisoire, déterminée sur la base des éléments connus et d'une estimation des éléments inconnus
Puis,
- La régularisation par le dépôt d'une déclaration complémentaire comportant les éléments nécessaires au calcul de la valeur en douane définitive.
En tout état de cause, la mise en oeuvre de cette procédure est soumise à autorisation qui doit être demandée en amont du dédouanement.
En effet, la référence à l'autorisation doit figurer sur la déclaration.
A défaut de respect de ces modalités, non seulement la valeur en douane ne sera pas ajustée, des droits de douanes supplémentaires auront été acquittés et la valeur déclarée ne sera pas conforme à la règlementation puisque ce n'est pas celle qui aura été effectivement payée.
Un seul mot d'ordre dans ces conditions : l'anticipation.
Pour en savoir plus
Nadine Grenouilleau, associé au sein du département droit douanier chez Fidal, contributions indirectes et fiscalité environnementale/ecologique. Elle intervient tant en contentieux, qu'en conseil aux côtés des entreprises confrontées à des problématiques douanières aussi nombreuses que variées (classement des marchandises, origines des produits, Taxation des alcools, produits pétroliers, TICFE, TGAP, Export Control et Biens à double usage....). La relation valeur en douane/prix de transfert est l'un de ses sujet de prédilection
Gilles Vincent du Laurier Avocat associé au sein du département fiscal du cabinet Fidal. Spécialiste en fiscalité internationale et prix de transfert. Il intervient plus particulièrement dans la mise en place de politique de prix de transfert et sur l'ensemble des problématiques financières internationales pour des sociétés industrielles ainsi que des banques et sociétés d'assurance.
Valentin Lescroart est avocat associé au sein du cabinet Fidal dont il co-anime la ligne de spécialité Prix de transfert.
* (CJUE, 20 décembre 2017, aff. C-529/16, Hamamatsu )
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