Transition énergétique : pourquoi hybrider les financements
Comment financer sa transition énergétique quand on peine à payer ses factures ? Depuis plusieurs mois, l'équation est complexe à résoudre pour nombre d'entreprises, dans un contexte d'explosion des prix du gaz et de l'électricité, d'envolée des coûts des matières premières, et de difficultés à recruter. Pourtant, conjuguer court et long terme est la seule façon de changer la donne.
Une transition de long-terme malgré la crise
L'urgence de changer de trajectoire n'est plus en débat. La COP27 climat et la COP15 biodiversité ont clos 2022, rappelant chacune la nécessaire mobilisation des acteurs économiques. Ces derniers doivent inscrire les mesures d'urgence dans une mutation au long court.
Face à la crise énergétique, certains ont déjà optimisé leurs consommations pour réduire les factures, et il est impératif de commencer par ces actions de sobriété et d'efficacité. Pour aller plus loin, se pose la nécessité de transformer les façons de consommer et de produire l'énergie, et jusqu'à nos modèles d'affaires. Ne serait-ce que pour remplacer des équipements ou entreprendre des travaux, investir est incontournable. Pour ce faire, hybrider les solutions de financement est la meilleure façon de contourner les tensions économiques.
Financer autrement
La transition énergétique et environnementale impose de financer différemment. Elle exige de forts investissements dans l'immédiat, compensés par des économies futures. Un industriel qui souhaite récupérer sa chaleur fatale assumera des coûts importants pour adapter ses installations, mais il réduira les charges associées aux combustibles dans la durée. Les nouvelles manières de financer doivent faire correspondre le calendrier des décaissements à celui des économies d'énergie. Raisonner en coût complet permet de prendre cela en compte, mais aussi l'empreinte carbone, les coûts d'exploitation et de maintenance.
Il est par ailleurs nécessaire que ces financements soient capables de soutenir des projets complexes, qui réunissent notamment plusieurs acteurs, privés et/ou publics, pour mener des transformations ambitieuses. Dans l'objectif de maximiser le potentiel énergétique de leur territoire, une métropole et des industriels peuvent s'associer au sein d'une zone d'activités, et créer une boucle énergétique locale. Pour voir le jour, ce type d'initiatives aux budgets conséquents requiert un plan de financement habile, combinant par exemple les aides publiques du Fonds décarbonation ou du Fonds chaleur, des primes CEE (Certificats d'Economie d'Energie), et un tiers financement adapté pour alléger, voire couvrir le reste à charge.
Réussir à financer la transition implique enfin de combiner compétence financière et compétence technique, afin de dimensionner correctement les projets, et être capable de garantir les résultats. Pour des bornes de recharge, la location évolutive permettra de bénéficier des technologies susceptibles de s'améliorer rapidement. Pour des équipements frigorifiques, un distributeur préférera recourir à un contrat de performance énergétique (CPE), afin d'avoir une garantie sur la réduction des consommations énergétiques de ses magasins, et ainsi atteindre ses objectifs du décret tertiaire.
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Le pragmatisme de l'action
Pour réaliser les changements structurels dont nous avons besoin, il faut planifier. Chaque entreprise doit commencer sa démarche par un état des lieux, déterminer les mesures faciles et rapides, celles plus ambitieuses et coûteuses, celles privilégiant l'efficacité énergétique et celles contribuant à modifier le mix énergétique, puis établir le bon ordre de ces opérations. Les économies des actions aux gains rapides (travail sur les usages, et optimisation de l'existant) contribueront ainsi à financer les suivantes. Mêler astucieusement subventions publiques, primes privées, solutions de tiers-financement sur-mesure et accompagnement technique facilitera la mise en oeuvre.
Dans tous les cas, nous devrons payer. Soit pour éradiquer la cause de nos maux, anticiper et réaliser la transition, c'est-à-dire réduire drastiquement nos consommations énergétiques et nos émissions de gaz à effet de serre. Soit pour assumer les conséquences de notre passivité : flambée des factures énergétiques, dégâts climatiques en cascade, etc. Plus on attend, plus on perd d'argent, car on passe à côté d'économies potentielles et que le coût de l'inaction, lui, se renforce. Nous devons innover pour la résilience de nos entreprises, et pour l'atteinte des objectifs climatiques. Hybrider les solutions de financement est une façon de se lancer maintenant, avec ambition et pragmatisme.
Pour aller plus loin :
Marie-Sylvie Bertail est directrice générale de GreenFlex depuis 2020, après en avoir été la DGA pendant 7 ans. GreenFlex mise sur son modèle multi-expertise pour accompagner entreprises et territoires dans leur transition de A à Z.
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