[Portrait] Thierry Luthi : "Toujours avoir le choix !"
Une carrière ne se décide pas à 20 ans elle se dessine au fil des expériences, des opportunités, des rencontres... En tous cas elle est rarement linéaire. Celle de Thierry Luthi, aujourd'hui président de Report One, en est un bon exemple.
Avant d'être président de Report One et de diriger l'entreprise en binôme avec Thibaut Chesné directeur général, Thierry Luthi a coiffé plusieurs casquettes. De ses débuts dans l'audit il bifurque vers la baque puis devient Daf pendant plus de 20 ans avant de prendre des fonctions de dirigeant d'entreprise. Classique ? Allons voir de plus près...
Etudiant, Thierry Luthi se rêvait indépendant. C'est ce qui l'a poussé à décrocher un diplôme d'expertise comptable. « Ma principale préoccupation était de toujours avoir le choix, de rester libre. Mon objectif était de pouvoir un jour apposer ma plaque d'expert comptable sur le mur d'un immeuble », se souvient-il. Finalement, point de plaque au mur mais ce besoin de liberté et d'autonomie ne l'a jamais quitté. C'est d'ailleurs l'aspect 360° du métier de Daf qui lui a plu. « Un Daf est comme un médecin généraliste, il est bon en tout mais expert en rien. Dit autrement, il a une capacité de compréhension et d'évaluation totale mais sans avoir toutes les expertises, car c'est tout simplement impossible. Or avoir cette capacité d'analyse pour aller chercher le bon expert est justement ce qui est particulièrement intéressant dans le métier », estime Thierry Luthi.
Pendant un peu plus de 20 ans de 1997 à 2019, il s'est épanoui dans la fonction de Daf. D'abord chez Servant Soft passée sur le second marché en 1997 puis rachetée par Cegid en 1999. Thierry Luthi occupera les fonctions de Daf de Cegid à partir de 2003 et ce, jusqu'en 2017. Il passe ensuite 2 ans en tant que Daf conseil puis intégré chez Altares. Très impliqué dans la communauté, membre actif de la DFCG, il prend la présidence de la région Rhône Alpes Auvergne en 2007 puis la présidence nationale de 2012 à 2014.
Bifurcation opportune
Mais comme souvent, une rencontre ou plutôt dans ce cas précis des retrouvailles, vont offrir à Thierry Luthi de nouvelles perspectives. « J'ai recroisé sur ma route un ami de 30 ans, connu chez Servant Soft lors de la création d'un département reporting. Ce qui n'était pas évident puisqu'à l'époque aucun outil n'existait sur le marché, le reporting n'avait rien à voir avec ce qu'il est aujourd'hui. Nous allions jusqu'à faire de la programmation ! » Or, justement cet ami n'était autre que l'un des fondateurs de Report One.
A l'été 2019, l'idée de faire un LMBO prend forme dans l'esprit des deux hommes et Thierry Luthi, convaincu du potentiel de l'entreprise, se lance dans la préparation d'un road show. En juillet 2020, il prend la signature et la présidence de la société. Une nouvelle aventure commence. La gouvernance s'effectue en binôme avec Thibaut Chesné qui assure la direction générale. « Si nous apprenons encore à nous connaître, cette première année de collaboration, dans un contexte qui plus est inédit, a fait naître un binôme solide, estime Thierry Luthi. Nous avons tous les deux vu le potentiel de Report One. Thibaut fait partie des fidèles de la première heure puisqu'il y est entré en tant que stagiaire. Il a toujours cru en cette solution même lorsqu'elle peinait à se développer à ses débuts. Et l'histoire lui a donné raison ! »
Et maintenant ?
Pour Report One le premier semestre 2021 s'est bien passé. Malgré un effet de base par rapport à 2020, l'entreprise passe sans encombre la première partie de l'année notamment grâce à une réorientation stratégique pour mieux adresser le client final qui a porté ses fruits et un réseau de partenaires qui a renoué avec la croissance. « Il faut souligner que nous avons eu un comportement très sain en termes de gestion de cash du fait que nos clients se sont comportés de façon très correcte vis-à-vis des délais de paiement avec très peu de décalages d'échéances. Ce qui est un signe très positif car quelque part cela signifie qu'ils sont satisfaits de la solution et du niveau de service fourni », souligne Thierry Luthi.
Optimisme et détermination sont sans doute les qualificatifs les plus appropriés pour définir le président de Report One. « Si le premier semestre est bon il n'y a pas de raison que le second le soit moins même s'il faut toujours rester prudent, surtout dans le secteur du logiciel très concurrentiel. Je prône donc la prudence tout en restant résolument optimiste ! » Pour autant il ne faudrait pas brûler les étapes et de cela Thierry Luthi en est parfaitement conscient.
Garder la tête froide
Savoir laisser le temps au temps est une vertu parfois difficile à acquérir dans l'univers entrepreneurial, surtout lorsque l'entreprise est dans une dynamique de croissance forte, mais c'est une vertu que justement son parcours de Daf lui a permis de polir. Ainsi, s'il ne ferme pas la porte à une nouvelle accélération de la croissance organique, Thierry Luthi garde la tête froide : « Fin 2020 nous avons beaucoup investi dans les équipes commerciales et support ainsi que dans la R&D donc pourquoi pas accélérer encore sur la croissance organique, avance-t-il prudemment. Bien sûr nous avons également l'objectif de poursuivre avec Cylad notre actionnaire majoritaire l'identification de cibles de croissance externe. Mais il faut faire preuve de calme vis-à-vis de ces différents projets et s'assurer que l'entreprise soit prête et capable d'intégrer cette croissance externe. » Point question de se laisser griser donc. On sent encore les réflexes du Daf, toujours en quête de croissance rentable et du juste équilibre, derrière la façade de dirigeant. D'autant que pour avoir été de l'autre côté de la barrière, Thierry Luthi connaît parfaitement les besoins et les attentes des Daf de PME en matière d'outils de reporting et BI !
La particularité du Daf de LBO
Si l'expérience fait la spécialité (avec le temps un Daf sera spécialiste en retournement ou en croissance par exemple), ce n'est pas tout à fait juste concernant les Daf sous LBO selon Thierry Luthi. « A mon sens être Daf sous LBO se caractérise d'abord par une attitude, un comportement car en réalité vous avez deux patrons : un patron hiérarchique quotidien fonctionnel incarné par la direction de l'entreprise (le dg) et un patron hiérarchique plus financier, représentant de l'actionnaire (le fonds). Or, tout dépend de la relation que le Daf entretient avec ces deux parties prenantes. S'agit-il d'un vrai duo ou le Daf n'a-t-il entre les mains que le régalien ? C'est ce qui fera toute la différence. Quant au rôle de business partner cela se joue plutôt dans une relation plus horizontale avec ses pairs et au sein de l'entreprise notamment du comité de direction, où cela prend toute son importance et tout son sens aussi. »
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