La rupture conventionnelle à l'épreuve des jurisprudences
Plusieurs décisions ont été prises au cours des premiers mois de l'année. Alors que quatre arrêts de la Cour de cassation ont conforté ce mode de séparation à l'amiable, un cinquième, publié fin mars, a fragilisé un dispositif pourtant plébiscité par les entreprises et les salariés.
L'année 2014 a bien débuté pour les partisans de la rupture conventionnelle. Dans une série d'arrêts rendus le 29 janvier, tous favorables à l'employeur, la Cour de cassation a clarifié plusieurs points qui rendaient délicate l'application de cette convention supposée sécuriser la rupture du contrat de travail d'un commun accord.
Des jurisprudences à l'avantage des entreprises
En premier lieu, la Cour a estimé que si l'employeur ou le salarié commettaient une erreur sur la date d'expiration du délai applicable dans le cadre de la convention de rupture, cela n'entraînait pas pour autant la nullité de la convention, à moins que cette erreur ait eu pour effet de vicier le consentement de l'une des parties, ou de la priver d'exercer son droit de rétractation. " Cet arrêt, qui a le mérite de clarifier une difficulté pratique, est très sécurisant pour l'entreprise ", estime Me Éric Ravier, avocat chez Capstan.
Un point de vue que ne partage pas complètement Me Virginie Devos, associée chez August & Debouzy. Pour cette dernière, en effet, " l'arrêt laisse planer un risque de nullité : certes, cette sanction avait été écartée par la cour d'appel, qui avait exclu tout vice du consentement, mais il convient de rester vigilant, notamment eu égard à l'obligation de remettre un exemplaire de la rupture conventionnelle au salarié ".
Dans une deuxième affaire, le contrat de travail du salarié prévoyait une clause de non-concurrence susceptible d'être déliée par l'employeur " au plus tard dans les 15 jours suivant la première présentation de la notification de la rupture de son contrat de travail ". Il s'agissait alors de déterminer à quelle date se situait la rupture du contrat de travail. La Cour de cassation a estimé qu'en application de l'article L 1237-13 du code du travail, la date de rupture est celle qui est fixée par les parties dans la convention de rupture, laquelle ne peut être antérieure au lendemain du jour de l'homologation par la Direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (DIRECCTE). De telle sorte que le délai de 15 jours permettant à l'employeur de délier le salarié de son obligation de non-concurrence a pour point de départ la date de rupture fixée dans la convention. " La décision semble logique. En matière de rupture conventionnelle, la rupture des relations de travail entre l'employeur et le salarié n'est considérée comme effective qu'en l'absence de rétractation des parties et qu'après validation par l'autorité administrative ", souligne Stéphanie Heulin, counsel chez Homère.
La troisième décision a également conforté le principe même de la rupture conventionnelle. La Cour de cassation a en effet estimé que l'absence de mention concernant le droit pour le salarié de se faire assister par un conseiller extérieur n'affectait pas la validité de la convention. Enfin, la décision de la Cour de cassation est la même dans le quatrième arrêt, concernant le défaut d'information du salarié - toujours dans la lettre d'invitation à l'entretien - du droit de prendre les contacts nécessaires auprès de Pôle emploi pour envisager la suite de son parcours professionnel. En clair, la justice confirme, avec ces quatre arrêts, la validité de la convention de rupture conventionnelle, tout en invitant les entreprises à faire preuve de la plus grande vigilance tout au long du processus. " Finalement, la Cour de cassation confirme que les seules causes susceptibles d'annuler une convention sont liées aux vices du consentement, ce qui est bien normal. C'est une position très forte de la Cour ", estime Me Éric Ravier (Capstan).
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