[Avis d'expert] La conduite du changement, un levier de réduction des coûts
Prendre en compte le changement « a posteriori » est un coût. Le prendre en compte « a priori » est un investissement. La perte de repère des collaborateurs - principale cause d'échec des projets - peut être évitée en les rendant acteurs du changement. Le changement devient alors une opportunité.
Le changement est vital pour conserver la performance d'une entreprise, sa rentabilité, voire sa viabilité. A l'échelle d'une entreprise le changement n'est pas un choix individuel, c'est une décision managériale nécessaire qui implique des évolutions pour chaque individu, chaque collaborateur.
Pour se réinventer, les sociétés sont entrainées dans un mouvement de plus en plus rapide : évolution du marché, restructuration de l'entreprise, transformation du SI, etc. Diverses raisons les contraignent à changer : un retournement du marché, de nouvelles normes légales, l'arrivée d'un concurrent, l'ouverture d'un canal de distribution, une avancée technologique ou encore une baisse de la rentabilité.
Bon exemple de mutation en cours, le secteur bancaire traditionnel doit faire face à des réglementations toujours plus rigoureuses - IAS, IFRS, IFRIC- et à la montée des paiements sur smartphone. Paypal a déjà capté 15% de l'e-paiement en France. Qu'en sera-t-il pour les banques si Apple Pay capte le milliard de clients Apple, sachant que 50% de la population planétaire n'est pas bancarisée et paie avec son téléphone ? (Ref1)
Comment aborder le changement
Prendre en compte le changement "a posteriori" est un coût. Le prendre en compte "a priori" est un investissement. La communication est importante pour mettre tout le monde en ordre de bataille. Selon Albert Camus "Mal nommer les choses, c'est ajouter du malheur au monde." Peu informés ou mal informés, les collaborateurs ne peuvent que subir ces changements. C'est pourquoi, la direction d'une entreprise doit expliquer à ses équipes ce qu'il se passe et les solliciter immédiatement pour les impliquer le plus en amont possible. Il faut pour chacun, comprendre ce qui arrive et penser en termes de cible.
Sans connaître la cible de la nouvelle stratégie, les collaborateurs peuvent perdre leurs repères. Certains peuvent se cantonner dans une attitude attentiste, d'autres éprouver de l'angoisse. Attitudes qui conduisent à un absentéisme chronique dommageable pour l'entreprise et à des problèmes psychologiques douloureux pour les personnes. Novethic estime à 12.600 € par salarié et par an le coût du mal-être au travail.
Certes chaque entreprise est particulière et, selon sa taille, son secteur d'activité, son climat social, son histoire, le personnel est amené à réagir différemment face aux changements.
Sans l'implication des collaborateurs gare à l'échec
Le changement pourrait être facile, si tous les collaborateurs étaient conscients de sa nécessité et devenaient, de ce fait, des moteurs. Mais le changement dérange nombre d'entre nous. Certains pensent que le monde est immuable (Ref2), d'autres préfèrent s'en remettre à la direction. De la même façon, le changement pourrait être facile si les dirigeants avaient conscience qu'ils sont impuissants sans l'implication de tous.
Donner du sens et impliquer les collaborateurs, c'est aussi profiter de la remontée d'informations et de proposition de solutions, de la connaissance de la base, des problèmes du terrain.
Dans la plupart des cas, le changement est sous-tendu par une transformation du SI. Le prix d'un projet informatique qui échoue, peut se chiffrer de quelques centaines de milliers d'euros à des millions. Coût des études, coût des licences et serveurs ou coût de l'usage "on cloud" + coût de l'intégrateur + coût des collaborateurs internes.
Sur 100 projets, 70 sont des échecs du fait d'un manque d'accompagnement au changement (source Rapport Chaos).
FoxMeyer en est une illustration: Au début des années 90, ce grand distributeur pharmaceutique américain, a voulu mettre en place son ERP. Aujourd'hui ce projet est connu pour être un échec cuisant. Principale raison à cela : le manque de prise en compte et d'implication des utilisateurs (Cf Les 5 plus gros échecs informatiques)
source étude Deloitte
L'écueil principal et la principale cause d'échec des projets de transformation du SI est la perte de repère des collaborateurs. Elle peut être évitée en les rendant acteurs du changement. La conduite du changement ne rime pas seulement avec formation il s'agit d'un processus complet qui doit être pris en compte dès le début du projet et jusqu'à sa stabilisation, ce qui signifie aussi qu'il faut en avoir prévu le budget.
Les étapes d'un processus de conduite de changement
L'initialisation : c'est la période de réflexion pour établir les stratégies de communication, formation, accompagnement et déterminer les responsables de la conduite du changement ainsi que les relais / utilisateurs clés.
La communication : elle prépare les différents acteurs et les rend moteurs du changement. "Qu'est ce qui va changer ? Quelles sont les plus-values attendues de ce changement pour les personnes ?" La communication donne une vision du chemin à parcourir et cette vision est facteur de fédération des équipes.
La formation permet aux collaborateurs de se rendre maîtres des nouveaux processus et des outils et d'apprécier les améliorations qu'ils apportent.
L'accompagnement a pour but de prendre en compte les dernières questions, d'améliorer les défauts de "jeunesse" après le Go-Live. La gouvernance des données et des responsabilités est mise en place dans la durée, pour faire vivre les nouveaux processus ou la nouvelle application.
Le changement expliqué et piloté devient une opportunité
Sans conduite du changement, le ROI sur les projets de transformation du SI peut être nul, alors que tout changement est une formidable opportunité s'il est bien conduit. Des collaborateurs sereins et confiants contribueront même à le dynamiser.
"Il faut que tout change pour que rien ne change." (Ref3)
Le maintien du niveau de compétitivité d'une entreprise passe par l'actualisation régulière de sa stratégie et sa déclinaison réussie à un niveau opérationnel.
Tous les dirigeants le savent, eux qui doivent faire preuve en permanence de vision et de pragmatisme pour anticiper les challenges de demain.
Diane Couturier est senior manager au sein de Nell Advisory, élargissement de l'activité du cabinet Nell'Armonia, dédiée au conseil métier et à l'accompagnement des décideurs financiers dans le pilotage de la performance de l'entreprise
Ref1 : « La fin des banques » -Eyrolles
Ref2 : Alerte sur la banquise - Pearson
Ref3 : Guépard de Giuseppe Tomasi di Lampedusa
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