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[Tribune] IFRS 15: l'économie de l'abonnement en première ligne

Les nouvelles normes comptables IFRS 15 et leur équivalent US GAAP, ASC 606, annulent et remplacent l'ensemble des normes et réglementations mondiales sur la reconnaissance des revenus. À partir du 1er janvier 2018, les entreprises devront s'y conformer.

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[Tribune] IFRS 15: l'économie de l'abonnement en première ligne

Les nouvelles normes comptables IFRS 15 et leur équivalent US GAAP, ASC 606, annulent et remplacent l'ensemble des normes et réglementations mondiales sur la reconnaissance des revenus - l'un des principaux indicateurs de performance de l'entreprise. À partir du 1er janvier 2018, c'est-à-dire demain, les entreprises doivent s'y conformer et donc réévaluer leur manière de comptabiliser leur chiffre d'affaires. Une tâche qui est loin d'être une sinécure.

IFRS 15: impacts majeurs pour les acteurs de l'économie de l'abonnement

L'une des évolutions majeures pose le principe unique de comptabilisation du chiffre d'affaires en cinq étapes, tout en définissant la notion d'obligation de performance. Cette évolution est d'autant plus critique qu'elle touche une ligne essentielle du compte de résultat. Les incidences de cette nouvelle norme comptable seront en conséquence plus importantes pour les contrats à long-terme et à éléments multiples. Le business model de la souscription ou des revenus récurrents est donc concerné au premier chef. Si ce modèle économique était autrefois presque exclusivement utilisé par l'industrie des logiciels (SaaS), télécoms et médias, la vague de l'économie de l'abonnement se répand aujourd'hui dans toutes les entreprises, quel que soit leur secteur d'activité - depuis le transport jusqu'à la santé, en passant par les aliments pour animaux domestiques et les boxes de rasage - pour répondre aux nouvelles habitudes de consommation.

Les nouvelles normes IFRS 15 et ASC 606 ont certes le mérite de simplifier et d'harmoniser des pratiques comptables très hétérogènes (il existait jusqu'alors plus de 200 normes comptables US GAAP de reconnaissance de chiffre d'affaires répondant aux spécificités des différents secteurs d'activité), tout en apportant des réponses mieux adaptées au monde du digital. Mais elles réclament des entreprises qu'elles revoient en profondeur leur reporting comptable et financier.

En résumé, elles risquent d'éprouver des difficultés du fait de l'absence de modèle de données dédié pour supporter les contraintes d'IFRS 15, de l'incapacité à opérationnaliser différentes interprétations des normes, et du manque de temps et de ressources pour réviser l'ensemble des contrats. Elles devront en outre se familiariser avec le nouveau concept d'"obligations distinctes de performance".

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Une comptabilisation proportionnelle

Depuis des années maintenant, les entreprises ont l'obligation de comptabiliser le revenu lors du transfert du bien ou service, proportionnellement à ce qui a été livré. Ce qui a compliqué la tâche des comptables des entreprises de l'économie numérique, dont les business models sont orientés vers une logique de monétisation flexible. Les relations commerciales de ce type d'entreprise peuvent en effet évoluer dynamiquement avec le temps, parfois à l'initiative du client lui-même qui a tout loisir d'augmenter ou de réduire son abonnement, voire de le suspendre temporairement. C'est typiquement l'exemple du self-service/self-care, de plus en plus répandu, aussi bien en BtoC qu'en BtoB. Par ailleurs, les offres proposées sont souvent construites sous la forme de solutions clés en main - donc, par essence, un "bundle" de produits de différentes natures présentant parfois des obligations de performance distinctes.

Le cas de figure des abonnements est particulièrement complexe, car ils sont déployés au fil du temps. La prise en compte des caractéristiques courantes de la souscription - par exemple, les abonnements à tacite reconduction ou les frais initiaux non remboursables - devient difficile lorsque les entreprises doivent décider si elles doivent immédiatement reconnaître le revenu ou le reporter. Le modèle de tarification basée sur l'usage complique également le processus de fixation du tarif de la transaction et à chaque évolution du contrat - ajout, suppression ou changement de type de service - l'équipe financière devra réévaluer son traitement comptable.

Demain, c'est aujourd'hui...

Conséquence, selon Deloitte, les nouvelles normes augmentent considérablement la quantité d'informations que les entreprises doivent divulguer. C'est comme si un professeur exigeait non seulement que l'élève montre son travail, mais également qu'il écrive un essai approfondi détaillant l'approche choisie, pourquoi il l'a retenue et sur la base de quelles hypothèses, quels outils ont été utilisés, et quels processus de contrôle ont été mis en place pour s'assurer que tout se passe bien...

Au vu de la complexité de la mise en oeuvre des nouvelles normes et de la nécessité de réévaluer l'ensemble des contrats passés avec des clients, il est surprenant d'apprendre par la voix de PwC que 22% des entreprises n'ont pas encore initié de réflexion et que seulement 13% ont passé le cap de l'évaluation pour entrer concrètement dans la mise en oeuvre des nouvelles normes. L'impact opérationnel de cette évolution réglementaire ne doit pourtant pas être sous-estimé (notamment en termes de formation des contrôleurs de gestion et de préparation des données); a fortiori au moment où déjà 62% des départements comptables s'estiment en sous-effectif et où 25% d'entre eux doivent faire appel à des intérimaires pour atteindre leurs objectifs.

À la lumière de ces challenges, il est compréhensible que des solutions de contournement soit mises en oeuvre pour répondre à l'urgence de la situation. Toutefois, les fichiers Excel ou "rustines" techniques ne seront viables que temporairement. Les directions financières devront rapidement se tourner vers de nouvelles solutions construites autour d'un modèle de données dédié aux enjeux IFRS 15/ASC606, permettant d'automatiser le processus de reconnaissance de revenu sur la totalité des étapes du cycle de vie commercial... et comme toujours, ces solutions n'éviteront pas aux entreprises la nécessité de réévaluer l'ensemble de leurs pratiques comptables.

L'auteur

Michael Mansard, principal - business transformation, Zuora

Michael Mansard accompagne les clients de Zuora dans le cadre de leur transformation stratégique des business models traditionnels vers de nouveaux modèles récurrents basés sur l'économie de l'abonnement.

Au cours de ces 3 dernières années chez Zuora, il a eu l'opportunité de travailler avec plus de 100 entreprises de toutes tailles, en pleine mutation digitale, dans des secteurs aussi divers que les produits de grande consommation, les fournisseurs de technologies ou l'automobile.

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