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Collecte pour Notre-Dame : les règles du mécénat d'entreprise

En France, générosité et fiscalité sont-elles trop liées ? Le régime de faveur du mécénat est en effet l'un des plus incitatifs au monde sur le plan fiscal. Ses détracteurs dénoncent une niche fiscale représentant un coût pour l'Etat, occultant l'impact concret des actions financées.

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Collecte pour Notre-Dame : les règles du mécénat d'entreprise

Les spectaculaires élans de générosité consécutifs à l'incendie de Notre-Dame ont été à la hauteur de la sidération provoquée par la vue de l'édifice en proie aux flammes. Une mobilisation transcendant les différentes couches de la société, comme en témoignent les afflux de dons émanant tant des mécènes particuliers anonymes que des grandes entreprises et des grandes fortunes. Très vite, au temps de l'émotion a cédé la place à celui de la polémique.

Quel mécanisme de réduction d'impôt ?

Le mécénat d'entreprise est encadré par l'article 238 bis du Code général des impôts (CGI), prévoyant une réduction d'impôt de 60% du montant du don au bénéfice des entreprises mécènes, dans la limite de 10 000€ (1) ou de 0,5% du chiffre d'affaires si ce dernier est plus élevé. Si ce seuil est dépassé, l'entreprise a la faculté de reporter l'excédent sur les cinq exercices suivants.

Les dons pris en compte sont en premier lieu ceux faits en numéraire ; dans cette hypothèse, il n'y a aucune difficulté à calculer le montant de la réduction d'impôt. Le mécénat en nature ouvre également droit à la réduction d'impôt, nécessitant de se reporter aux règles de valorisation posées par l'administration fiscale. A titre d'exemple, le mécénat de compétence est valorisé au prix de revient de la prestation pour l'entreprise mécène et non au prix auquel cette prestation aurait pu être vendue.

Tout comme le fait de donner, l'application de la réduction d'impôt n'est ni automatique ni obligatoire. Ainsi, une entreprise mécène peut, si elle le souhaite, ne pas s'en prévaloir, quand bien même elle n'aurait pas atteint le plafond de réduction autorisé, témoignant d'une véritable démarche altruiste ... ou d'une volonté de couper court à toute polémique.

Les entreprises mécènes sont désormais tenues de déclarer auprès de l'administration fiscale, au-delà d'un seuil de 10 000 euros annuels, l'ensemble des dons consentis, ainsi que les organismes bénéficiaires et les éventuelles contreparties qu'elles reçoivent. Cette obligation, introduite par la loi de finances pour 2019, renforce le pouvoir de contrôle de l'administration et s'inscrit dans une logique d'une plus grande transparence.

Quelles sont les structures concernées ?

Seules les sociétés assujetties à l'impôt sur le revenu ou à l'impôt sur les sociétés et payant leurs impôts sur le territoire français peuvent prétendre à l'application de l'article 238 bis précité.

Les entreprises ayant leur siège sur le territoire de l'Union européenne pourront bénéficier d'une réduction d'impôt pour des dons faits à des organismes français, sous réserve que ces structures s'inscrivent dans les objectifs de sa propre législation. La réduction d'impôt ne sera pas celle prévue par l'article 238 bis du CGI, mais dépendra du dispositif prévu dans leur pays, s'il existe. Les entreprises mécènes dont le siège est situé hors de l'Union européenne ne sont pas éligibles au régime de faveur du mécénat français. Seules les éventuelles filiales françaises s'acquittant d'impôts en France bénéficient de ce régime.

Un coût pour l'Etat ?

A côté des entreprises, les particuliers se sont fortement mobilisés ainsi que, hors du cadre du mécénat, des collectivités publiques voire certains pays et villes étrangers. Sans ces soutiens, les travaux de reconstruction auraient largement été supportés par l'Etat. Dans cette perspective, il parait incongru de considérer que le mécénat, qui relève d'une démarche purement volontaire et facultative, engendre un manque à gagner pour l'Etat.

(1) le plafond de 10.000€ a été introduit par la loi de finances 2019 afin de favoriser le mécénat des TPE et PME

En savoir plus

Mathilde Delaunay, avocate Of Counsel au Cabinet Guillemin Flichy, conseille tous types d'acteurs du secteur non-lucratif (associations, fondations, fonds de dotation, etc.), sur l'ensemble de leurs problématiques juridiques et fiscales, ainsi que des entreprises, family offices et institutionnels dans la structuration juridique et fiscale de leurs projets d'intérêt général.

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