[Tribune] Anticiper la période de clôture annuelle : enjeux et bonnes pratiques
L'anticipation de la période de clôture comptable annuelle est un terme bien connu et une période de fortes mobilisations des directions comptables et financières. Celles-ci doivent arrêter un résultat comptable et déclarer par la suite un résultat fiscal. Attention, toutefois, car il existe des différences fiscalo-comptables qui méritent d'être soulignées.
L'exercice de clôture annuelle des comptes des entreprises peut s'avérer fastidieux. En substance, les entreprises arrêtent un résultat comptable et déclarent un résultat fiscal permettant de déterminer le montant d'impôt sur les sociétés dû. S'agissant du résultat fiscal, celui-ci est assis sur le résultat comptable ce qui implique que les obligations déclaratives dont relèvent les entreprises reposent sur la fiabilité des informations comptables mises à leur disposition. Ceci étant dit, il existe des différences fiscalo-comptables qui méritent d'être soulignées.
Résultat fiscal et obligations déclaratives
En effet, si les comptables arrêtent leurs comptes à la date de clôture statutaire, les fiscalistes composent avec la date légale de dépôt des liasses, laquelle oblige d'arrêter le résultat fiscal. En outre, s'il est possible de prolonger les travaux d'arrêté comptable au-delà de la date de clôture, il n'est pas possible de transposer ce raisonnement à un arrêté fiscal. Effectivement, ce dernier ne peut être prorogé après la date limite de dépôt des liasses, soit, en principe, dans les 3 mois après la date de clôture comptable ; au risque d'application d'intérêts de retard et une majoration de 10% pour retard de déclaration, systématiquement appliqués avec la digitalisation de la gestion des déclarations.
Processus et conformité fiscale
Ce délai de 3 mois entre la date de clôture et le dépôt de la liasse fiscale permet-il, en adoptant des process spécifiques, de dissocier l'arrêté fiscal de l'arrêté comptable ? A priori, la réponse doit être négative. Le résultat fiscal a besoin, lui aussi, d'être anticipé de sorte qu'il doit être nécessairement associé au process d'arrêté comptable. De surcroît, tel que rappelé ci-dessus, la détermination du résultat fiscal a pour base de départ le résultat comptable de l'exercice concerné. Partant, clôture comptable et arrêté fiscal s'avèrent être indissociables.
Pour aller plus loin, l'arrêté fiscal doit être vu comme situé dans une boucle dont le point de départ est constitué des écritures comptables et son point d'arrivée est l'écriture de charges et de dette d'impôt sur les sociétés. L'arrêté fiscal marque aussi le changement paradigme : si jusqu'au dépôt de la liasse fiscale, l'enjeu se porte sur le respect du délai de celui-ci, il est, au-delà de ce délai, question d'erreurs, inexactitudes ou omissions du résultat fiscal pouvant donner lieu à des pénalités pour insuffisance de déclaration. Ces dernières peuvent être vues comme la traduction fiscale du principe comptable d'image fidèle.
Exemples de conformité et indépendance des exercices
À titre d'exemples non exhaustifs, les dépenses somptuaires ne sont pas déductibles du résultat fiscal, sauf si les entreprises produisent des justifications dont la nature de celles-ci est spécifiée et commentée par l'Administration fiscale (CGI, art. 39-4 ; BOI-BIC-CHG-30-10 § n°60, 01/03/2017). Ainsi, il convient que l'entreprise dispose de factures et de tous les justificatifs nécessaires en comptabilité afin de limiter les risques de correction du résultat fiscal par l'Administration fiscale. Ainsi, la conformité fiscale dépend de la précision des écritures comptables. De même, des obligations déclaratives, telles que la déclaration pays par pays, reposent sur des données issues des comptes sociaux ou consolidés (750 millions d'euros de chiffre d'affaires combiné). La collecte et la fiabilité des données recueillies sont donc indispensables sauf à encourir des sanctions fiscales.
Enfin, en application du principe d'indépendance et d'annualité des exercices, les charges « constatées d'avance » (i.e celles qui interviendront au cours d'un exercice ultérieur), doivent être réintégrées extra-comptablement. A ce titre, il convient d'assurer une ventilation conforme des charges au moment de la clôture comptable. À cet effet, le hard-closing est une solution efficace car il permet de traiter des clôtures intermédiaires et de résoudre au fur et à mesure les difficultés comptables éventuelles de sorte que la clôture annuelle soit fluide et rapide. L'adoption du process de hard-closing par les directions fiscales devrait constituer une opportunité car, contrairement à une idée selon laquelle les fiscalistes n'interviennent qu'à la date de clôture de l'exercice, ils restent en éveil et attentifs à l'activité de l'entreprise tout au long de l'année.
Les auteurs : Emmanuel Aubin, avocat associé, et Livia Salvagno-Gaslain, avocate au sein du cabinet Alister Avocats Aarpi.
Lire aussi : Le digital au secours des DAF
Sur le même thème
Voir tous les articles Fonction finance