Performance des achats : aller au-delà du budget pré-défini, des coûts évités et du TCO
Daf et directeur achats sont rarement d'accord sur la mesure de la performance achats. D'où la nécessité pour le Daf de s'ouvrir à la culture achats et de faire preuve de pédagogie. Langage, famille d'achats, indicateurs, suivi, outils, on vous explique comment y parvenir. En bonus, un cas pratique!
" D'une entreprise à l'autre les achats peuvent être plus ou moins importants. Mais ils représentent souvent jusqu'à 50 voire 60% du chiffre d'affaires et il n'est pas rare qu'ils participent à 70% du coût de revient ", rapporte François Gautier, directeur du pôle Achats de Karistem. D'autres experts parlent même de 50 à 80% du chiffre d'affaires liés aux achats. Quel que soit le chiffre exact, l'impact des achats sur le résultat, et donc sur la performance des entreprises, est conséquent. Et c'est de plus en plus le cas : les entreprises préfèrent désormais se concentrer sur leur coeur de métier et déléguer le reste à des prestataires. Le pilotage de la performance des achats ferait d'ailleurs partie du Top 3 des priorités de progrès pour 64% des CFO et 41% des CPO (étude Synapscore, novembre 2015). Pourtant, le pilotage de leur performance est encore imparfait. Souvent limité au respect du budget pré-défini, s'étendant parfois aux coûts évités ou dans le meilleur des cas au TCO, le calcul de la contribution des achats à la performance de l'entreprise ne sait pas sur quel indicateur danser. C'est au Daf de mettre en place, en collaboration avec la direction achats, une méthodologie et des indicateurs qui rendent compte de l'apport réel des achats au résultat de l'entreprise.
Trouver une sémantique commune
Si le pilotage de la performance des achats n'est pas correctement mené au sein des entreprises, ce n'est pas une question de volonté. Mais bien une question de méthodologie à trouver : il n'est en effet pas facile d'évaluer quels sont les apports réels des achats. Si les coûts directs récurrents peuvent permettre d'estimer la performance des achats d'une année à l'autre, c'est une autre affaire quand on parle de coûts indirects ou non récurrents. Et un grand nombre de paramètres peuvent échapper au contrôle des acheteurs : augmentation de la consommation malgré les prix négociés, utilisateurs qui préfèrent un prestataire avec lequel la direction achats n'a pas d'accord, évolution du prix des matières premières... " Nous assistons à un éternel désaccord entre la direction financière et les achats : le directeur achats présente des gains que le Daf dit ne pas retrouver dans le bilan ", indique Richard Caron, président-fondateur de Meotec.
Le fait de réduire la marge de 5 à 2% est considéré comme une performance économique pour l'acheteur alors que le Daf veut voir un impact dans l'EBITDA ou dans le cash. " En général cela reflète un problème de sémantique commune à la direction financière et à la direction achats. Il faut donc mettre en place une sémantique et une mesure commune ", conseille Luc Agopian, directeur associé en charge de l'offre " Performance Achats" chez Capgemini Consulting.
Une sémantique commune qui passe par des indicateurs et des règles définis ensemble. Ce qui exige que des achats et finances se rencontrent régulièrement. Patrick Scholler, associé du cabinet Synapscore, conseille d'organiser des réunions de manière mensuelle, trimestrielle et annuelle. " Les réunions mensuelles permettent d'analyser les résultats opérationnels, d'en observer les écarts et les tendances afin de décider de manière réactive d'actions à court terme ", décrit-il. C'est aussi l'occasion de se pencher sur les risques et les tendances : évolution du marché, pénurie, offre excédentaire, évolution des monnaies, coût de l'organisation par rapport au budget... " La revue annuelle sert quant à elle à regarder le passé et le futur : performance de l'année écoulée, réduction de coûts ajustée à l'érosion des marchés, etc mais aussi les projets de réduction des coûts pour l'année suivante ", poursuit Patrich Scholler. Les réunions trimestrielles permettent de pointer les écarts sur les projets définis pour l'année en cours et de faire une revue catégorie par catégorie : évolution du marché, coûts définis et réels, tendances lourdes du marché...
"Le Daf doit faire un effort pour s'intéresser à des données extra-comptables comme la notion de qualité", Florent Labey, associé chez Althéa
Florent Labey, associé chez Althéa en charge de l'offre à destination des directions financières, rapporte le cas d'entreprises qui détachent des contrôleurs de gestion au sein de la direction achats afin de faciliter les remontées d'informations et l'analyse des indicateurs. Et surtout la compréhension mutuelle des enjeux et de la vision de chacun. " Le Daf doit faire un effort pour s'intéresser à des données extra-comptables comme la notion de qualité. C'est important qu'il s'acculture à la performance achats. Et inversement : le directeur achats doit acquérir des notions financières ", pointe-t-il. Si le TCO et les coûts de non qualité doivent parler aux Daf, le BFR et l'EBITDA doivent être suivis par les achats. " La négociation sur les délais de paiements est importante alors qu'elle est souvent laissée de côté par la direction achats ", ajoute Cédric Guillouet, partner achats chez Althea. Le Daf doit donc faire preuve d'ouverture pour s'acculturer aux achats et de pédagogie pour expliquer ses propres indicateurs.
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