La CSRD, une réglementation lourde qu’il faut prendre le temps de digérer
Adaptation de la gouvernance, constitution de nouveaux binômes, collecte et priorisation des données…. Plusieurs directeurs administratifs et financiers se sont réunis le 22 novembre dans le cadre du Cercle des DAF pour préparer et mettre en œuvre la directive européenne CSRD.
Depuis plusieurs mois, impossible pour les directions administratives et financières de passer à côté de la directive européenne CSRD (Corporate Sustainability Reporting Directive. Une nouvelle disposition réglementaire exigeante et complexe, qui vise à harmoniser les reportings de durabilité des entreprises et à améliorer la disponibilité et la qualité des données publiées. Pour discuter de ce sujet d’actualité, plusieurs DAF se sont réunis au Ritz le 22 novembre dernier, dans le cadre du Cercle des DAF.
Un grand nombre d’entreprises –plus de 50 000 sont visées des PME de 250 salariés aux entreprises cotées de plus de 500 personnes- devront ainsi suivre des normes européennes de reporting de durabilité obligatoires et publier des informations détaillées sur leurs risques, opportunités et impacts matériels en lien avec les questions sociales, environnementales et de gouvernance.
Digérer la réglementation et adapter la gouvernance
Compte tenu de la nouveauté, la complexité, et la densité des nouvelles obligations introduites par la CSRD, une analyse approfondie des textes constitue la première étape essentielle dans leur mise en œuvre, pour s’assurer de la bonne compréhension des nombreuses obligations de publication (nature des informations qualitatives et quantitatives attendues…). « Il y a beaucoup de narratif. J’essaie donc de digérer toute cette norme assez vaste et de comprendre dans un premier temps si les filiales de notre groupe vont être impactées par cette norme », confie Estelle Pecqueux, directrice administrative et financière au sein de Kantar Media, leader des études et analyses médias. La seconde étape repose sur l’adaptation des mécanismes de gouvernance afin de pouvoir faire face aux nouvelles exigences de cette réglementation. « Le sujet doit être traité aux plus hauts niveaux de l’entreprise. J’ai commencé à en discuter au Comité de Direction car c’est un sujet d’entreprise. Cette directive va permettre aux salariés de travailler ensemble. Ce reporting permet de comprendre nos impacts, nos risques, de définir des KPI commun. J’ai en parallèle pris contact avec quelques-uns de nos plus gros clients afin d’échanger avec eux sur le sujet. Ceci nous offre la possibilité de nous benchmarker et de nous aider à définir ce qui est le plus pertinent », ajoute Estelle Pecqueux.
S’organiser pour travailler en mode projet
D’autres entreprises, comme le groupe Salins ont constitué de nouveaux binômes en interne. L’objectif ? Décloisonner les équipes afin d’impliquer différents services et acteurs. « La direction industrielle et la direction des ressources humaines vont définir les KPI avec une animatrice RSE récemment embauchée. La direction financière va œuvrer en final », détaille Philippe Gaudron, DAF du groupe Salins, spécialisé dans la production du sel de mer, qui compte 2100 salariés.
La société Innovafeed de 350 salariés, spécialisée dans les procédés d’élevage et de transformation d’insectes, a quant à elle déjà construit une gouvernance appropriée. Une étape déterminante afin de former, cibler les priorités, transformer ou construire les processus, sélectionner les outils nécessaires afin d’automatiser et fiabiliser les données, ainsi que définir et mettre en œuvre les plans d’action. La Chief Impact Officer et la direction financière œuvrent depuis deux ans de concert pour créer des process communs, identifier et quantifier les informations internes, et s’assurer que la donnée remontée est bien structurée. « Nous avons mis en place un fichier centralisé, qui est alimenté à des dates définies à l’avance par plusieurs personnes issues de différents services. En plus des chiffres, nous devons renseigner un dossier source pour retracer l’information, qui concerne aussi bien la gouvernance que les tonnages de CO2 économisés », explique Alexandre Schultheiss, Financial Controlling Director au sein d’Innovafeed, qui envisage de publier son premier rapport d’impact début 2024.
Constituer les données tout en prenant en compte l’existant
La constitution, la collecte et la fiabilisation des données constituent également des étapes importantes à anticiper. Ces questions pouvant impliquer une adaptation plus ou moins conséquente des outils et des canaux de reporting, ou un changement organisationnel. Pour analyser l’écart entre les informations publiées aujourd’hui et les obligations de reporting, certaines directions financières ont décidé de faire appel à un cabinet externe. « Un cabinet d’expertise comptable et de commissaire aux comptes va dresser un état des lieux des données déjà publiées, identifier les sujets à approfondir afin de respecter les KPI et d’éviter de faire les choses en double. Notre objectif étant de s’en sortir par rapport à l’existant, tout en respectant cette réglementation », rapporte Corinne Moreira, DAF du groupe de communication la Phratrie. Cette étape d’analyse d’écarts donnera ainsi une vision globale des marches à franchir.
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