EPM et transformation de la fonction finance : promesses tenues ?
La transformation est au coeur des préoccupations de la fonction Finance. Pour l'accompagner, pléthore d'outils de pilotage de la performance à appréhender et comprendre cohabitent. En fonction de la taille de l'entreprise et des exigences du management, des recettes éprouvées existent. Voici un aperçu.
Depuis plusieurs années, la transformation digitale est au coeur de la fonction finance. Elle a été présentée comme un tournant que devait prendre toute entreprise quelle que soit sa taille ou son secteur pour s'assurer un avenir pérenne. Les promesses faites sont : agilité, efficacité, adaptabilité et la fin d'Excel pour certains... Après plus de 30 années d'existence, quel premier bilan peut-on établir de ces outils : les promesses sont-elles tenues ? S'agit-il d'une révolution ou d'une évolution tant attendue de la fonction finance sur les processus, la data et les rôles ?
Les solutions de transformation de la fonction Finance, quelles exigences ?
Les ERP (Entreprise Resource Planning) ou système de planification des ressources d'entreprises ont en précurseurs, bouleversé la finance d'entreprise sans pour autant réussir à répondre à toutes les problématiques de la fonction finance. Son pendant (complément) Excel a séduit mais reste indissociable des erreurs possibles et du manque de flexibilité.
Les EPM (Entreprise Performance Management) se présentent comme un relais pour pallier les défauts des premiers et faciliter la vie de la fonction finance.
Les outils EPM vont donc plus loin. Ils permettent de mieux piloter l'activité future (budget, estimé, plan) en se basant sur la stratégie de l'entreprise et un réel plus fiable. Car le traitement du réalisé a également changé.
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On n'attend plus du contrôleur une " simple " production des chiffres suivie d'une analyse trop brève mais de piloter l'activité financière dans des délais de plus en plus courts voire en temps continu. Ce qui exige d'allier Fast & Quality Close. Fast close car les délais de clôture ont été considérablement réduits pour répondre aux nécessités d'une économie de plus en plus globalisée. Ils passent de J+34 à J+7(1) en moyenne voire moins...sans réduire la qualité des données et des projections. Témoins d'une accélération des exigences de la finance.
L'EPM devait également rendre les processus prévisionnels (budget et forecast) plus fiables et rapides en évitant les échanges de mails et les fichiers Excel. Ainsi, les règles de gestion sont modélisées, centralisées et partagées par tous.
Ce qui signifie que les processus prévisionnels sont alignés sur le plan stratégique, permettent d'appliquer cette stratégie et de maximiser l'utilisation des ressources. La méthodologie utilisée bottom up et/ou top down au niveau groupe est harmonisée et les services de l'entreprise décloisonnés. Ce qui contribue à également gagner du temps et à unifier les process. Cependant, cette capacité est peu utilisée aujourd'hui et ce décloisonnement tarde à venir en pratique et dans les mentalités.
L'EPM : la rupture ?
Ce tableau semble idyllique mais réalisable si la modélisation des données, des processus et l'urbanisation sont réfléchies et taillées sur mesure. Chaque entreprise, de par sa spécificité, doit avoir des outils qui lui sont adaptés et challengés en fonction de ses attentes et de ses perspectives futures. Pour cela le management et les opérationnels doivent être impliqués dans le projet car la finalité de l'outil est aussi de repenser la communication entre eux. C'est aussi une fonction que sont supposées remplir les solutions EPM.
S'agissant de la communication vers le top management, l'EPM s'impose comme une rupture / révolution. Désormais sur tablette, PC ou même pour les plus avancés un digital boardroom ou des outils BI, managers et dirigeants peuvent consulter les données en temps réel des entités proches ou éloignées géographiquement et demander des comptes.
L'EPM a ainsi contribué à changer les habitudes de la fonction finance : elle est devenue globale, exigeante et unifiée. On voit de plus en plus de demande de solutions core model déclinées dans les filiales internationales dans des temps records pour répondre à ce besoin d'internationalisation et à des processus unifiés.
Dans une étude conjointe de PwC et DFCG de 2017, la transformation de la fonction finance est vue comme la combinaison du numérique, du capital humain et de l'internationalisation*.
Si on coche numérique et internationalisation, il reste le capital humain qui se met petit à petit au pas. Ce critère est également considéré comme un des cinq facteurs de réussite d'une transformation digitale selon le BCG(2).
Une nécessité comprise par les CFO et leurs collaborateurs. Pour preuve, 47% des directeurs financiers des grandes entreprises(3) recherchent des profils avec des compétences numériques et 45% dans les PME et ETI privilégient des connaissances en exploitation et interprétation des données(4).
On demande donc aux financiers une maîtrise du contenu fonctionnel des solutions en plus des solutions elles-mêmes alors qu'on ne leur demandait auparavant que des compétences métier.
Face aux succès rencontrés, les financiers sont devenus en partie les VRP des solutions EPM en interne si bien qu'elles se sont étendues à d'autres fonctions que la finance : performance humaine, logistique... Pilotage de l'entreprise dans sa globalité et sa singularité.
Il faut cependant nuancer ce tableau idéalisé. Même si les outils EPM sont performants, Excel n'est pour autant pas mort et reste une alternative pour certaines analyses ponctuelles : 61% des cadres financiers interrogés déclarent être dépendants des tableurs pour les clôtures mensuelles(5) ... alors même que cela contribue fortement à les ralentir en fin du mois.
Dans les faits, Excel même avec les risques d'erreurs rassure et plusieurs solutions telles que Anaplan, Tagetik, Onestream ou PBCS s'en inspirent avec la sécurité, la fiabilité, les workflows et l'automatisation des tâches en plus.
La recette d'une transformation digitale réussie
Pour réussir sa transformation digitale, il faut tout à la fois, maitriser le processus, la data, l'organisation, la solution et la stratégie, et s'assurer d'un cocktail réussi entre solutions EPM, Excel et un contrôle financier qui maitrise le tout. Il faut également une répartition claire des fonctions entre l'EPM, Excel et les autres systèmes de pilotage (BI, datavisualisation, datamining) ou opérationnels (ERP, SI amont), ceci dès la phase de cadrage et du choix de solution. Il est par conséquent important de prendre le temps de la réflexion et de la mise en place, seuls vecteurs d'une transformation réussie et révolutionnaire.
De nouveaux changements dans la digitalisation de la fonction finance sont en cours comme l'EPM augmenté évitant la multiplication des outils nécessaires à la mise en place d'une application de pilotage de la performance ou comme l'IA, l'analyse prédictive la RPA pour notamment automatiser les tâches les plus rudimentaires et permettre au contrôleur de se focaliser sur l'analyse pure, véritable valeur ajoutée pour le pilotage de l'entreprise. Il va être intéressant de voir comment la fonction finance en sera de nouveau enrichie.
Pour en savoir plus
Adama Bayo-Moulinet est Advisory Senior Manager chez Konvergence Business Services. Elle accompagne les directions financières sur tous les sujets de transformation de la fonction finance : du pilotage de la performance à la conduite du changement.
[1] Comment réduire encore ses délais de clôture, Option finance, 9 janvier 2017, délai entreprise du CAC40, https://www.optionfinance.fr/entreprise-finance/comment-reduire-encore-ses-delais-de-cloture.html
Lire aussi : Le digital au secours des DAF
[2] The Five Rules of Digital Strategy, Mai 2019, https://www.bcg.com/fr-fr/publications/2019/five-rules-digital-strategy
[3] CA > 1 500m€ et > 5000 employés
[4] Priorités 2019 du Directeur Financier Acteur de la croissance, PWC et DFCG, Etude réalisée sur 300 directeurs financiers, https://www.pwc.fr/fr/publications/fonction-finance/priorites-2020-des-directeurs-financiers.html
[5] Etude réalisée par Blackline et l'IMA fin 2016, dévoilée en juillet 2017, DAFMag, 18 juillet 2017, Infographie Clôture financière : les tableurs ralentissent-ils le processus ? https://www.daf-mag.fr/Thematique/business-intelligence-1244/Infographies/Combien-de-temps-prend-une-cloture-comptable--319409.htm
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