Compliance due diligence : l'impact de la conformité des cibles lors des opérations de croissance externe
Publié par Robin Lesage et Caroline Leblanc, Duff & Phelps le - mis à jour à
L'évaluation de la conformité des cibles lors des opérations de croissance externe permet de maîtriser les coûts et de maximiser le ROI en fournissant une meilleure visibilité à l'acquéreur sur les efforts de mise en conformité à venir et les risques de l'opération.
Dans le cadre d'un processus de croissance externe, parmi les chantiers de due diligence qui peuvent être engagés, les compliance due diligences, et notamment l'évaluation des dispositifs de conformité des cibles, doivent être envisagées. Toutefois, ces vérifications ne représentent pas une exigence du droit et ne sont donc que rarement effectuées.
Un point d'attention accru des régulateurs
Le pilier de la loi Sapin 2 concernant les procédures d'évaluation des tiers précisé à l'article 17 n'aborde pas ces opérations de croissance externe. L'Agence Française Anticorruption (AFA), dans ses lignes directrices publiées en décembre 2017, n'en fait pas mention non plus pour ce qui a trait à ce pilier. En revanche, depuis avril 2019, l'AFA a lancé une consultation publique sur un guide pratique portant sur Les vérifications anticorruption dans le cadre des fusions-acquisitions, démontrant l'importance accordée à ce sujet par le régulateur.
La croissance externe : un choix stratégique
Cet aspect de l'évaluation des tiers apparaît incontournable lorsqu'un acquéreur désire maîtriser les coûts de la phase d'intégration de la cible. Ces coûts devant être pris en compte dans le coût global de l'opération étant donné que la mise place d'un programme de conformité est un exercice qui peut être onéreux. En effet, la réalisation d'une opération de croissance externe est plus engageante que le choix d'un nouveau partenaire d'affaire avec qui la relation peut être plus facilement rompue si des faits de corruption étaient avérés.
Une approche par les risques et pragmatique
Prenons l'exemple du programme anticorruption. Il est critique d'adopter une approche par les risques afin de déterminer la nature et l'étendue des procédures de vérification (ou simplement de leur pertinence). Une première étape serait de se pencher sur le profil de risque de l'acquéreur. Par exemple, s'il n'est pas encore dans les seuils de l'article 17 de Sapin 2, est-ce que l'acquisition de la cible la lui ferait atteindre ?
La deuxième étape de l'analyse de risque de non-conformité serait de se pencher sur le profil de risque de la cible. Par exemple, est-elle est soumise à Sapin 2 ? A-t-elle un dispositif de prévention de la corruption en place ? Dans quelle(s) industrie(s) évoluent-t-elles ? Dans quels pays est-elle implantée ?
En revanche, il ne faut pas oublier que le fait de ne pas être soumis à Sapin 2 n'empêche pas que les risques de corruption sont plus prévalents dans certaines industries ou certains pays : une compliance due diligence peut être malgré tout nécessaire selon le contexte. Même si la présence d'un programme anticorruption n'atténue pas complètement les risques que des faits de corruption soient commis, il participe pleinement à atténuer ces risques et démontre un engagement des dirigeants.
De plus, une fois l'opération de croissance externe réalisée, l'acquéreur devra assumer les conséquences pénales de faits de corruption qui perdureraient suite à la transaction et éventuellement celles de faits de corruption antérieurs à cette dernière. Il convient donc pour les acquéreurs s'engageant dans une démarche croissance externe d'effectuer une évaluation des programmes de conformité en place.
Une vision globale de la conformité de la cible
Au-delà de l'anticorruption, les compliance due diligences permettent de couvrir d'autres enjeux, tel que la protection de la vie privée. Les facteurs de risque concernant le RGPD sont différents et, surtout, toutes les organisations sont soumises au RGPD en Europe. Il faut donc appréhender la conformité globalement. Par ailleurs, maîtriser les risques permet de maîtriser les coûts de l'opération de croissance externe.
En conclusion, il est préférable d'investir en amont d'une transaction afin de bien connaître la cible, d'appréhender les enjeux de conformité et d'apprécier plus justement le coût global de l'opération, que d'engager des dépenses importantes et inattendues suite à un contrôle du régulateur ou lors de découverte de non-conformités importantes qui diminuerait le ROI global de l'opération.
Pour en savoir plus
Caroline Leblanc, Director Compliance & Regulatory Consulting chez Duff & Phelps, possède plus de 15 ans d'expérience, en France et au Canada, dans les domaines de la conformité réglementaire et du conseil et de l'audit des technologies de l'information. Elle dispose d'une solide expertise en criminalité financière, en protection des données à caractère personnel ainsi qu'en contrôles internes informatiques exercés sur l'information financière.
Robin Lesage, Managing Director, Transaction Advisory Services chez Duff & Phelps, s'appuie sur sa vaste expérience en matière de due diligence financière pour assister un grand nombre de sociétés en France et dans le monde, dans le cadre de projets d'acquisition et de vente. Il a également une connaissance approfondie des mécanismes d'ajustement des prix d'achat.