[Tribune] L'avenir du Daf se dessine-t-il uniquement en 2.0?
Recruter en finance d'entreprise est un métier presque à part dans le recrutement. Du top au middle management, le marché est en tension sur quasiment tous les métiers de la direction financière au contrôle de gestion, car les profils sont à la fois rares et discrets.
Face à cette difficulté de recrutement et à l'accroissement des données devant être analysées par les directions financières, petites et grandes entreprises réfléchissent à l'amélioration de la productivité de ces départements clés de l'entreprise. En fort développement depuis quelques années, les fintech sont très souvent présentées comme la solution miracle. Le sont-elles vraiment? Probablement pas, au même titre que le recrutement 2.0 n'a pas permis dans l'absolu aux recruteurs de se désengager complètement du sourcing des candidats afin de se consacrer entièrement aux entretiens et au suivi des candidats.
Nous vivons en effet actuellement avec les fintech un engouement similaire que ce nous avons vécu il y a une dizaine d'années avec le recrutement 2.0. La question posée reste la même: comment dégager du temps pour des actions à plus forte valeur ajoutée pour l'entreprise? Si la fintech propose de nombreuses solutions facilitant la vie des directrices et directeurs financiers, il ne faut pas les louer à l'excès mais bien considérer certaines de leurs limites.
Les opportunités et les menaces des fintech ne sont pas exactement les mêmes pour les directions financières de grands groupes ou de PME. Si les Daf des petites et moyennes structures ont vu dans l'externalisation par la robotisation de toute une partie de leur comptabilité (bien souvent délocalisée vers des plateformes partagées à l'étranger), une solution rapide et simple à l'absence de compétences comptables dans leurs équipes, elles se sont très souvent heurtées aux différences culturelles empêchant parfois la rectitude.
Quand le Daf hyper spécialisé réduit ses perspectives de carrière
Les grands groupes, confrontés quant à eux à l'accroissement exponentiel des données à analyser par leurs services financiers, ont perçu dans la fintech un moyen de dégager du temps pour leurs directrices et directeurs financiers afin de les orienter vers des tâches à plus forte valeur ajoutée pour l'entreprise. Les menaces pour les Daf consistent là essentiellement en l'hyper spécialisation. Le Daf doit alors, pour sa carrière, faire attention à ne surtout pas devenir un simple producteur ou analyste de chiffres mais un business partner.
Dans un grand groupe, il est en effet attendu du Daf qu'il décharge le directeur général de nombreux points de difficultés. Il doit être en capacité de sortir les données stratégiques pour l'entreprise certes, mais il doit surtout être en capacité de comprendre ces chiffres en prenant compte de leurs interactions avec le business de l'entreprise et l'environnement juridique, fiscal, règlementaire ou encore social dans lequel elle évolue. Les algorithmes doivent ainsi être considérés comme un soutien et aucunement l'avenir ultime du Daf, sous peine de perdre ce rôle de conseil essentiel.
Dans les grands groupes à forte croissance, la démultiplication des données accessibles et/ou à analyser mènent parallèlement à une surspécialisation des fonctions de la direction financière. Le Daf devra alors faire attention à ne pas réduire ses perspectives de carrière, à rester à l'affût des évolutions juridiques, fiscales et sociales pour un jour évoluer et prétendre devenir, à terme, le bras droit du dirigeant.
L'avenir du Daf se jouera ainsi davantage dans son rôle de conseil et dans sa capacité à conserver son ultra-compétence au fil de son parcours et de l'évolution de nos modes de travail!
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