« La CSRD, un véritable projet d'entreprise », Edwige Rey de Forvis Mazars
Publié par Eloise Cohen le | Mis à jour le
Invitée lors de la Matinale CSRD, organisée par la marque média Daf-Mag, Edwige Rey, associée chez Forvis Mazars, décrypte les enjeux de la CSRD. Entre nouvelles normes, collaboration inter-équipes et reporting structuré, les entreprises françaises doivent surmonter des défis stratégiques pour répondre à ces exigences réglementaires et valoriser leur performance durable.
La CSRD (Corporate Sustainability Reporting Directive) redéfinit les standards de transparence des entreprises en matière de durabilité. Invitée à la Matinale CSRD, organisée par la marque média Daf-Mag, Edwige Rey, associée chez Forvis Mazars et experte en développement durable, a livré sa vision, celle d'une directive constituant un tournant stratégique. Il faut dire que jusqu'à présent, le reporting extra-financier était peu encadré. « Les entreprises publiaient souvent ce qu'elles voulaient », rappelle Edwige Rey. A l'inverse, la CSRD introduit des normes strictes (ESRS) qui imposent une précision accrue. Ce changement ne concerne pas seulement la communication mais touche aussi à la gouvernance. « Les boards et comités exécutifs devront intégrer ces enjeux, une première pour beaucoup d'entre eux », ajoute-t-elle.
Course contre la montre
La France a transposé la directive rapidement, devançant de nombreux pays européens. Un calendrier serré qui pose des défis : « Les entreprises doivent publier leur premier rapport au 31 décembre. Cela implique d'intégrer les normes en un temps record ». Selon le baromètre Forvis-Mazars 2024, l'attentisme domine, une surprise pour l'experte. « Nous étions habitués à ce que les entreprises françaises anticipent ce type de règlementation. Mais cette fois, seules quelques-unes ont amorcé leur transition. »
Double matérialité essentielle
La clé pour réussir réside dans une analyse de double matérialité, estime Edwige Rey. Cet exercice identifie les impacts environnementaux et sociétaux, mais aussi les risques financiers. « C'est la première étape pour définir les priorités et construire une feuille de route », conseille-t-elle. Elle met en garde contre une précipitation à cocher toutes les cases réglementaires. « Un rapport mal préparé peut nuire à l'image de l'entreprise. Il vaut mieux progresser étape par étape et démontrer des avancées tangibles », souligne-t-elle.
La CSRD pousse les directions financières (DAF) à collaborer avec les équipes RSE, une tâche délicate. « Ces deux mondes ont des cultures très différentes. Le succès repose sur des sponsors dans chaque équipe et une gestion de projet rigoureuse », analyse Edwige Rey. Elle plaide également pour recruter ou former des profils hybrides : « Les DAF doivent intégrer des collaborateurs ayant une appétence pour la RSE, tout en s'appuyant sur leurs compétences normatives. »
Des opportunités à saisir
Malgré ses exigences, la CSRD offre des bénéfices stratégiques. Pour Edwige Rey, elle permet de valoriser les engagements des entreprises et de rassurer les investisseurs. « C'est l'occasion de démontrer une maturité environnementale et sociétale, essentielle dans un contexte de financement durable. »
Même si les petites entreprises ne sont pas directement soumises à la CSRD, elles subiront des pressions de leurs donneurs d'ordre. « Les grandes entreprises vont demander des informations précises à leurs fournisseurs, notamment sur leurs émissions carbone », prédit Edwige Rey.
Enfin, Edwige Rey souligne que la CSRD pousse les DAF à transformer leurs pratiques, voire leur rôle. « Certains DAF, motivés par la performance durable, pourraient élargir leurs missions pour piloter une performance globale intégrant la RSE », conclut-elle.
La CSRD marque une révolution dans le reporting d'entreprise. Si elle impose des contraintes significatives, elle offre aussi une opportunité de valoriser les engagements durables. En s'adaptant rapidement, les entreprises françaises peuvent se positionner comme des leaders en matière de transparence et de durabilité.