Management packages et réforme 2025 : que retenir pour les Daf ?
Publié par Christina DIEGO le - mis à jour à
La loi de finances pour 2025 a introduit une meilleure lisibilité de l'imposition des management packages, tout en encadrant le dispositif pour les bénéficiaires. Quels impacts pour les directeurs financiers d'entreprise ? Explications.
Le management packages est un dispositif permettant d'associer les dirigeants et cadres stratégiques à la performance de leur entreprise. Il prend la forme d'attributions d'actions, de stock-options ou de bons de souscription, et constitue un levier de motivation puissant, notamment dans les contextes de LBO (Leverage Buy-Out) ou de startups en forte croissance. Cependant, sa fiscalité a toujours été sujette à des requalifications par l'administration fiscale, créant des incertitudes pour les bénéficiaires.
La loi de finances pour 2025 introduit un nouveau cadre réglementaire plus strict avec l'ajout de l'article 163 bis H du Code général des impôts, visant à clarifier et harmoniser l'imposition des gains issus de ces dispositifs. Cette réforme vise à réduire les stratégies d'optimisation fiscale et à aligner l'imposition des managers sur celle des autres salariés. Décryptage.
Quels dispositifs sont impactés par la réforme ?
Le management packages regroupe plusieurs instruments financiers, dont certains seront particulièrement affectés par la réforme :
-Les Stock-options (SOP) : Achat d'actions à prix préférentiel.
-Les Actions gratuites (AGA) : Attribution sous conditions de performance.
-Les Bons de souscription de parts de créateurs d'entreprise (BSPCE) : Réservés aux startups pour attirer des talents.
-Les actions ordinaires ou préférentielles : Acquisition directe avec des conditions spécifiques.
-Les titres acquis dans un LBO : Structuration d'intéressement pour les dirigeants de sociétés sous LBO.
Que prévoit la réforme du PLS 2025 ?
La réforme s'inscrit dans un contexte où les contentieux fiscaux se sont multipliés ces dernières années. Jusqu'à présent, les gains réalisés dans le cadre d'un management packages pouvaient être considérés soit comme des plus-values mobilières, soumises à la flat tax de 30 %, soit comme des traitements et salaires, soumis au barème progressif de l'IR et aux charges sociales.
Par le passé, il y a déjà eu des décisions du Conseil d'État en 2021 sur ce sujet sensible. En effet, la haute juridiction a tranché en faveur de l'administration fiscale, requalifiant certains gains en rémunération plutôt qu'en plus-value. Ensuite, une volonté d'éviter l'optimisation fiscale abusive. Certains montages permettaient d'échapper à l'imposition salariale en bénéficiant d'un régime fiscal plus avantageux. Enfin, l'harmonisation des règles pour sécuriser les entreprises et les bénéficiaires permet de rendre prévisibles les modalités d'imposition des management packages et d'éviter les requalifications a posteriori. « Depuis plusieurs mois, nous plaidons en faveur d'une réforme du régime fiscal des management packages. Une première tentative avait été introduite dans la précédente loi de finances, mais elle n'a pas abouti. Une clarification était nécessaire pour encadrer ce dispositif et offrir davantage de sécurité juridique », indique Dorothée Chambon, fiscaliste au cabinet Osborne Clarke.
Les nouvelles règles fiscales en 2025
Avec la réforme fiscale des management packages en 2025, le gouvernement souhaite mettre fin aux incertitudes et aux optimsisations fiscales excessives. Cette nouvelle législation, bien que sécurisant le cadre fiscal, alourdit la charge fiscale des dirigeants et réduit l'attractivité des dispositifs existants. « La réforme impacte fortement le secteur du LBO, notamment en ce qui concerne le management packages structurés avec un effet de levier. Le risque de requalification en salaire s'applique uniquement aux gains dépassant le ratio de performance financière. Les actions ordinaires, ne générant pas de levier, échappent à ce risque, à condition d'être détenues au moins deux ans pour bénéficier du régime des plus-values », précise la juriste.
Avant, ces instruments bénéficiaient d'une imposition souvent favorable (plus-values mobilières à 30-34 %). Désormais, la majorité des gains issus des management packages sera imposée comme une rémunération, avec une fiscalité incluant l'impôt sur le revenu et les cotisations sociales, accompagné, le cas échéant, de la contribution exceptionnelle sur les hauts revenus ainsi qu'une nouvelle contribution sociale de 10 %, portant ainsi le taux global de prélèvements fiscaux et sociaux à 59 %.
Quelles conséquences pour les entreprises et les Daf ?
Le Daf joue un rôle clé dans la structuration des management packages. « Outre qu'il en est lui-même bien soumis bénéficiaire, son rôle est central. Il sera évidemment impliqué dans le travail d'évaluation de la valeur réelle de la société émettrice, sans que l'on sache d'ailleurs à date qui portera, in fine, la responsabilité de la valeur retenue », détaille la juriste. Un travail qui devra être fait avec rigueur, « au moment de l'attribution ou de l'acquisition/souscription des outils, au moment de leur cession et même potentiellement à l'occasion d'opérations, tels les apports de titres dans l'hypothèse où une partie du gain est traitée en salaires », ajoute-t-elle.
Le Daf déploie des outils de suivi pour mesurer la performance, dont le niveau conditionne le package. « Nul doute qu'il jouera un rôle majeur dans la surveillance du ratio de performance financière nouvellement défini. Il peut en outre être amené à modéliser différents scénarios dits de « ratchet » (mécanismes permettant d'augmenter le niveau de participation) pour évaluer leur impact sur la valorisation de la société et leur effet dilutif », indique Dorothée Chambon.
Autre conséquence, une réduction de l'attractivité des management packages est à craindre, nécessitant une refonte des politiques de rémunération. « Dorénavant, lorsque nous structurerons un management package, la première question que nous devrons nous poser sera celle de savoir si les gains attendus sont susceptibles d'être considérés comme acquis en contrepartie de la qualité de salarié ou de dirigeant. En cas de réponse négative, la réforme ne s'appliquera pas. En revanche, si le gain constitue une contrepartie aux fonctions exercées, alors la réforme fiscale et sociale s'appliquera pleinement, ce qui ne condamne toutefois pas tous les outils dits d'intéressement au capital », souligne la juriste.
Comment les DAF peuvent-ils anticiper ces changements ?
Les directeurs financiers peuvent mettre en place des stratégies d'adaptation pour les entreprises, notamment la structuration des packages de rémunération en intégrant d'autres formes d'avantages (participation, intéressement, bonus différés). Ils pourront également mieux encadrer les clauses de détention des titres pour maximiser les chances de bénéficier du régime des plus-values. Dans tous les cas, leur rôle implique qu'ils puissent anticiper l'impact fiscal et social dans les prévisions budgétaires des entreprises concernées. Pour ce faire ils devront travailler en étroite collaboration avec des fiscalistes et experts-comptables pour limiter les risques de redressement fiscal.
Pour Dorothée Chambon, dorénavant, le travail juridique en amont de structuration d'un management packages devra s'assurer « si les gains attendus sont susceptibles d'être considérés comme acquis en contrepartie de la qualité de salarié ou de dirigeant. En cas de réponse négative, la réforme ne s'appliquera pas. En revanche, si le gain constitue une contrepartie aux fonctions exercées, alors la réforme fiscale et sociale s'appliquera pleinement, ce qui ne condamne toutefois pas tous les outils dits d'intéressement au capital ». Le lien entre le gain réalisé et la qualité de salarié ou dirigeant étant désormais assumé sans pour autant que toute la plus-value souffre une imposition suivant le régime des salaires, « des opportunités de structuration efficace existent », conclut-elle.