ETI : quels sont les changements à anticiper concernant vos prix de transfert ?
Publié par Cathaline Batier et Théophile Trancart, avocats le | Mis à jour le
Largement implantées en dehors des frontières hexagonales, les ETI sont confrontées à un contexte international sans précédent, tant sur le plan économique que financier. Celles-ci doivent intégrer, dès à présent, ces nouvelles contraintes dans leur politique de prix de transfert.
Face à la singularité de la situation économique actuelle, marquée par des tensions géopolitiques et inflationnistes, les ETI ont dû réorganiser très rapidement leur supply chain afin de pallier les pénuries de matières premières et la hausse des coûts. Une fois ces contraintes opérationnelles maîtrisées, il est désormais nécessaire d'aligner la politique de prix de transfert avec le rôle joué par chaque entité au sein du groupe.
Prendre en compte la transformation des conditions de marché
Conséquence de l'inflation et du durcissement de la politique monétaire, les ETI subissent également la hausse des taux d'intérêts et, pour certaines d'entre elles, le resserrement des conditions de financement. Ces phénomènes doivent être intégrés dans la rémunération des relations financières intragroupe - qu'il s'agisse par exemple de prêts à moyen ou long terme, d'avances et de dépôts au sein du cash pooling ou de garanties financières -. De fait, cet alignement sur les conditions de marché apparaît d'autant plus nécessaire que ces transactions financières font l'objet d'un examen quasi-systématique par les administrations fiscales.
Anticiper l'extension et le durcissement des obligations documentaires
Le projet de loi de finances pour 2024 contient une série de mesures visant à renforcer le contrôle des prix de transfert par l'administration fiscale. Parmi celles-ci, on trouve notamment un élargissement des obligations documentaires en matière de prix de transfert applicables à certaines ETI. Cette mesure consisterait à abaisser le seuil à partir duquel les entreprises doivent avoir une documentation sous peine d'application de pénalités. Celui-ci serait désormais fixé à 150 millions d'euros de chiffre d'affaires ou d'actif brut au bilan, au lieu de 400 millions actuellement.
Le gouvernement souhaite également responsabiliser les entreprises dans la mise en oeuvre de leur politique de prix de transfert. Leur propre documentation leur deviendrait opposable. Elles devront ainsi être en mesure de justifier toute différence avec la politique présentée. Cette évolution implique donc une plus grande vigilance des ETI quant à la qualité de l'exécution de la politique de prix de transfert.
Dans le même temps, les sanctions seraient rehaussées en cas de défaut de réponse ou de réponse partielle concernant la documentation demandée lors d'un contrôle. Le montant minimum de l'amende serait porté à 50 000 euros au lieu de 10 000 euros actuellement.
Pour atteindre ces objectifs, un renforcement des moyens est en cours, tant en termes d'effectifs au niveau des équipes de contrôle qu'en matière de renseignement économique et financier. La priorité est clairement donnée au contrôle des prix de transfert.
A propos des auteurs :
Cathaline Batier est avocate au barreau de Lyon. Elle a créé Cambio Avocat, un cabinet qui propose une expertise sur les sujets de fiscalité internationale et de prix de transfert rencontrés par les PME, ETI et les grandes entreprises implantées à l'international. Théophile Trancart est avocat au barreau de Paris et fondateur de Cohérence, une société d'avocat qui accompagne et défend les ETI et entreprises internationales, avec une pratique dédiée aux opérations de trésorerie intragroupe.