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Faire financer ses litiges par un tiers : et pourquoi pas?

Publié par Stéphanie Gallo le | Mis à jour le

La pratique du third party funding est encore assez limitée en France. Pourtant, ce financement par un tiers de ses procédures contentieuses présente un certain nombre d'avantages. Le premier étant de ne pas grever sa trésorerie par des frais de procédures parfois élevés.

S'il est très répandu aux Etats-Unis et au Royaume-Uni, le third party funding (autrement dit le financement du contentieux par un tiers) en est encore à ses balbutiements en France, même si la pratique semble s'y développer un peu plus rapidement ces dernières années. Pourquoi ? Les principales raisons sont probablement à aller chercher du côté des enjeux financiers liés aux dommages et intérêts espérés d'une action en justice. Des enjeux aux montants beaucoup plus élevés dans les pays anglo-saxons. Une toute petite poignée d'acteurs se partagent aujourd'hui le marché français. Pour autant, ce dispositif présente un certain nombre d'intérêts.

Comment ça marche ?

Sur le papier, le fonctionnement est plutôt simple : le tiers financeur, - une société de gestion, un fonds d'investissement, etc, - prend en charge 100% des frais liés à l'action en justice, tout au long de la procédure (avec rétroactivité possible selon l'accord). Il s'agit des honoraires des avocats, des frais d'étude ou d'expertise éventuels etc. En échange de quoi, ce financeur récupère un pourcentage (20% en moyenne) des dommages et intérêts qui seront reversés à l'entreprise plaignante partenaire. En cas d'échec, pas de retour en arrière. Comme lorsqu'un Venture Capital a misé sur la mauvaise start-up, le tiers financeur assume seul. Ce qui signifie que les demandes de financement sont étudiées à la loupe. « Nous gardons en général deux cas sur dix présentés », précise ainsi Sidney Oury, cofondateur d'IVO, un des principaux acteurs français sur le sujet, le seul à être régulé par l'AMF.

Quand les litiges deviennent profit

« Les procédures peuvent être très longues et coûter cher en avance de trésorerie, ce qui décourage un certain nombre de plaignants alors qu'ils pourraient gagner. Avec le financement par un tiers, l'entreprise réserve ses moyens financiers à son coeur de métier. Les litiges, qui représentent habituellement un centre de coût, se transforment ainsi en centre de profit », expose le cofondateur d'IVO. Et en cas de victoire, les dommages et intérêt deviennent du résultat exceptionnel pour l'entreprise. Un point positif que relève également Julien Lecat, Avocat Associé au sein des départements Transport-Logistique et Contentieux et Arbitrage du cabinet Bignon Lebray : « Le financement par un tiers permet de lever le frein financier qui peut faire hésiter des entreprises à se jeter dans un contentieux long, coûteux, énergivore et chronophage».

Les entreprises financées peuvent aussi être renforcées par l'expertise juridique, souvent très pointues, des tiers financeurs. Un atout supplémentaire dans ce qui relève parfois du parcours du combattant, notamment pour les procédures complexes.

Les litiges financés par des tiers sont généralement des procédures plutôt d'envergure : « entre un et cinq millions d'euros de frais de procédures » du côté d'IVO, avec en face des gains attendus dix fois plus élevés. « Pour que l'opération soit gagnante pour toutes les parties, nous estimons qu'un rapport de un à dix est nécessaire entre l'investissement consenti et les gains espérés ». Il peut s'agir d'arbitrages, de recouvrements, de contentieux au sujet d'une rupture brutale de contrat, de litiges commerciaux...

Bien choisir son tiers financeur : les points de vigilance

L'avocat Julien Lecat alerte sur le choix du tiers financeur : « il faut être attentif au curseur de la rémunération de l'investisseur. Mais aussi à sa solidité financière : est-ce qu'il a bien les épaules pour couvrir vos frais, y compris si cela devait s'avérer plus couteux que prévu ? Et puis, il faut être attentif aux clauses éventuelles concernant la liberté de l'entreprise et de son avocat quant à la stratégie suivie. L'avocat doit bien défendre en premier lieu les intérêts de son client, c'est-à-dire l'entreprise, et ensuite ceux du tiers financeur. Ces intérêts vont la plupart du temps dans le même sens mais il peut arriver qu'il y ait des divergences ».



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