Valorisation de l'entreprise : au Daf de bien maîtriser la variation du BFR
Face au regain du marché des fusions-acquisitions, il revient aux Daf de servir la stratégie d'entreprise via une analyse fine du BFR et de ses capacités d'optimisation... ou de dérapage. Le flux de trésorerie est essentiel ; reste donc à bien maîtriser la variation de BFR.
En octobre 2014, 40% des décisionnaires exprimaient la volonté de réaliser une (ou plusieurs) acquisition(s) dans les trois prochaines années dans la dernière édition du Capital Confidence Barometer publiée par EY . Et pour cause ! Après cinq années de morosité sur le marché des transactions, 2014 paraît confirmer une reprise du marché mondial des fusions et acquisitions, dont la France, pour une fois, ne semble pas exclue. Les entreprises, qui ont réduit leur endettement pendant la crise et retrouvé des marges de manoeuvre financière, affichent un regain de confiance. Elles profitent d'un environnement de taux bas pour repartir à l'assaut de la croissance en privilégiant les opérations externes, après des années de prudence.
Les DAF doivent analyser le BFR
Ce contexte de redynamisation du marché pose la question de la valorisation d'entreprise, étape incontournable d'un processus d'acquisition. Or, une juste estimation de la valeur d'une entreprise - et donc potentiellement le succès d'une opération - est largement liée à une analyse fine du BFR et de ses capacités d'optimisation... ou de dérapage. Pour autant, cette question pourrait être mieux appréhendée dans le cadre de l'analyse financière des plus petites cibles.
Le flux actualisé de trésorerie (ou DCF, pour discounted cash-flow) s'est imposé comme l'une des méthodes de référence dans la valorisation d'entreprise. Par cette méthode, la valeur de l'entreprise est mesurée par sa capacité à créer des flux de trésorerie disponibles (free cash-flows). Mais si la marge d'exploitation est une composante plutôt bien maîtrisée dans le calcul de ces flux, la variation de BFR est un élément qui pourrait être mieux appréhendé, voire optimisé. Dans un contexte de forte pression sur les marges (due notamment à l'intensité concurrentielle accrue), tout point de BFR gagné (en pourcentage du chiffre d'affaires) est une piste à envisager. Les directions financières, dans la construction du business plan - comme les investisseurs dans l'examen de celui-ci - se concentrent encore largement sur le compte de résultat prévisionnel, mais sont moins attentifs à l'analyse du BFR sous-jacent, utilisé comme référence des variations futures.
Lissage des activités saisonnières et estimation du BFR normatif
Les entreprises doivent se concentrer principalement sur deux analyses. Il s'agit d'abord du lissage des activités saisonnières, qui doit permettre d'appréhender les besoins de trésorerie (et donc de financement du BFR) en prenant en compte les variations intra-annuelles de certaines activités. L'autre impératif est la démonstration du caractère normatif du BFR à un temps " t ". Il est en effet essentiel de montrer que la position de BFR retenue dans la valorisation a un niveau soutenable à long terme. Ces analyses pourront, et devront, tenir compte des impératifs de marché tels que :
-les réglementations spécifiques,
-les mix produits,
-les modifications des canaux de distribution,
-les mix géographique,
-et aussi des tendances sectorielles.
Construire un programme d'optimisation du BFR
Au-delà de ces considérations de pure modélisation, un levier opérationnel existe : un programme d'optimisation du BFR initié en amont de toute transaction permettra de démontrer le caractère raisonnable des améliorations attendues, sur la base des efforts engagés et des premiers résultats obtenus. Ce niveau optimisé de BFR pourra donc être considéré dans le cadre de l'évaluation comme une référence normative.
Un programme d'optimisation du BFR, qu'il soit concentré sur des leviers opérationnels, financiers ou comptables, permet en moyenne d'obtenir une amélioration de 10% de celui-ci : des premiers " quick wins " peuvent être obtenus dès 3 à 6 mois, et un retour sur investissement plus important se révéler sur la durée d'un exercice annuel. Les effets d'un tel programme se traduisent concrètement en termes d'évaluation : on estime en effet que, pour une société espérant une croissance annuelle de l'ordre de 2,5%, une amélioration progressive (et soutenable à long terme) de 10% du BFR permet d'accroître sa valorisation de ce même ratio.
L'optimisation du BFR a un impact conséquent sur la génération de free cash-flows d'une entreprise, et donc sur sa valorisation : une corrélation qui confirme l'intérêt pour les dirigeants d'anticiper cette problématique bien en amont d'une transaction.
Virginie Auvergnas, Senior Manager Transaction Advisory Service, EY
Mickaël Piffard Besnard, Senior Manager Transaction Advisory Services, EY
Après un Master en Finance d'Entreprise au SKEMA et un MBA au Tec de Monterrey, Mickaël Piffard Besnard, a évolué entant que Contrôleur Financier au sein des entités Microsoft, Oakley et Fidelity Investments. Depuis bientôt 7 ans, il est Senior Manager de la ligne de services Restructuring - Working Capital & Cash Management Services où il s'occupe plus particulièrement des problématiques de performance et de culture cash dans des environnements transactionnels de crise et in bonis.
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