Daf et DSI Un duo à l'unisson, ou presque
Les relations entre les Daf et les DSI ont rarement été un long fleuve tranquille. L'arrivée des NTIC a bouleversé la donne. En appliquant quelques principes fondamentaux, une collaboration respectueuse des caractéristiques de chaque fonction est tout à fait envisageable.
Une maîtrise de l'information de la direction financière, une gestion en autarcie des projets informatiques de la direction des SI: les relations entre les deux services sont longtemps restées au point mort. Les premiers signes d'un changement sont apparus dans les années 1990, avec l'arrivée en masse des ERP. La fonction financière s'est rapidement retrouvée «dépassée» face aux nouvelles problématiques liées au système d'information. « Il a fallu paramétrer un nouvel environnement comptable à l'intérieur du SI, entraînant une perte d'autonomie de la direction financière, obligeant celle-ci à comprendre les mécanismes des ERP », explique Christophe de Brébisson, associé chargé du conseil chez RSM France (audit, conseil et expertise comptable). Le changement culturel fut d'autant plus fort sur une population de Daf assez vieillissante. Le second changement majeur est dû au développement des problématiques liées aux services de mobilité, apparu durant la deuxième moitié des années 2000. Sous la déferlante des smartphones, laptops et autres tablettes, l'information devait transiter par un nombre croissant d'utilisateurs, la direction financière n'ayant plus seule la propriété de l'information.
Plus de doute aujourd'hui, par exemple, pour Xavier Mahéo, le Daf de Computacenter, groupe de distribution, de services, d'infogérance et de conseil informatique: « Les projets cruciaux pour l'entreprise ne peuvent plus être lancés sans une parfaite osmose entre les deux services. »
LA GOUVERNANCE D'UN PROJET SI
Un projet lié au système d'information ne peut être lancé aujourd'hui sans l'intervention de la DSI ou de la Daf, sachant que le domaine des compétences est parfois mal aisé à définir. « Il y a une vraie problématique de gouvernance et de pouvoir pour déterminer le service le plus apte à mettre en place les projets », résume Christophe de Brébisson.
Dans le cas d'entreprises de moins de 300 salariés, une personne possédant une partie des compétences des deux services prend, la plupart du temps, la responsabilité des projets. Il s'agit souvent du Daf, lequel a tout intérêt à se faire aider par des entreprises d'Amoa (assistance à maîtrise d'ouvrage). Pour les entreprises de taille supérieure (jusqu'à 2 000 collaborateurs), l'instauration/création d'un service appelé Dosi (direction de l'organisation des SI), en mesure de chapeauter les deux services, est chaudement recommandée. Ce service est généralement rattaché à l'informatique, mais les membres qui le composent maîtrisent très bien les besoins d'une Daf. A défaut de Dosi, la mise en place de comités de projets peut s'avérer un compromis idéal. « Les chefs de projets jouent un rôle de liaison entre les deux services, en assurant une bonne communication, un respect des deadline, etc. », souligne Pierre-Alain Lecointe, directeur général de Unit4 Coda, éditeur de logiciels de gestion financière.
ASSIMILER LES DIFFERENCES
L'usage d'un jargon propre à chaque service peut rendre les relations compliquées. «On assiste, en quelque sorte, à une bataille des experts, chaque service pensant détenir la vérité absolue », remarque Pierre-Alain Lecointe. Aussi, afin d'éviter que la situation ne parasite l'ensemble de l'entreprise, des règles de bonne conduite sont nécessaires. A commencer par une direction générale qui doit définir les rôles et les fonctions de chaque service. Hiérarchiquement, la DSI, en dépendant de la direction administrative et financière, a longtemps été perçue comme un prestataire de services pour le compte de cette dernière. Aujourd'hui, nombreuses sont les entreprises qui rattachent la DSI à la direction générale. Par ailleurs, la Daf doit impérativement maîtriser les outils informatiques mis à sa disposition, ce qui est très souvent le cas avec la génération de Daf arrivant sur le marché. Lors de la migration de l'outil de messagerie d'Aperam (7 300 boîtes aux lettres), producteur d'aciers spéciaux à base d'inox, vers Google Mail, DSI et Daf ont fortement été impliqués. «Le Daf a joué le rôle de sponsor du projet sous l'angle stratégique, tout en étant le lien direct avec la direction générale, alors que le DSI s'est imprégné de l'opérationnel en dirigeant le projet», explique Michel Berret, le DSI. Le succès de ce projet fut rendu possible avant tout grâce à la faculté des protagonistes à se mettre à la place des utilisateurs. Dans le cas du projet portant sur un système automatique de facturation envoyé par e-mail lancé par Computacenter, la forte implication de la direction financière en mesure d'exprimer avec précision les besoins, et la faculté d'écoute de la DSI afin d'assimiler les besoins exprimés ont permis de mener à bien ces projets. «Tout devient possible à partir du moment où les vannes de la communication entre les deux services sont ouvertes et que chaque membre est en mesure de se mettre dans la peau de l'autre», conclut Xavier Mahéo.
POUR ALLER + LOIN
QUAND L'EXTERNALISATION DES SI COMPROMET LES PROJETS DE L'ENTREPRISE
TnP (Transformation'n Performance), cabinet de conseil, a rendu public début septembre son observatoire sur les métiers SI dans le secteur financier. Si l'étude a sollicité les principaux établissements bancaires, certains constats sont à prendre en compte par les Daf et les DSI d'ETI. Thierry Cartalas, Associate Partner TnP revient pour Daf-mag.fr sur la gestion RH des métiers SI. Découvrez la vidéo «Quand l'externalisation des SI compromet l'évolution des projets de l'entreprise», ainsi que l'observatoire sur notre site: www.daf-mag.fr.
TROIS QUESTIONS A ... ALAIN CHAMPLON, DSI de SCC, société spécialiste en infrastructures informatiques
Avec les enjeux de productivité, les Daf et les DSI ont une multitude d'occasions de collaborer»
Quel est votre constat quant aux relations Daf/DSI aujourd'hui?
Avec l'arrivée de la crise économique en 2008, la direction financière a dû se rapprocher de la direction de l'information afin de trouver des sources d'économie, entraînant notamment le développement de projets portant sur la dématérialisation des documents. A fortiori, l'objectif était de faire passer les métiers traditionnels de comptabilité vers une ère électronique, via la numérisation.
Quelles sont vos tendances observées sur ces relations?
Nous sommes amenés à dialoguer ensemble de manière plus profonde et sur davantage de sujets. Les services financiers, qui avaient l'habitude de travailler sur de vieux SI, entrent de plain-pied dans le «monde moderne numérique». Les enjeux de productivité sont très forts au sein de tous les services, entraînant une multitude d'occasions où les Daf et les DSI doivent collaborer, que ce soit au niveau des outils de mobilité, jusqu'au SI central.
Quelles sont les règles à respecter?
Tous les projets significatifs réclament, d'une part, un comité de pilotage qui doit se réunir une fois par mois. D'autre part, les services doivent apprendre à travailler en mode collaboratif, un mode d'ores et déjà bien répandu. Enfin, les deux parties doivent se mettre à la place de l'utilisateur.