Réforme du label ISR : les enjeux pour les gestionnaires d'actifs
Publié par Stéphanie Alexandrino, Mayer Brown le - mis à jour à
Les objectifs de la réforme ont été élargis aux fonds immobiliers. Voici tout ce qu'il faut savoir sur le référentiel du label.
La réforme du label français Investissement Socialement Responsable (ISR) a été lancée depuis le début de l'année de 2021 suite aux conclusions du rapport de l'Inspection générale des finances de décembre 2020 mettant en avant un certain nombre de faiblesses du label.
1. Les principaux objectifs de la réforme
La réforme a pour objectif de promouvoir un investissement durable et responsable auprès des investisseurs dans un contexte d'évolution du cadre réglementaire. Le label ISR avait été élargi aux fonds immobiliers.
L'objectif est d'endiguer les pratiques dites de " greenwashing " par diverses mesures permettant :
- de garantir à l'investisseur que son investissement contribue au financement d'un modèle économique durable,
- de s'adresser de manière prioritaire à l'épargnant particulier avec un message simple et concret,
- une meilleure articulation du label ISR avec les autres labels existants (Greenfin, Finansol, Relance, CIES),
- un reporting conforme aux exigences édictées par l'Autorité des Marchés Financiers (AMF) en matière de communication aux investisseurs par les fonds d'investissement intégrant des caractéristiques extra-financières,
- une meilleure articulation autour des nouvelles règles européennes adoptées ou en discussion (Taxonomie, SFDR, Benchmark climat, CSRD),
- une harmonisation du label au niveau européen,
- une interprétation du référentiel actuel.
2. Les actions entreprises
Nouvelle gouvernance
Une première étape a été franchie avec la mise en place d'une nouvelle gouvernance en octobre 2021 permettant de créer un meilleur équilibre entre les acteurs concernés et l'octroi de moyens propres et permanents à l'image de ce qui existait déjà pour la majorité des labels européens. Le nouveau comité du label ISR se compose de 13 membres représentant les différents intervenants de la gestion d'actifs : sociétés de gestion de portefeuille, distributeurs, investisseurs non professionnels, institutionnels, professionnels de la finance à impact et du capital investissement, représentants de l'AMF.
3. Guide d'interprétation du référentiel du label
La publication d'un premier guide d'interprétation du référentiel du label ISR en date du 29 novembre 2021 constitue une nette avancée dans la redéfinition des contours et de la légitimité du label ISR. Le guide a vocation à évoluer et à s'adapter aux pratiques de place. Il apporte des précisions quant aux règles applicables destinées à faciliter la tâche des gestionnaires de fonds.
Le guide précise notamment pour les valeurs mobilières :
- la délimitation de l'univers d'investissement initial avec la prise en compte des caractéristiques géographiques, sectorielles ou de capitalisation,
- la possibilité de labelliser des fonds thématiques,
- la possibilité de labelliser des fonds de fonds et des mandats de gestion investis à 90% dans des fonds labellisés ISR sous certaines condition,
- l'application des indicateurs de surperformance uniquement au portefeuille du fond,
- l'appréciation de manière qualitative par le certificateur des informations non publiques relatives aux moyens internes mis en oeuvre pour l'analyse ESG,
- la pondération de chaque titre en portefeuille publiée dans l'inventaire complet du portefeuille de manière lisible et accessible pour le grand public,
- la présentation des objectifs mesurables sur chacun des 4 domaines ESG (E, S dont DH et G) de manière cohérente avec la doctrine AMF,
- la possibilité pour les fonds répliquant un indice ESG de se comparer aux indicateurs de l'indice parent " non ESG ",
- la description des actions d'engagement déployées en lien avec les indicateurs de superformance,
- l'utilisation de produits dérivés à titre d'exposition de manière provisoire pour une durée d'un mois,
- l'utilisation de dérivés de manière provisoire pour une durée de douze mois.
Concernant les fonds immobiliers, le guide précise notamment :
- l'impossibilité d'exclure du ratio maximum de 10% d'actifs non labellisés ISR des investissements dans des classes d'actifs pour lesquels une démarche ISR n'existe pas ;
- la mise en place pour les autres classes d'actifs d'une démarche conforme aux exigences définies au critère 3.1 de labellisation des fonds d'actifs mobiliers ou l'investissement dans des fonds labellisés ISR,
- la liberté de choix des approches concernant la poche financière des fonds immobiliers ;
- la détermination du poids des immeubles selon la méthode par surface ou par valeur d'expertise y compris celle publiée par la société de gestion dans son rapport annuel,
- les thématiques environnementales et de performance énergétique sont insuffisantes pour répondre aux exigences ISR,
- la révision de la grille de notation à l'issue d'un cycle de 3 ans d'amélioration,
- la mise en place d'une grille de notation différente par typologie d'actifs pour des fonds ayant plusieurs classes d'actifs immobiliers,
- l'évaluation ESG cible sur une durée cohérente avec le cycle de labellisation,
- la définition d'un indicateur de performance résultant de plusieurs critères correspondants à plusieurs thématiques,
- la signature d'une Charte ESG est insuffisante pour prouver une amélioration des pratiques de ses parties prenantes clés (locataires, usagers, prestataires) dans la recherche de performance ESG,
- la détermination de la réalisation d'un investissement significatif à partir d'éléments quantitatifs, principiels et qualitatifs.
Afin de faciliter la comparaison des fonds labellisés entre eux et permettre une meilleure lecture pour l'investisseur, une amélioration du label ISR est nécessaire et devra s'inscrire dans l'évolution du cadre réglementaire.
Pour en savoir plus
Stéphanie Alexandrino est avocate counseldans le département Corporate & Securities, en charge de la pratique structuration de fonds et gestion d'actifs du cabinet Mayer Brown à Paris et de son Luxembourg desk.