Direction financière : gagnez en influence au sein de l'entreprise !
Publié par Audrey Fréel le - mis à jour à
La capacité à influencer est une compétence clé pour les directeurs financiers. Cela implique de convaincre différents interlocuteurs et de s'adapter à un environnement fluctuant, tout en restant aligné avec ses valeurs.
Fonction stratégique de l'entreprise, le directeur financier est souvent considéré comme le bras droit du directeur général. Bien que membre du Comex, il peut toutefois être moins influent que d'autres fonctions comme la direction commerciale ou marketing, qui génèrent directement du cash. « Chaque écosystème a ses spécialités et ses codes, qui influencent les plaques tectoniques du pouvoir », constate Susanne Liepmann, DAF et présidente de Fiplus. Pour elle, la prise d'influence doit invariablement s'accompagner d'un décryptage de l'écosystème dans lequel le directeur financier évolue. Dans certains cas, le DG ne sera pas le seul à avoir le pouvoir. « Par exemple, dans une entreprise familiale, la famille aura toujours de l'influence, même si elle ne fait pas partie du management », illustre Susanne Liepmann.
Convaincre différents interlocuteurs
Autre cas : les filiales d'une société mère étrangère. Le directeur financier peut être amené à reporter au directeur général de la filiale française, mais les décisions financières devront être validées au niveau de la direction financière de la maison mère. Cela implique de convaincre différents interlocuteurs, qui n'auront pas forcément les mêmes intérêts. Les entreprises sous LBO auront également un fonctionnement différent. « Dans ce genre de société, le fonds a beaucoup d'influence et il faut comprendre son optique. En ce sens, il ne faut pas que le DAF agisse uniquement pour le CEO, au risque de perdre en influence auprès du fonds. Le directeur financier a un rôle primordial à jouer dans cette relation tripartite car il parle la langue du management mais aussi du fonds, auprès duquel il doit être considéré comme un tiers de confiance », analyse Susanne Liepmann, qui travaille depuis plusieurs années dans ce genre de structure. Le DAF est une fonction transversale qui peut aussi être en concurrence sur certains sujets avec la DRH ou encore la DSI. « Lors d'une de mes dernières expériences, la DRH était très écoutée car il y avait des enjeux sociaux énormes en raison d'une grande réorganisation à mener », illustre Fabienne Barouillet, DAF expérimentée et manager de transition. Pour elle, la fonction la plus influente sera celle qui portera le plus d'enjeux pour l'entreprise, à un moment donné. « Dans une période de crise, comme un redressement judiciaire, la finance est au coeur du réacteur et a énormément d'influence car elle permet à l'entreprise de continuer de vivre », constate-t-elle.
S'adapter au changement
Certaines thématiques montent également en puissance et il est important de s'en emparer pour rester dans la course, comme la cybersécurité, la data, l'intelligence artificielle mais aussi l'ESG. « Le DAF ne peut pas tout porter mais il doit se positionner sur ces sujets et travailler main dans la main avec d'autres directions pour garder son influence », indique Susanne Liepmann. Dans un environnement très fluctuant, l'adaptation au changement devient primordiale. « Lors d'une évolution de l'écosystème (nouvel actionnaire, fusion, etc.), si le DAF continue à se comporter de la même façon, il pourra perdre de l'influence car il ne s'adressera plus aux bonnes personnes. Les personnes influentes aujourd'hui ne le seront pas forcément demain », remarque Susanne Liepmann. Pour cela, il est nécessaire de créer un climat de confiance et d'être dans une quête d'amélioration continue. « Il ne faut pas s'asseoir sur ses acquis car les écosystèmes peuvent subir de grands changements. Il est important de maîtriser un certain nombre de softskills, comme l'enthousiasme, l'authenticité, l'écoute proactive, l'humilité, le charisme ou encore l'agilité », énumère Audrey Silvain consultante senior au sein de la division RH du cabinet Robert Walters. Pour elle, il est aussi primordial de bien connaître ses forces et ses faiblesses, afin d'adopter une bonne posture. « Il faut se positionner comme un business partner et faire le lien entre les problématiques de la direction et l'exécution en interne », ajoute Fabienne Barouillet.
L'influence n'est pas le pouvoir
Les expertes interrogées distinguent également la prise d'influence de la prise de pouvoir. « La prise d'influence doit s'effectuer pour le bien commun de l'entreprise, et pas uniquement pour les intérêts personnels », déclare Susanne Liepmann. En ce sens, il faut veiller à privilégier le collectif et non agir uniquement dans le but de booster sa carrière professionnelle. Si la confrontation est parfois inéluctable pour gagner en influence, celle-ci doit rester saine. « Il faut avoir posé le cadre et comprendre les enjeux et rôles de chacun, tout en restant dans l'écoute des autres », explique Susanne Liepmann, qui insiste aussi sur l'importance de rester aligner avec ses valeurs. Par ailleurs, la prise d'influence peut parfois se heurter à de nombreux freins, ce qui rend compliqué l'adoption des idées et projets. « Certaines choses ne sont pas influençables malgré toute la bonne volonté que l'on peut avoir. Dans certains cas, il faut avoir l'intelligence de s'en aller », estime Susanne liepmann. Un avis partagé par Fabienne Barouillet : « Le DAF est garant de la fiabilité des comptes, s'il n'est pas en mesure de tenir ce rôle, cela peut devenir très compliqué et conduire à une rupture », souligne-t-elle. Compétence clé pour les dirigeants, l'influence doit se construire petit à petit en évitant un certain nombre d'écueils. « Tout comme le réseau, elle s'entretient », conclut Audrey Silvain.