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CSRD : report de 4 ans annonce le Sénat pour les exercices 2025, 2026 et 2028

Publié par Christina DIEGO le - mis à jour à

Le Sénat vient d'adopter un amendement ce lundi 10 mars demandant un report de quatre ans de la mise en oeuvre de la directive CSRD pour les entreprises concernées à partir des exercices comptables 2025. Une annonce qui remettrait en question de façon beaucoup plus définitive les objectifs de durabilité des entreprises. Et qui sème encore plus le trouble. Détails.

CSRD, acte IIII. Nouveau rebondissement qui est passé un peu inaperçu cette semaine avec une actualité plutôt tournée sur les enjeux géopolitiques. Ce lundi 10 mars 2025, le Sénat a adopté, en première lecture et procédure accélérée, le projet de loi portant diverses dispositions d'adaptation au droit de l'Union européenne (Ddadue). Ce texte vise notamment à moderniser le cadre juridique français en matière de durabilité en transposant les directives européennes récentes, lit-on sur le site du Sénat. La directive CSRD figure parmi les principales adaptations souhaitées.

CSRD et la procédure « stop the clock »

Parmi les mesures adoptées, une attention particulière a été portée à la directive européenne CSRD sur la publication d'informations en matière de durabilité par les entreprises. Initialement prévue pour s'appliquer progressivement à partir de 2024, sa mise en oeuvre a été examinée lors d'un projet de loi dit « Package Omnibus » le 26 février dernier et doit faire l'objet d'un vote devant le Parlement européen dans les prochains mois. D'ici là, des discussions parlementaires ont déjà commencé générant une incertitude croissante pour les entreprises concernées par la CSRD et le devoir de vigilance européen. Tomas Tobé, représentant suédois du Parti Populaire Européen (PPE), a ainsi annoncé que son groupe demandait l'application d'une procédure d'urgence. L'objectif serait notamment d'adopter un dispositif « stop the clock, » permettant de reporter de plusieurs mois, voire plusieurs années, l'entrée en vigueur de ces obligations, comme le propose la Commission européenne dans son projet Omnibus ». En France, les sénateurs sont sur cette même ligne directrice et ont d'ailleurs fait pencher la balance vers un report beaucoup plus conséquent.

Le Sénat adopte un report de 4 ans

Lors de l'examen du projet de loi Ddadue, des amendements ont été proposés pour reporter l'application de la CSRD. Notamment, l'amendement n°7 rectifié, présenté par plusieurs sénateurs, qui vise à repousser de quatre ans les obligations de publication pour les entreprises concernées, décalant ainsi les échéances initiales de 2024 à 2028.

« C'est un très mauvais message envoyé aux entreprises. A mon sens, cette décision est une erreur, car reporter de quatre ans ces obligations envoie un signal négatif, laissant entendre que ces enjeux ne sont pas une priorité, alors même que les entreprises ont déjà amorcé leur transformation », nous explique Philippe Vincent président de la CNCC.

Concrètement, l'ordonnance n° 2023-1142 du 6 décembre 2023 serait ainsi modifiée :

- Les entreprises de la 2e vague devraient publier un rapport de durabilité afférent aux exercices ouverts à compter du 1er janvier 2029 (au lieu de 2025). Une publication envisagé en 2030 au lieu de 2026 ;

- Les entreprises de la 3e vague devraient publier un rapport de durabilité afférent aux exercices ouverts à compter du 1er janvier 2030 (au lieu de 2026). La publication serait prévue en 2031 au lieu de 2027 ;

-Les entreprises de la 4e vague devraient publier un rapport de durabilité afférent aux exercices ouverts à compter du 1er janvier 2032 (au lieu de 2028). Une publication revue pour 2033 au lieu de 2029.

Ce report de quatre ans de la mise en oeuvre des obligations CSRD « permettrait aux entreprises concernées de mieux se préparer à ces nouvelles règles », en leur laissant le temps nécessaire pour « structurer leur reporting de manière efficace », précise l'amendement. Une éternité pour une entreprise.

« Un report de quatre ans, à l'échelle du temps politique, c'est presque synonyme de jamais. Un délai de deux ans aurait pu avoir du sens, en permettant aux entreprises concernées de s'aligner progressivement et en clarifiant leur positionnement sur le sujet du reporting de durabilité, notamment pour celles des vagues 2 et 3 qui hésitaient encore sur leurs obligations, comme la nomination d'un commissaire aux comptes », analyse le président de la CNCC.

Ce report concerne près de 80 % des entreprises qui devaient initialement se conformer aux obligations de reporting. « Il accentue la fracture entre les PME, qui ont besoin de structurer leur maturité administrative pour mieux anticiper l'avenir, et les grandes entreprises déjà préparées. Plutôt que de simplifier le cadre pour le rendre plus accessible et efficace, on semble aujourd'hui privilégier une dérégulation qui, à mon sens, est risquée et contre-productive », conclut-il.