Commerces coopératifs : quels avantages pour les clients ?
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Les entreprises coopératives ont le vent en poupe en France. Prisées par les consommateurs, elles affichent un développement remarquable depuis dix ans. Pour comprendre cet engouement, voici quelques ingrédients de cette réussite à la française.
Les coopératives françaises sont des stars. Vu de l’étranger, cette spécificité made in France fascine : 26 d’entre elles figurent dans le Top 300 international, dont 6 dans le Top 50, selon le rapport World Cooperative Monitor 2017. Elles exercent principalement dans la banque, le commerce de détail et l’agriculture. Toutes s’appuient sur les grands principes de l’ESS (économie sociale et solidaire) : utilité sociale, solidarité, gestion participative, profit individuel proscrit, responsabilité. Autant de garde-fous qui ne les empêchent pas d’être performantes économiquement. Selon l’étude 2018 de CoopFR, une organisation regroupant les coopératives hexagonales, ces dernières pèsent 320 milliards d’euros de chiffre d’affaires, 1,3 million de salariés et sont très bien implantées régionalement. Un Français sur trois est membre d’une coopérative (commerçants, agriculteurs, artisans…). Le modèle plaît, voici pourquoi.
Le modèle plaît car il répond à une demande du grand public. Une demande pour plus de transparence et plus d’équité, pour des tarifs vraiment compétitifs, sans pour autant nuire aux résultats et aux performances des entreprises. « Nous sommes convaincus de l’intérêt du citoyen pour le modèle d’entreprise durable que nous représentons, affirme Philippe Mangin, président de Coop de France, qui n’a pas plongé dans la financiarisation, qui reste éloigné du modèle boursier. Et, du point de vue du consommateur, de son attention à notre capacité à raccourcir la chaîne, à maîtriser l’origine des produits mieux que d’autres et que, s’il y a profit, il est d’abord tourné vers les producteurs agricoles, l’investissement et pas vers des actionnaires ou je ne sais quel paradis fiscal. »
Certaines entreprises coopératives communiquent beaucoup sur ces thèmes fédérateurs, comme le Crédit Mutuel et le Crédit Agricole pour le secteur bancaire, ou Système U dans la grande distribution. Tous les domaines d’activités sont concernés, comme par exemple les agences de voyages. Dans ce secteur hyper concurrentiel depuis l’avènement des centrales d’achat sur Internet, les réseaux d’agences traditionnelles ont beaucoup souffert. Pourtant, l’un d’entre eux tire sont épingles du jeu, après avoir réussi sa transition numérique. Il s’agit de Selectour, qui regroupe 1200 agences sur tout le territoire français (dont plus de 850 sous la bannière directe de Selectour). Pour la direction d’une coopérative, l’objectif est toujours le même : comment proposer les meilleurs services, au meilleur prix, sachant que les profits n’iront pas dans la poche des actionnaires ? Depuis mars 2018, ce réseau d’agences a par exemple mis en place un système de paiement en trois ou quatre échéances via un accord avec la Banque Casino, afin d’offrir plus de flexibilité à ses clients en étalant les paiements. « Nous avons longtemps été sollicités par nos clients pour avoir une solution de paiement en plusieurs fois, avance Edouard Roux de Lusignan, directeur e-commerce et marketing de Selectour. Cette solution va augmenter la satisfaction de nos clients lorsqu’ils réserveront leur voyage. » De plus, ce réseau coopératif français a su se tourner vers l’international. Selectour est membre du réseau Radius Travel qui réunit les principaux réseaux d’agences de voyage indépendants dans quatre-vingt pays. « L’appartenance non capitalistique au réseau Radius permet aux membres de Selectour de répondre aux appels d’offres internationaux, explique Laurent Abitbol, dirigeant de la coopérative, et d’offrir la puissance d’achats, la souplesse et l’efficacité d’un réseau indépendant non intégré. » Outre leurs services et des tarifs compétitifs, les entreprises coopératives séduisent aussi car elles réussissent vraiment à mettre le client au cœur de leur stratégie.
Dans le domaine du commerce au détail, de nombreuses enseignes coopératives – plus ou moins connues du grand public – s’engagent véritablement pour leurs clients. Voire leurs patients, quand il s’agit d’optique. Cela a été le cas par exemple avec Optic 2000, quand le gouvernement a avancé un projet de déremboursement des lunettes. « Optic 2000 s’est fermement prononcée contre le projet de déremboursement des lunettes par la Sécurité sociale, affirme Yves Guénin, le secrétaire général de cette entreprise coopérative. Ainsi que pour les accords entre mutuelles et opticiens, afin de limiter les charges pour les patients – et se prémunir contre le risque d’une santé au rabais, ou à deux vitesses. »
Dans le domaine de l’optique – qui touche 60% de la population française –, de profonds changements s’opèrent actuellement. Le plus important d’entre eux, pour les clients, est le renforcement de la position de l’opticien dans la chaîne de la santé. « L’opticien est un professionnel de la santé, souligne M. Guénin. Il a une position privilégiée auprès des patients : sa proximité, sa disponibilité et son expertise en font un relai essentiel pour leur parcours de santé visuelle. Cette expertise se situe en magasins, portée par les compétences de l’opticien, tant techniques (réalisation des examens, montage et ajustements des équipements), qu’humaines (accompagnement du patient). » De plus, en 2016, les professionnels du secteur ont publié le Décret opticiens, afin de renforcer leur rôle auprès des consommateurs/patients, afin de déléguer des prérogatives jusque là réservées aux ophtalmologues, vers les opticiens, leur offrant ainsi davantage d’autonomie. Dans son domaine, Optic 2000 a également amélioré son image de marque auprès de ses clients, grâce à des services de bonne qualité sanctionnés par des labels type Afnor. « Nous avons choisi de faire certifier nos points de vente ‘Qualité en optique’ par l’Afnor, ajoute Yves Guénin. Nous pensons qu’il en va de notre responsabilité d’acteur de santé. C’est important pour nous crédibiliser. » La crédibilité et la confiance du public sont en effet au cœur de l’ESS (économie sociale et solidaire). Et c’est particulièrement sensible pour les enseignes du commerce équitable.
La solidarité est en effet l’un des piliers de l’ESS. Cette solidarité ne s’exprime pas qu’à l’intérieur du territoire, mais concerne aussi l’origine de matières premières, surtout dans le domaine agricole (secteur nº2 après la banque, dans l’ESS). Cette valeur est au cœur de la stratégie de l’entreprise coopérative Ethiquable, créée en 2003. L’objectif de cette marque – que les consommateurs peuvent retrouver dans 4000 points de vente en France – est d’établir un lien direct avec le producteur. Cela garantit à ce dernier un prix juste versé (café, cacao…) et des créations d’emplois au niveau local, et aux consommateurs une traçabilité des produits, des produits bio, un réel respect de l’environnement et une répartition équitable des richesses. Autant d’arguments qui résonnent positivement auprès des consommateurs, de plus en plus enclins à acheter des produits respectueux à la fois de l’environnement et de l’humain. « Nous avons créé cette entreprise en accord avec nos idéaux, se souvient Rémi Roux, directeur commercial d’Ethiquable, l’un des trois fondateurs avec Christophe Eberhart et Stéphane Comar. Nous voulions quelque chose qui ait un sens en plaçant l’homme et son travail au cœur des valeurs de l’entreprise. Nous donnons la priorité aux peuples qui, en plus d’être paysans, défendent les spécificités de leur terroir, des modes de cultures agroforestières, leur identité et leur mode de vie. » Entre performance, qualité de service, respect de l’environnement et de l’humain, les entreprises coopératives possèdent de nombreux atouts dans leur jeu.