[Tribune] Et si on laissait vraiment tomber le processus budgétaire annuel ?
Publié par Pascal Rhoumy, BM&A le | Mis à jour le
Il n'a jamais été aussi difficile de construire un budget tant les incertitudes sont présentes. Et pourtant, on a besoin de comprendre où cet environnement peut nous emmener. Et si cette urgence admise par tous était le bon moment de réformer votre processus budgétaire annuel ?
On en parle depuis des années : le processus budgétaire prend un temps incroyable ; il enferme la vie de l'entreprise dans le rythme de l'exercice comptable ; on passe sa vie à analyser et (ré) expliquer des écarts liés aux hypothèses de départ... Même cette année, les financiers vont encore consacrer des semaines à essayer de construire des budgets 2023 détaillés dans toutes directions alors qu'il n'a sans doute jamais été aussi difficile à construire...
2023 est la bonne année !
Cette fin d'année, remplie comme jamais d'incertitudes, devrait être l'occasion rêvée de mettre le processus budgétaire au rang des outils d'autrefois. Mais, en même temps, plus que jamais, les actionnaires, dirigeants, banquiers sont impatients d'avoir une vision pour l'année prochaine. Sans doute pour essayer de se rassurer, pour avoir une feuille de route face à la tempête qui s'annonce.
Supprimer le budget ? mais vous n'y pensez pas ? On ne peut pas se passer de ce processus pour animer et manager nos équipes, les mettre devant les immenses responsabilités qu'ils auront peut-être à affronter... Et nos outils de reporting sont construits pour piloter par rapport à un budget...
Comment être contre ces arguments ? Bien sûr, animer les équipes, se fixer une ambition commune, anticiper les aléas des prochains trimestres, préserver des outils de pilotage réactifs... sont juste des objectifs incontournables et essentiels à la survie de l'entreprise.
Mais faut-il pour autant que les équipes dédient des centaines voire des milliers d'heures à prévoir des budgets de ventes et de coûts jusque dans leurs moindres détails puis à faire tourner de multiples boucles de révisions parce que les objectifs de la direction générale ne sont pas atteints, voire finissent par mettre les chiffres qu'il faut (pour en finir... ? Est-ce que la précision apporte réellement de la sécurité dans la prévision ? Bien sûr que non mais combien d'entre nous le font pourtant ?
D'accord pour 2023, c'est trop tard pour changer mais si on se disait que c'était la dernière fois ; cette année étant la caricature d'un exercice où on peut aussi bien prévoir une récession de 4 % qu'un rebond économique de même ampleur... 2023 est la bonne année pour que les plus réticents acceptent !
Le budget n'est pas une comptabilité prévisionnelle mais une représentation de votre business model
Dans le processus budgétaire, les objectifs sont indiscutables mais les méthodes obsolètes. Dans la majorité des cas, les budgets sont construits comme une comptabilité prévisionnelle : on anticipe ce qu'on devra (it) enregistrer au cours de la période à venir en raison des métiers de l'entreprise, des objectifs internes et des paramètres exogènes attendus... Et parfois, certains descendent presqu'au niveau des comptes individuels, des sections analytiques ou des centres budgétaires de responsabilité...
Au lieu de projeter la structure comptable passée pour anticiper les coûts à venir, on devrait d'abord modéliser le(s) business models de l'entreprise. En effet, même lorsque l'environnement économique est très volatil, il(s) reste (nt) beaucoup plus stable(s) dans le temps. L'objectif est donc de le(s) représenter sous la forme d'une ou plusieurs équations composées de constantes et d'inconnues correspondant aux principaux facteurs de volatilité à anticiper et actualiser du type « Rt = CA - ax - by - C... »
De cette manière :
Pour avoir vu la réaction de certains conseils d'administration à la présentation du budget en dynamique, je vous assure que la finance prend une autre dimension...
À partir de là, vous pouvez mettre en place les dialogues inter-actifs du rolling forecast
Dès l'instant où vos activités sont modélisées et que vos réalisations peuvent être rapidement / immédiatement actualisées, il devient possible de mettre en place tous les autres avantages d'un système de rolling forecast :
Vous franchissez ainsi une nouvelle étape dans votre rôle de business Partner et vous vous rapprochez des enjeux de vos homologues opérationnels.
Alors, quand passez-vous de la carte routière au GPS ?
Pour en savoir plus
Pascal Rhoumy, 58 ans, expert-comptable et associé au sein du pôle Conseil et Support Opérationnels de BM & A , accompagne les directions financières dans leurs projets de transformation et de pilotage de la performance économique.